[quote=« Photonik »]Voilà un petit film fort sympathique.
Tourné il y a déjà deux ans, il n’aura pas trouvé le chemin des salles françaises, ce qui n’étonnera personne quand on connaît l’état de la distribution en salles (tintin pour voir les petites péloches fauchées, pour faire simple). Le film est pourtant, malgré quelques défauts, joliment usiné, surtout au niveau de son script impeccable.
Le voilà dispo en VOD/DVD/Blu-Ray depuis tout récemment.
Le script met donc en scène un trio de jeunes gens qui tombent chez leur voisin scientifique, décédé dans des circonstances étranges, sur une machine capable de leur présenter (via des photos) le futur à échéance de 24 h. Après une valse hésitation (prévenir la police ou pas), le trio décide d’exploiter le potentiel de la machine en matières de profits…
Bradley King (réalisateur) et B.P. Cooper (producteur) joignent leurs efforts pour pondre ce script assez virtuose, et pas uniquement pour l’aspect « mindfuck » narratif, même si c’est évidemment cet aspect-là qui frappe en premier lieu.
Sur ce plan-là, le film s’inscrit dans la veine d’une petite vague de films récents (dans les dix années écoulées on va dire) s’appuyant sur le ressort du voyage temporel et ses multiples débouchés scénaristiques, à grand renfort de paradoxes insolubles et de conséquences inattendues. On pense à « Time Crimes » du virtuose Vigalondo, au fabuleux « Triangle » de Christopher Smith ou encore au formidablement tarabiscoté « Primer » du petit génie Shane Carruth. Plus récent encore, il y a le vertigineux petit budget « Coherence » qui fait furieusement penser à ce « Time Lapse », notamment du fait de leurs tout petits budgets respectifs et de leurs scripts en béton armé.
Les paradoxes se multiplient donc ici comme dans les films sus-nommés ; l’originalité réside ici dans le fait que par la faute de leur fenêtre sur le futur, les personnages sont obsédés à l’idée de ne pas changer d’un iota le cours de l’histoire (le recours au support photographique est ainsi très intéressant ; il semble fiable en apparences mais ne l’est pas complètement…). Du coup, on se demande toujours ce qui se passerait si les persos ne respectaient pas les règles qu’ils se sont fixés arbitrairement. En tout cas, le film surprend toujours : ce n’est pas le moindre des paradoxes du film, qui ouvre une fenêtre sur le futur tout en demeurant parfaitement imprévisible…
Décidément bien riche, le script redouble le ressort « thriller » d’une réflexion sur l’inspiration artistique (si je sais ce que je vais pondre demain, en suis-je l’auteur ?) qui fournit une variation intéressante sur le « paradoxe de l’écrivain ». Et puis surtout, le scénario brosse des portraits de persos tous intéressants et/ou attachants, incarnés par des acteurs solides. Le film est en effet, et c’est finalement aussi important que le ressort purement SF, l’histoire d’un drôle de couple/trio amoureux…
Tout au plus pourra-t-on déplorer une réalisation un peu limite : la mise en scène et la photo font très « petit film indé amerloque » (ce qu’est « Time Lapse » au demeurant, mais je veux dire par là que le film ne transcende pas sa condition de ce côté-ci), même si le réalisateur en profite quand même pour pondre une ou deux images éloquentes (comme ce réveil fracassé qui illustre le statut temporel du récit). La musique et le sound-design sont également un peu chiches, avec des effets convenus à tous les étages ou presque. Sur le plan formel, rien de bien éblouissant donc, bien au contraire.
Des défauts bien réels, certes, mais le tourbillon narratif qui porte le film les balaye quand même assez facilement. Le film ayant de plus le bon goût de se conclure sur une pirouette vicelarde et même cruelle (tout en raccrochant les wagons scénaristiques), je dis banco au final.
Les fans de prises de tête temporelles, c’est par ici que ça se passe !!![/quote]
Entièrement d’accord avec tout ça, mais je serais un peu moins dur avec la mise en scène. Y a des choses vraiment bien autour de la préparation de la pièce avant l’arrivée du bookmaker, par exemple. Et le simple fait que l’appartement dispose d’une grande fenêtre, donc une sorte d’image, de vitrine, ça renvoie à l’idée d’instantané, et ça permet des jeux sur le rapport extérieur / intérieur, en plus du jeu sur le temps.
(Concernant tes conseils, Time Crimes, je l’avais déjà vu, il est redoutable. Triangle recourt davantage au film de fantôme ou de malédiction, mais y a des images choc. Y a que Primer qui ne m’a pas séduit, mais je crois qu’il va falloir redonner une chance à ça : mais ça m’a paru un peu trop froid et cérébral, j’ai eu l’impression de voir du Hickman en images qui bougent).
En tout cas, merci pour tous ces conseils.
Jim