Et bien je parlais sur le topic de starwars de l’énigme au cœur du mythe, voilà un film hautement énigmatique. Et c’est toujours un plaisir lorsque l’énigme est si présente qu’elle bat en brèche le sens.
L’énigme provoque une rupture du sens et d’un coup on est attentif à tout, l’expérience sensorielle est portée à son sommet, et les pensées rebondissent sur chaque élément offert sans s’y accrocher et sans attente, personnellement je trouve cela très détendant.
Comme beaucoup de bonne narration, la force du film se trouve dans l’écho entre le ressenti du lecteur/spectateur et celui du personnage que l’on suit.
Plutôt que de parler de découverte du corps, je dirais que le film met en scène la construction d’un corps avant d’échouer sur ce qu’implique que ce corps soit un corps de femme.
C’est qu’un corps, on l’a pas à la base, les autistes en témoignent, c’est quelque chose qui se construit en même temps qu’on habite le langage. De l’itération à la répétition puis au langage, le corps trouve à se produire en rapport à une sexualité énigmatique.
La répétition trouve là pleinement à se justifier, le nourrisson n’aborde t il pas le langage d’abord par la répétition, notamment de ses cries qui ne deviennent demandes qu’en fonction des réponses qui leur sont apportés. Puis le sens se construit sur la variation dans la répétition, tout comme se construit un code.
Ainsi l’alien par la répétition accède à quelque chose. Le corps au départ simple parure (habit et maquillage), sac sans organe comme le dit deleuze, et quelle représentation de ce dernier, ce sac à organe va donc peu à peu être habité.
Le tournant premier, je dirais que c’est l’enfant sur la plage, quelle image glaçante du desaid freudien. Quelque chose s’inscrit pour l’alien dans cet abandon total face à l’absence de réponse. Dés lors, la parole mécanique s’inverse et c’est les autres qui viennent parler à l’alien, une certaine émotion la travaille également, le cri d’un enfant dans une voiture à coté l’interpelle, un refoulement s’instaure, elle ne veut pas y penser.
A partir de là la répétition va déboucher sur autre chose : un corps énigmatique pour elle, il n’est plus simple enveloppe, il est elle, il est énigmatiquement elle, et c’est ce qui la fascine dans ce miroir. Si d’abord, le désir sexuel prenait la forme d’une course vers l’objet inatteignable, course qui se soldait par l’anéantissement dans l’immersion dans un grand tout, une fois le corps énigmatiquement soi, le désir débouche sur une rencontre possible.
Rencontre de l’objet, du gout, des sens, et bien sur amoureuse. Mais l’alien n’a pas n’importe quel corps. Il a un corps de femme et c’est un corps qui a un destin particulier dans la rencontre avec le désir de l’autre et la jouissance. C’est un corps qui se pénètre, un corps troué, voir un corps qui s’anéantit au contact de sa propre jouissance. Viol ou pas viol, le destin du corps d’une femme au contact du désir sexuel mobilise quelque chose de sa propre disparition. L’alien n’y survivra pas. La sexuation féminine est chose trop violente pour cet autre là.
L’alien, autre par nature, ne pouvait pas ne pas opter pour le corps du sexe autre, qu’il ai opté pour un corps masculin et peut être que le film aurait pu se poursuivre et l’alien nous dire son nom, il n’en aura pas l’occasion comme pour œdipe dont les yeux chutent à terre et le scrutent, la rencontre sexuelle s’avère impossible et le visage féminin tombe et scrute l’alien qui se consume seul. Et dire que c’est là ce qui vit une femme dès qu’elle parle et désire.
Les hommes et les aliens sont vraiment des petites choses, qui dans cet impossible rencontrent leur fin, là où les femmes y survivent et y trouvent leur commencement.