REALISATEUR & SCENARISTE
Jesus « Jess » Franco (sous le pseudonyme Franco Manera)
DISTRIBUTION
Soledad Miranda, Ewa Stromberg, Dennis Price, Paul Muller…
INFOS
Long métrage allemand/espagnol
Genre : horreur/érotique
Titre original : Vampyros Lesbos
Année de production : 1971
« Même dans les films les plus merdiques de Jess Franco, il y a au moins une scène sublime ! », a dit un jour le comédien Howard Vernon, vieux routier de la série Z, éternel abonné aux rôles de méchants et l’un des acteurs fétiches du maître espagnol de l’Euro Horror. Le bonhomme n’avait certainement pas vu tous les films de Franco (je doute de la santé mentale de celui qui tenterait un jour cette expérience), mais en ce qui concerne Vampiros Lesbos, le qualificatif « sublime » revient à la magnifique Soledad Miranda, qui incarne l’Impératrice de la Nuit (et pas que puisqu’elle peut se promener en plein jour…idéal pour se prélasser à poil sur la plage), la comtesse Nadine Karody.
Actrice et chanteuse pop, l’espagnole Soledad Miranda fut la muse de Jess Franco qui la fit tourner dans sept films en 1969 et 1970 pour lesquels elle prit le pseudonyme de Susan Korday, compte tenu de la nature érotique de ces longs métrages. En 1970, elle a eu l’opportunité de signer un important contrat, mais un tragique accident de voiture en décida autrement. Soledad Miranda est morte prématurément à l’âge de 27 ans et les films qu’elle tourna sous la direction de Jess Franco sortirent à titre posthume, des Nuits de Dracula en 1970 à Eugénie (d’après le Marquis de Sade) en 1973.
Un an après avoir signé une adaptation du Dracula de Bram Stoker avec le médiocre Les Nuits de Dracula, Jess Franco en livrait une déclinaison saphique avec Vampiros Lesbos, dont chaque acteur de l’histoire peut être vu comme une déclinaison d’un personnage du classique de Stoker (il y a une Lucy, un Harker, un Renfield, un Seward…).
Le scénario (décousu) suit les pas de Linda, la représentante d’un cabinet juridique qui se rend à Istanbul pour régler l’héritage d’une comtesse italienne. Ses rêves sont hantés par une mystérieuse et séduisante femme brune qui ne cesse de l’appeler. Quand Linda rencontre la comtesse, elle réalise qu’elle est la même femme qui lui apparaît dans ses nuits troublées. La belle Linda est séduite par la troublante comtesse, qui a soif de son corps et de son sang…et aussi de son âme…
D’une beauté envoûtante, la comtesse Karody, puissante et manipulatrice, au regard hanté et triste, est l’exact opposé de la blonde Linda (la suédoise Ewa Stromberg, une autre comédienne vue dans les Franco des années 60/70), frustrée par sa vie de couple, intriguée et tentée par la vampire avec qui elle s’engage dans un jeu de volonté et de séduction mortelle. Face à ces deux femmes, dont la puissance érotique électrise l’écran (il faut dire que Franco ne se gêne pas pour les filmer sous toutes les coutures), les hommes ne sont que de simples pions.
Le rythme très particulier, la musique (même si elle est terriblement datée), les visuels psychédéliques et l’atmosphère onirique sont, dans les meilleurs passages, presque hypnotiques.
Mais nous sommes dans un film de Jess Franco et comme souvent, la réalisation est aussi bizarre que les univers qu’il filme : les plans sont hasardeux, les cadrages sont foireux, la photo est parfois floue, le montage est elliptique…
Malgré les nombreux défauts de la mise en scène, certaines scènes sont étrangement belles (comme le numéro de strip-tease de la comtesse). Franco larde également son métrage d’inserts hallucinatoires, via les images symboliques (autant que maladroites) du scorpion, du papillon et de l’oiseau.
L’interprétation est le plus souvent lamentable (le vénérable Dennis Price, qui joua avec Sir Alec Guinness dans Noblesse Oblige et qui incarne ici le Dr Seward, n’est là que pour payer ses factures à un moment où sa carrière était au plus bas…et Jess Franco, qui s’est comme à son habitude donné un petit rôle, est un comédien exécrable), mais les acteurs secondaires sont de toute façon éclipsés par Soledad Miranda et Ewa Stromberg, les beautés sensuelles de cette rêverie lesbienne, cauchemardesque et confuse.