Hé bien voilà un album fort sympathique.
J’apprécie beaucoup l’écriture « frontale », qui se veut linéaire, efficace, allant droit au but, sans fioriture ni détours. Le récit se déroule de manière rapide, et la narration n’utilise aucune voix off, si ce n’est des propos rapportés. Pas de plongée dans les pensées des personnages, seules leurs actions comptent. Excellent choix.
Le dessin de Miville-Deschènes, très classique, est ici merveilleusement utilisé, notamment par la restitution de décors saisissants. Ses personnages sont plus raides, mais certains gros plans sont vraiment évocateurs et pleins d’expression. Les cadrages sont en général efficaces et, à part une planche un peu maladroite proposant des cases emboîtées à la manière de blocs de Tetris, le reste est vraiment très limpide.
Deux petits bémols à cet album qui sait emporter son lecteur :
- d’une part les dialogues laissent entendre que le Comte a « tout perdu », mais il est surtout présenté comme un aristocrate dépressif et sans but (en robe de chambre et le regard vide).
- d’autre part, afin de faire la liaison avec la nouvelle d’origine signée Richard Connell (et aussi avec le film), le récit résume la seule « défaite » du chasseur en braquant le projecteur sur Rainsford, qui lui a échappé. Mais ça ne sert que de transition vers le récit de l’album, là où l’on aurait pu s’attendre à voir une troisième partie s’immiscer dans ce « jeu le plus dangereux ».
En dépit de ces deux bémols, on a un récit bien rythmé, assez impitoyable, qui ne ménage pas ses héros, et qui dresse un portrait ambivalent du personnage éponyme, chasseur devenu proie, dont même les proches finissent par observer la folie, avec crainte.
Dans l’ensemble, plutôt pas mal du tout.
Jim