Autre petite pépite, à conseiller aux lecteurs francophones qui ne sont pas à l’aise avec le texte d’origine : Batman Poche #49 contient un récit, « Haven », écrit par Len Wein et là aussi illustré par Don Newton.
À la poursuite de bandits à la solde de Maxie Zeus, Batman négocie mal un tournant, dans une route montagneuse et enneigée, et se retrouve inconscient dans la nature hostile. Heureusement, il est recueilli par une silhouette massive qui s’occupe de lui.
Le choix bizarre de Sagédition, consistant à alterner des pages en couleurs et des pages en noir & blanc, sans que l’on soit réellement convaincu du caractère économique de la chose (rogner sur les encres, est-ce que ça aide à gonfler la marge à ce point ?), permet de savourer le dessin de Don Newton, qui fait des merveilles justement à représenter la blancheur des paysages. Et les cases ne perdent nullement en clarté et en lisibilité.
Non content de restituer les décors forestiers, Newton livre également une planche où Alfred et Dick, dans la garçonnière de Bruce Wayne, s’inquiètent de la disparition de ce dernier. Il démontre qu’il est parfaitement capable de dessiner des gens en costumes normaux, pas en collants.
Porté disparu (comme dans l’épisode chroniqué plus haut), Batman est donc soigné dans une cabane au fond du jard… pardon, au fois des bois. En quelque sorte, « une cabane en rondins où viendraient boire les daims ». Car, en se réveillant, Batman se retrouve face à un géant barbu qui se fait appeler Haven et qui vit loin de l’agitation humaine. Sorte d’homme blessé, sans doute parfaitement conscient de sa propre capacité à la colère et à la violence, il s’est volontairement exilé, trouvant la paix au milieu de la nature et parmi les animaux.
Reprenant des forces, Batman apprend à apprécier la compagnie de son étrange sauveteur. Cependant, il n’écoute pas les conseils de l’homme des bois, parfois rude mais qui sait rester courtois, et reprend la traque de l’assassin qu’il recherche, en dépit des conditions météo qui grondent, là dehors.
Fatalement, Haven décide de s’occuper de ce farfelu de la ville. Il retrouve Batman aux prises avec un ours, le froid et la fièvre, et le ramène à sa « chaumière ». C’est à ce moment que les deux hommes se rendent compte que Maxie Zeus et ses porte-flingues ont découvert la cachette.
Malgré les provocations et les brimades, Haven décide de ne pas s’énerver, et de n’opposer à l’agressivité des bandits qu’une proposition de paix et d’hospitalité.
Jusqu’à ce que l’un des mafieux ait un geste fatal. Un geste de trop.
Le reclus sort alors de ses gonds. Hélas, il ne fait pas le poids face à la fureur des pistolets de ses adversaires.
Sa réaction permet cependant à Batman de venir à bout des envahisseurs. L’histoire, en quinze pages là aussi (purée, ils en racontaient des choses, en si peu de planches, à l’époque), se conclut sur le décès de Haven, qui a enfin trouvé la paix au milieu de la vie sauvage qu’il affectionnait tant.
Cette escapade de Batman dans les contrées boisées me semble aussi un écho à un épisode précédent, réalisé par Archie Goodwin et Sal Amendola dans Detective Comics #440, dans lequel, à la suite d’une prise d’otage qui tourne mal, Batman doit faire face à un ours rendu dangereux par les brûlures dues à un incendie de forêt, et à un shérif bas du front. Deux fables écolos à quelques années de distance qui semblent se répondre.
Jim