Quand les Fantastiques et les Vengeurs ne sont plus là, qui c’est qu’on appelle ?
Dans Fantastic Four#242 à 244, John Byrne avait orchestré sa Trilogie Galactus. Le Dévoreur de Planètes affaibli n’avait plus d’autres solutions que de se nourrir de l’énergie de la Terre. L’arc narratif a donc été le théâtre d’un affrontement épique entre Galactus et les défenseurs de l’humanité : les F.F., les Avengers et le Docteur Strange. Deux héros représentatifs de la ville de New York ne pouvaient qu’être spectateurs d’un tel déferlement de forces…Spider-Man et Daredevil, conscients que leurs pouvoirs n’étaient pas utiles face à Galactus.
Une dizaine d’années plus tard, les Fantastiques et les Avengers ont disparu suite au combat contre Onslaught. L’Homme sans Peur et le Tisseur de Toile sont toujours là et il n’y a plus qu’eux pour se dresser face à un Silver Surfer déchaîné. Mais en fait, ce n’est pas vraiment le Surfer…cette version de la Sentinelle des Etoiles est une construction créée à partir de l’argile spéciale du Maître des Maléfices à la demande de Norrin Radd afin d’avoir un double investi d’une part du pouvoir cosmique qui lui permettrait d’accéder à ses souvenirs refoulés (je résume grossièrement). Et bien entendu, ce genre d’expérience n’est pas sans fâcheuses conséquences…
J’aime bien la scène montrant Daredevil et Spidey interagir avant de se lancer dans la bataille. Ils reconnaissent qu’ils ne sont pas de taille face au Surfer (à ce moment-là, ils ne savent pas que ce n’est pas le vrai Norrin Radd) mais il n’y a qu’eux pour empêcher que ce faux Surfer fasse plus de dégâts et pour ces héros, c’est tout ce qui compte. S’ils ont surtout un rôle secondaire dans cette histoire, J.M. de Matteis écrit (très) bien ces deux personnages dont il a déjà animé les aventures, l’action est solide et palpitante et la partie graphique partagée entre Rick Leonardi pour le prologue et Ron Garney pour le reste de l’épisode est pleine de qualités. Bref, un chapitre réussi d’un run qui m’avait beaucoup plu à l’époque…
Le #438 de Amazing Spider-Man débute en pleine action alors que l’Homme Araignée échappe aux crocs d’un dinosaure. Et pourtant le héros n’est pas en Terre Sauvage, mais bien en plein New York. Aussi soudainement qu’elles étaient apparues, les créatures de la préhistoire disparaissent et Spidey se retrouve suspendu au plafond d’une banque, au-dessus de new-yorkais paniqués. Le héros a juste eu le temps d’apercevoir une personne qui se conduisait étrangement avant qu’elle s’échappe. Au même moment, Daredevil regagne les bureaux de Sharpe, Nelson & Murdock et apprend que leur nouveau client est le patron d’une société de jeux vidéos qui veut s’assurer que les innovations de ses employés appartiennent bien légalement à sa boîte, ce qui fait tiquer Matt qui veut s’assurer que les créateurs gardent leurs droits.
Etant donné la situation (qui fait aussi penser au work-for-hire des créateurs de comics), la réunion dans les bureaux de Gilsoft Games est compliquée. Matt Murdock remarque le comportement d’une jeune femme (la même vue quelques pages plus tôt) et s’esquive pour la suivre. Les bulles de pensées nous apprennent qu’elle a inventé un projecteur de réalité virtuelle qu’elle n’a aucune intention de laisser à son patron. Lorsqu’elle aperçoit que DD la suit, elle panique et se sert de sa création pour projeter de nouvelles illusions qui attirent l’attention de Spider-Man…
Cet épisode resté inédit en France (on était sur la fin du run de Tom De Falco et les derniers numéros du volume 1 de Amazing Spider-Man avant la relance par Howard Mackie et John Byrne) est basé sur une idée intéressante mais pas suffisamment bien développée (ca se résume à la geek déconnectée de la réalité face au méchant capitaliste) afin de redonner rapidement la priorité à l’action. Et après un deuxième acte un peu bavard, le chaos provoqué est l’occasion d’une bonne dynamique entre deux héros qui se connaissent bien, avec un Spider-Man qui doit apprendre à ne pas se fier à ce qu’il voit et un DD qui est le seul à ne pas être affecté par la réalité virtuelle.
L’aventure est donc plutôt divertissante (avec un même un petit clin d’oeil de De Falco aux numéros flashbacks) malgré ses défauts…et aussi très anecdotique, ce qui explique certainement pourquoi Panini l’a laissée de côté à l’époque. Le gros point faible vient surtout de la partie graphique, avec un encrage de Gary Martin pas du tout adapté aux dessins de Scott Kolins.
Daredevil est l’invité du troisième numéro Giant-Size des Defenders et cette fois, il s’éloigne de son environnement urbain pour être projeté dans une aventure cosmique. Nighthawk apprend à l’Homme sans Peur que son équipe, les Defenders (DD s’interroge en entendant ce nom…les Défenseurs étaient encore une association de super-héros très discrète à l’époque), a été enlevée par le Grand Maître, une entité obsédée par le jeu. Comme ils ne sont que cinq et qu’il y avait besoin d’un joueur supplémentaire, Nighthawk a recommandé Daredevil, ce qui a été accepté par le Grand Maître.
Le Doyen de l’Univers est engagé dans un jeu d’échecs cosmique avec le Prime-Mover, personnage sorti de l’imagination de Jim Steranko et qui se révèle être un robot créé par Fatalis. Pour prouver sa supériorité, le Prime-Mover a parié la Terre et oppose ses joueurs (Korvac et des mercenaires extra-terrestres) face à ceux du Grand Maître (les Défenseurs et Daredevil) sur trois planètes différentes. La construction de ce long numéro est donc très classique : après une phase d’explications (avec deux textes en prose), les six héros sont séparés, l’occasion d’orchestrer trois combats pas avares en action…mais le déroulement est beaucoup trop prévisible, notamment à cause de cette structure narrative un peu trop utilisée…
Dans le dernier acte, le Grand Maître tente d’entourlouper les Défenseurs en arrangeant les règles comme bon lui semble…et le sort de la Terre se joue finalement sur une astuce de Daredevil (et de façon tout de même un brin expéditive puisqu’il ne reste plus qu’une page). Dans l’ensemble, l’épisode se laisse lire malgré ses longueurs, mais ce n’est pas vraiment ce que son équipe créative a fait de mieux. L’histoire a été concoctée par Steve Gerber, Jim Starlin et Len Wein, le scénario a été écrit par Gerber, Starlin s’est chargé des esquisses et les finitions ont été confiées à Dan Adkins, Don Newton et Jim Mooney. Du beau monde donc, pour une aventure qui a ses bons moments mais que je n’ai pas trouvée particulièrement mémorable…
Et c’est bien pour ça que je ne pouvais faire qu’un seul sujet cette année…^^
Pour les 5 derniers mois, je vais faire le vol.2 de Smith/Quesada à Bendis et les Waid/Samnee (et certainement un ou deux trucs de plus comme Daredevil Father et la première apparition de DD dans l’univers Ultimate).
Je n’ai jamais lu les Brubaker et les Diggle (à part la mini-série Shadowland qui était mauvaise) et après Waid, j’ai arrêté de lire du Daredevil…
En 1998, Marvel a lancé une nouvelle initiative éditoriale intitulée Marvel Knights qui avait pour but de remettre en avant des personnages dits « de second plan » (Les Inhumains, La Panthère Noire…) et d’autres alors considérés en bout de souffle comme Daredevil et le Punisher. Cette gamme a été confiée au duo Joe Quesada et Jimmy Palmiotti, qui avaient fondé quatre ans plus tôt leur maison d’édition Event Comics au sein de laquelle ils ont créé Ash (le pompier super-héros) et Painkiller Jane. Event Comics n’a d’ailleurs pas survécu longtemps au succès de Quesada et Palmiotti chez Marvel puisque les compères ont fermé leur boîte en 1999.
Superviseurs du label, Joe Quesada et Jimmy Palmiotti se sont réservés la partie graphique du titre principal, Daredevil, et pour le scénario ils ont fait appel à l’une de leurs connaissance, le cinéaste Kevin Smith, grand fan de comics qu’ils avaient rencontré à l’occasion des longs métrages Mallrats et Chasing Amy. Les relances Marvel Knights ne sont pas des reboots à la Heroes Reborn, les auteurs ont tenu à s’inscrire dans la continuité et les premiers épisodes évoquent bien les prestations de Karl Kesel et Joe Kelly. Parce qu’elle n’a pas supporté que sa vie privée et les détails sordides de son passé ont été étalés dans les journaux suite à son procès, Karen Page a quitté Matt Murdock qui tente vainement d’oublier ce départ en se consacrant à ses activités d’avocat et de super-héros.
Matt reçoit un jour dans son bureau la visite d’une jeune femme tenant un bébé dans ses bras. Elle lui révèle qu’elle sait qu’il est Daredevil et elle part en lui laissant son enfant qu’elle présente comme le Rédempteur, sauveur annoncé par la Bible. Le trouble de Murdock s’accentue lorsqu’il est abordé dans l’épisode suivant par un certain Nicholas Macabes (qui a des faux airs du commissaire Dolan du Spirit), leader d’une organisation appelée Sheol dédiée à la protection de la race humaine. Macabes lui annonce que le gamin est en fait l’Antéchrist et que s’il le garde, le mal s’acharnera sur Matt et tous ses proches…
L’aspect théologique est donc au coeur d’une intrigue qui va pousser le héros dans ses retranchements. Les drames s’enchaînent…Karen revient et lui apprend qu’elle est malade du sida, Foggy est accusé de meurtre et Matt perd alors le contrôle. L’atmosphère de ce suspense paranoïaque est sombre, la partie graphique est excellente, aussi bien dans l’action que dans les moments plus dramatiques, et Kevin Smith fait bien monter les enjeux jusqu’au retour d’un vieil ennemi de DD à mi-parcours.
Le cinquième chapitre est d’une grande intensité et se termine tragiquement, une scène marquante qui n’a rien perdu de son impact. La surprise vient à la fin du #6 avec la révélation du grand méchant dont les motivations apportent un autre regard sur ce qui s’est passé depuis le début de cet arc narratif en huit numéros…un vilain classique que Daredevil détruit en quelques mots dans un moment très fort. Il y a ensuite de la tristesse dans la dernière partie…et aussi de beaux moments, de belles interactions très bien écrites. Ce n’est pas la première fois que Matt touche le fond et il se relève à chaque fois…et après la douleur de la perte, les dernières pages apportent un peu d’espoir, le signe d’un nouveau départ…
On peut dire ce qu!on veut sur les références, sur les qualités scénaristiques et graphiques,.mais quelle relance quand même. Moi ça m’avait quand même bien scotché, peut être parce que c’était une sorte de retour à mes 1eres lectures sur le perso, mais dans un mode contemporain de l’époque.
Les illustrations pleine page de Daredevil 1/2, le numéro spécial en prose qui complète (de façon un peu superflue tout de même) l’un des éléments du scénario (la discussion entre le Caïd et Mysterio) :