ALL-NEW, ALL-DIFFERENT AVENGERS #1-15 (Waid / Asrar, Kubert)

Tirs croisés. :slight_smile:
Et on ne s’est pas consultés avant. :slight_smile:

les comics ont inventé le « à suivre » mais celui la évolue avec le temps.

aujourd’hui le « à suivre » touche les mondes fictifs en eux même.

Je le redis, on avait un monde dans lequel existaient des « à suivre », aujourd’hui ce monde est devenu l’histoire « à suivre » elle même.

C’est la grande différence que personnellement je perçois.

De tous les titres que vous citez comme ayant vos préférences, il semble bien que ce qui leur est commun est d’être en marge de ce « à suivre » global.

Je n’y suis pas allergique pour ma part. Mais ce mode de production n’a pas de que des qualités et il semble qu’il demande beaucoup aux scénaristes qui ont à prendre en charge le « à suivre » global.

Comme dit Sylvain, on a un regard « professionnel », au sens où l’on raconte aussi des histoires (lui plus que moi, en ce moment, mais là n’est pas la question…). Et on lit avec cette grille de lecture depuis longtemps.
Et si la lecture des BD depuis, disons, plus de trente ans, enseigne quelque chose, c’est que les outils demeurent en gros les mêmes, mais que le choix de certains au détriment d’autres varie. Au début des années 1980, Frank Miller (pas que lui, mais c’est le plus visible) impose la voix off comme solution de remplacement à la bulle de pensée. Il a poussé dans des directions passionnantes, avec un vrai style, une écriture littéraire forte. Il a été largement suivie, et en général, les meilleurs s’en sortaient bien (genre, Gaiman…). Mais c’est super casse-gueule parce que très rapidement, on finit par faire débiter des poncifs aux « pensées » du personnage.
Warren Ellis, lui, a choisi d’épurer sa caisse à outil, et de se débarrasser de la voix off, des onomatopées, tout ça. Il a montré qu’on peut faire autrement.
Et dans la dernière décennie, on voit qu’il y a deux approches dominantes. Les gens qui se contentent des dialogues (voire, qui réintroduisent les bulles de pensée : ça marche pas chez Bendis, ça marche mieux chez Claremont), et les gens qui scotchent à la voix off. Mais cette dernière est une facilité, un procédé mécanique. Comme les sauts temporels et le surdécoupage chez Robinson, par exemple (même si ce dernier est intéressé par ses personnages, au contraire).
La froideur dont parle Sylvain, c’est aussi l’obsession de l’histoire à raconter, le grand plan, le projet du scénariste. Aujourd’hui, les scénaristes se lancent dans une série en prévision d’un an, deux ans, cinq ans de récits. Les éditeurs communiquent à fond dessus, parfois en rétropédalant un peu, mais c’est un argument bien installé. Et ils écrivent en prévision de ça, et comment insérer leur grand plan dans l’agitation éditoriale ambiante. Et ils en oublient un peu de faire vivre les personnages.
En même temps, ceux-ci vivent des aventures pleine de bastons et n’ont plus de vie privée, n’ont plus de proches normaux sans pouvoirs, donc en même temps, il est difficile de s’intéresser aux personnages en tant que tels, puisqu’ils ne sont plus que des marionnettes dans des bagarres qui n’en finissent pas.

Jim

le « à suivre » a des effets :

explosion des personnages principaux, le drame n’est plus tragique ou épique, il se démultiplie dans des répétitions.

Lorsque le « à suivre » touche le monde lui même, il est normal donc que tous les personnages deviennent des super héros,le super héros devenant lui même lambda. Il n’y a plus de personnage principal, et chacun devient une variable, un x qui n’a d’existence que de sa fonction.

J’imagine que cette mutation du « à suivre » sur les personnage peut désintéresser ceux qui étaient plus intéressés par les personnages, tout comme ceux qui aimaient leur personnage traités en roman dans une histoire finie ne devaient trouver aucun intérêt aux personnages des premiers « à suivre ».

Nemo le « a suivre » doit il être vraiment partout dès qu’on aborde des outils de lecture ? Je trouve que tu le met à toute les sauces, parfois je trouve que tu te perds avec cette obsession, mais je peux me tromper.

Bref : a suivre.

Sur Ellis et la voix off, c’est même plus subtil que ça :

Dans Transmetropolitan, il triche avec : quand il y a de la voix off, ce sont bien les pensées de Spider, mais telles qu’elle sont formulées par la suite, dans ses articles. Le décalage est subtil, mais terriblement efficace.

Dans Crecy, la voix off EST le récit fait par un homme du quatorzième siècle à son lecteur du vingt-et-unième, et conçue comme telle.

il l’utilise beaucoup moins que d’autre, mais surtout, quand il s’en sert, il triche avec.

Hum. C’est la deuxième fois que j’entends ça. Pas sûr que ça donne plus de poids à vos points de vue cela dit.

Ça fait très prétentieux, par contre. :mrgreen:

Quand nous/vous avons/avez débuté dans les années 80, vous n’aviez pas les outils nécessaires pour décrypter les comics. Tout était frais, nouveau, alors qu’aujourd’hui un problème vous saute aux yeux, souvent en comparaison avec la période sacrée, témoin des changements de narration/de technique graphique/de medium.
Les années 80, c’est la période nostalgique de nombreux lecteurs, tout y était forcément « parfait ». Cependant, le lecteur des années 60 disait déjà que les comics des années 80 étaient froid, dur, sombre, hermétique. C’est le discours d’Alan Moore. Le lecteur de 2050 fera pareil.
Aujourd’hui, le milieu pense en grand plan, il planifie. Dans 30 ans, ce sera un autre problème que le jeune lecteur, celui d’aujourd’hui, viendra pointer du doigt car « c’était mieux avant », parce qu’ils savaient où ils allaient, etc.

C’est surtout une compétition entre les générations: « c’était mieux avant ». On a tendance à regarder condescendant en s’imaginant, nostalgique et convaincu, que la période que l’on lisait comme un simple divertissement était forcément la meilleure. C’était « notre période ». C’est un moyen de garder la main-mise quand on se sent en décalage avec l’actualité.
Alors que le jeune lecteur pense forcément que les comics à papa sont datés, vieillots.

[size=85]Peut être aussi que le comic est devenu un art masturbatoire, trop analysé pour n’être qu’un simple divertissement comme il le devrait.[/size]

[quote=« KabFC »]Nemo le « a suivre » doit il être vraiment partout dès qu’on aborde des outils de lecture ? Je trouve que tu le met à toute les sauces, parfois je trouve que tu te perds avec cette obsession, mais je peux me tromper.

Bref : a suivre.[/quote]

C’est que le « à suivre » est ce qui détermine les outils d’écritures, il est aussi la cause de notre désir de lecture.

A force de l’avoir abordé par temps de bout différent, j’ai désormais une vision assez précise de ce qu’il est, il faudrait surtout maintenant que je synthétise tout cela, puisque du fait même de l’aborder ainsi de multiple façon, j’en perds plus d’un. J’ai un peu la flemme de le faire, mais c’est prévu.

Là je pointais deux choses : d’abord un échange de place dans la fiction entre ce qui était un espace, un lieu et qui devient une temporalité et en second l’effet du « à suivre » sur les personnages du récit.

le monde partagé était un lieu dans lequel ce déroulait la fiction, aujourd’hui il devient une temporalité (une fiction).

Qu’un espace se transforme en temporalité, ou inversement, on a déjà connu ça.

Deux exemples parmi d’autre :

  1. Dans les plus anciens mythes qui sont remontés jusqu’à nous, le temps de la création était présenté comme un temps originel, coupé radicalement du temps présent qui était lui un temps cyclique.

Le monothéisme juif, est aussi une mono histoire. L’ancien testament fait parti des premières histoires à inventer un récit continu. Le temps de la création est intégré à la continuité du récit et il devient alors un lieu : le jardin d’éden.

2)Au 19ème siècle s’invente l’histoire, la narration historique, telle que nous la connaissons aujourd’hui dans nos manuels. Sa forme première est de transformer un espace : le pays, la souveraineté du roi, en temporalité (fiction) sous la forme de l’histoire de France. Tous les outils narratifs développés dans le cadre des fictions avec temporalité unique et fin (la tragique, l’épique, le nécessaire etc) sont injectés dans le récit historique.

Y a quelque chose de ce mouvement en ce moment dans les récits de super héros.

Le second point de mon propos était que le « à suivre » a toujours un effet de mise en fonction, au sens mathématique du terme et de pluralisation des personnages.

Le personnage principal est inséparable du récit fini. Il est principal en tant que c’est lui le lieu du tourment qui trouve à se résoudre dans une fin.

Regardons les séries américaine : tant qu’elles gardaient une structure répétitive cyclique, où chaque épisode était plus ou moins le décalque dans la forme du précédent, on avait encore des personnages principaux (magnum, mc gyver etc). Maintenant que les séries deviennent vraiment structurées par un « à suivre » feuilletonnant, on a plus vraiment de personnages principaux. The wire, game of thrones, nous offre des récits de monde. Les personnages pullulent.

Ce même phénomène c’était produit dans les comics notamment chez marvel avec les comics d’équipe de super héros. Claremont avait tenté d’explorer ces effets narratifs jusqu’à dissoudre l’équipe des x men, et le comics était alors devenu un récit sur le monde des mutants.

Aujourd’hui que le monde devient lui même fiction chez marvel et dc, je note que cet effet particulier du « à suivre » se fait sentir en pluralisant une nouvelle fois les personnages : ce qui se passait à l’intérieur des séries arrivent aux séries elles mêmes. Il n’y a à plus de série principale sinon l’event perpétuel. Le fait que des noms emblématiques de séries puissent être donnés à d’autre est un bonne exemple de la pluralisation et de la mise en fonction des personnages.

Dans the wire, un perso mourrait un autre prenait sa place ( c’était explicite à la fin de la série) et bien là c’est la même chose : les séries s’arrêtent une autre prend sa place et son nom. Le nom qui nommait un personnage, une série, nomme désormais une fonction. Mais cela a toujours était un peu la cas dans le récit de super héros.

Le fait que les « noms » soient traitées aujourd’hui comme des fonctions ont en a eu une exemple dans la marche « je suis charlie ».

hier en lisant les interventions sur ce phénomène actuel qui consiste à transformer les perso secondaires en super héros, me revenait ces images de super héros en smoking mais portant toujours leur masque, comme lors des mariages de super héros.

Me revenait également toutes ces images des vengeurs en costume dans leur manoir pris dans des scènes de la vie quotidienne, prenant le thé, jouant aux cartes.

On traitait à l’époque les super héros comme des personnages normaux, aujourd’hui c’est les personnages normaux qui deviennent des super héros.

Ouais, mais alors ça, je m’en branle totalement.
Je vais pas m’excuser parce que j’ai un boulot qui me permet de voir les coulisses cachées pour la plupart des lecteurs.
Je vais pas non plus m’excuser d’avoir une expérience de lecteur de presque trente-cinq ans.

Jim

Parce que le lecteur lambda est un neuneu qui ne les voit pas ?

[quote=« n.nemo »]
Me revenait également toutes ces images des vengeurs en costume dans leur manoir pris dans des scènes de la vie quotidienne, prenant le thé, jouant aux cartes.[/quote]

C’était assez spécifique aux Vengeurs, ça d’ailleurs de rester en costume (ça avait même été un reproche dans un Courrier des Lecteurs). Parce que les X-Men, et même les premiers, n’hésitaient pas à se mettre en civil quand ils ne combattaient pas les méchants.
Les 4FF avaient tendance également à rester dans leur costume bleu, sauf lorsqu’ils sortaient en ville.

Je rebondis sur cet aspect des « à suivre » dont parle Nemo. Je trouve que chez certains scénaristes (Hickman en tête de proue) le « vrai » à suivre n’est pas d’un épisode à l’autre mais d’un arc à l’autre. Et j’ai l’impression que c’est ce qui gêne nos vieux de la veille (huhu).

Outre le fait que le personnage n’est qu’un élément parmi d’autres, chez ces scénaristes, leur run vit avant tout grâce à leur macro-récit. Que ça soit Hickman ou Remender, ils ont l’air de penser avant tout à comment gérer les évènements pour rendre leur run palpitant avant de penser aux personnages. J’ai plutôt l’impression que dans leur cas, les persos ne sont que des pièces d’echec qui permettent d’animer un run pour partir d’un point A à B avec des objectifs bien précis.

Franchement, ça ne me dérange en rien au contraire même, je pars du principe que quand les personnages ont des séries centrées sur eux (Iron Man, Cap, Thor, etc.), j’ai pas trop envie de voir leur développement dans une série de groupe. Avec un tel rassemblement, j’ai envie de voir un récit épique style « over the top » car zut, c’est du divertissement avant tout !

Et Hickman, Remender, Aaron, (surement Slott, mais vu que je ne le lis pas complètement), etc. Prennent leur temps mais ne cessent de faire monter la mayonnaise pour arriver à ce point culminant d"over the top". Perso, je me régale, je suis client de ce genre de récit plutôt qu’un pauvre arc bidon de Warren Ellis sans ambition sur avengers assemble. Maois bon ça n’entraine que moi…

Tout ça pour dire, que c’est dommage d’abandonner rapidement la lecture de tels runs alors que ce n’était que les introductions. Mais ça se comprend.

il est très agréable cet arc de assemble. On y voit comment l’équipe fonctionne de l’intérieur. Pas les personnages mais l’équipe. La transmission entre les générations ne repose pas sur des valeurs mais sur le professionnalisme, sur un savoir faire, avec en contre point l’idée d’une transmission génétique, immédiate qui ne passe par aucun savoir ni apprentissage.

J’ai beaucoup aimé.

[quote=« Jack! »]

Parce que le lecteur lambda est un neuneu qui ne les voit pas ?[/quote]

Parce que si je n’explique pas, y aura toujours des gens pour me chercher des poux dans la tête parce que je donne des leçons, que j’aime rien, toutes ces conneries. Et si j’explique, y a toujours des gens pour me chercher des poux dans la tête parce que c’est prétentieux.

Jim

[quote=« Vik »]

[quote=« n.nemo »]
Me revenait également toutes ces images des vengeurs en costume dans leur manoir pris dans des scènes de la vie quotidienne, prenant le thé, jouant aux cartes.[/quote]

C’était assez spécifique aux Vengeurs, ça d’ailleurs de rester en costume (ça avait même été un reproche dans un Courrier des Lecteurs). Parce que les X-Men, et même les premiers, n’hésitaient pas à se mettre en civil quand ils ne combattaient pas les méchants.
Les 4FF avaient tendance également à rester dans leur costume bleu, sauf lorsqu’ils sortaient en ville.[/quote]

C’est le reproche (enfin, l’un des reproches) que je faisais à la JSA de Johns. Ils sont tout le temps en costumes de super-héros. Même quand ils font une opération à cœur ouvert. Genre sept ans après que les Vengeurs de Harras et Epting ont tous adopté le blouson.

Jim

[quote=« Blackiruah »]
Tout ça pour dire, que c’est dommage d’abandonner rapidement la lecture de tels runs alors que ce n’était que les introductions. Mais ça se comprend.[/quote]

Les Vengeurs de Hickman, j’ai tenu genre dix-neuf ou vingt numéros de chaque série. Je n’ai pas l’impression d’avoir « abandonné rapidement la lecture ». Mais selon moi, une introduction qui dure trois ou quatre TPB, c’est du boulot de voleur.

Jim

[quote=« Jim Lainé »]

Parce que le lecteur lambda est un neuneu qui ne les voit pas ?

Parce que si je n’explique pas, y aura toujours des gens pour me chercher des poux dans la tête parce que je donne des leçons, que j’aime rien, toutes ces conneries. Et si j’explique, y a toujours des gens pour me chercher des poux dans la tête parce que c’est prétentieux.

Jim[/quote]

Tu ne m’as vraiment jamais donné cette impression…parce que j’ai quand même l’impression que tu apprécies pas mal de choses et que tes avis sont assez nuancés pour s’en rendre compte (et puis en ce qui concerne les grosses machines, on est du même avis sur Bendis et Hickman :wink: ).
Après entre toi et Grinche…euh, Mr Cordurié, je trouve qu’il y a une certaine différence (tu as un autre exemple que Uncanny Avengers en tête, Sylvain ? :mrgreen: )…

[quote=« Le Doc »]
Tu ne m’as vraiment jamais donné cette impression…parce que j’ai quand même l’impression que tu apprécies pas mal de choses et que tes avis sont assez nuancés pour s’en rendre compte (et puis en ce qui concerne les grosses machines, on est du même avis sur Bendis et Hickman :wink: ).[/quote]

J’essaie d’être nuancé parce que c’est ce que j’attends de la part de quelqu’un qui me parle de ses lectures. Mais en même temps, c’est un effort (enfin, tu le sais, tu t’exprimes aussi…). Et parfois, les forums, c’est bien gentil, mais ça ne renvoie pas l’ascenseur affectif qu’on attend, quoi. Rajoute à ça qu’en ce moment, j’ai pas envie d’être aimable…

Ouais, mais là encore, c’est très trompeur, les forums. J’ai croisé Sylvain en vrai deux ou trois fois, et souvent par téléphone, et c’est quelqu’un de très calme, très pondéré, avec une voix douce et un vocabulaire soigné (genre, s’il dit « zut », c’est qu’il est excédé au possible et qu’il a besoin de deux semaines de vacances).
Moi, c’est le contraire. Je parle fort, je dis des gros mots, je coupe la parole aux gens…
Mais il se trouve que le clavier est un autre outil, et change un peu notre énonciation. L’écran, l’effet différé des échanges, plein de choses. Et sans doute aussi, comme l’avait remarqué Sartre, sommes-nous dans un rôle, et jouons-nous à être Sylvain ou Jean-Marc qui causent sur un forum.
Tout cela est très trompeur.
Et c’est, du coup, assez agaçant, parce que un peu faux. Parce qu’on croit connaître les gens du fait qu’on échange des posts avec eux tous les jours, mais c’est faux. On les connaîtra mieux si on va prendre un verre avec eux, ça permettra de lire entre les lignes des posts, tout ça.
C’est très trompeur, et ça bouffe une énergie folle.
Comme une drogue.

Jim

héhé, c’est bien vrai ça, je me prend souvent à penser « mais personne ne me répond! » « mais on dit rien que je suis qu’imbitable » ^^

je me surprends à être en demande d’amour. C’est mignon