Le chevalier noir, le justicier masqué, le plus grand détective du monde, l’homme chauve-souris… Les surnoms de Batman mettent en exergue quelques unes des différentes facettes de ce personnage sombre, mystérieux et complexe.
Depuis sa création en 1939, par le dessinateur Bob Kane et le scénariste Bill Finger, Batman n’a cessé d’être requalifié jusqu’à multiplier tous les paradoxes identitaires : justicier violent refusant les armes létales, hors-la-loi collaborant avec la police, âme solitaire entourée de nombreux compagnons, super-héros surpuissant dépourvu de pouvoirs…
Rarement un héros de bande dessinée aura avoué une telle plasticité et aura supporté, sans fléchir, les innombrables relectures kaléidoscopiques des multiples artistes chargés de lui faire vivre de nouvelles aventures.
Dick Tomasovic n’a pas de double identité reconnue. Professeur à l’Université de Liège en Théories et pratiques du cinéma et des arts du spectacle, il intervient régulièrement en tant que chroniqueur culturel pour différents médias. Il est notamment l’auteur du Palimpseste noir, notes sur l’impétigo, la terreur, et le cinéma américain contemporain (Yellow Now, 2002), du Corps en abîme, sur la figurine et le cinéma d’animation (Rouge Profond, 2006), et de SHOTS ! Alcool & cinéma (Caïd, 2015).
Poche: 128 pages Editeur : IMPRESSIONS NOUVELLES (2 mai 2019) Collection : La fabrique des héros Langue : Français ISBN-10: 2874496871 ISBN-13: 978-2874496875 Dimensions du produit: 19 x 1,2 x 13 cm Prix : 12,00 €
Je suis passé chez ma libraire commander deux tomes, et elle m’a cité un nouveau tome à paraître, et avec ma mémoire de poisson rouge, j’ai bouffé l’info. Mais je sais que j’ai dressé l’oreille en mode « tiens tiens ».
Bon, ce bouquin est quand même bien meilleur que le tome consacré au Docteur Strange. Déjà, la longue introduction, qui postule une idée forte, prend un peu par surprise : tout s’articule autour de l’idée de l’histoire inventée. Batman n’existe pas, il est un mythe, au sens un mensonge, inventé par Bruce Wayne lui-même, est régulièrement réinventé, afin de jouer sur le caractère superstitieux des malfrats. Tomasovic postule que c’est, parmi les grandes figures super-héroïques, celui qui utilise tout un brouillard de rumeurs qui l’environnent et le dissimulent. Il crée sa propre légende (jusque dans les titres de certaines de ses propres séries) et se prête à de multiples réinterprétations, même contradictoires : ça marche pour des tas de super-héros déjà vieux, remarque l’auteur, mais Batman est à l’origine de cette création, de cette rumeur, il s’est inventé, il s’est raconté le premier.
De là, le bouquin s’articule autour de chapitres pas très longs définissant Batman : Batman est… un super-héros, un tocard, un grand frère, Big Brother… C’est plutôt bien vu, et le texte est à la croisée d’un style fluide mais littéraire et d’une vraie connaissance du personnage.
La classe au-dessus.
Et donc, fini : des passages vraiment super, concernant la sexualité, la mort, le rapport à la ville, à la surveillance. C’est pas mal du tout. Ça dresse un portrait composite du personnage, qui s’appuie sur pas mal de références (je soupçonne Dick Tomasovic d’avoir, en gros, une bibliothèque fournie mais surtout en VF, même s’il ne me semble pas qu’il l’ait précisé). C’est assez chouette et bien écrit, avec des mises en perspective intéressantes. Des figures surnagent : Frank Miller, bien sûr, mais aussi, outre Bob Kane et Bill Finger, Denny O’Neil, Grant Morrison et Tom King, envers qui il semble nourrir une certaine admiration, que je ne partage pas, mais il a le don de citer des passages porteurs de sens.
C’est bien. Les fins connaisseurs du Chevalier Noir trouveront sans doute plus d’intérêt à la longue introduction, assez originale à mes yeux, mais l’ensemble me donne l’impression d’être à la fois riche, pertinent et accessibles aux néophytes.
Ouais, on sait jamais. Le Doctor Strange, j’aurais aimé l’aimer… Et celui-ci, vu mon appétence pour le personnage…
Tiens, d’ailleurs, une petite remarque : j’avais, au moment de l’achat (sans doute vers 2019), commencé à picorer dedans, dans le désordre. Mais ma lecture de ce week-end m’amène à conseiller de le lire dans l’ordre. Il y a une construction.
Je l’ai pris parce que le sujet m’intéresse et a rarement été développé surtout. Mais la description du bouquin ne me donnait pas trop envie, pourtant.