BODY DOUBLE (Brian De Palma)

Thriller/érotique
Long métrage américain
Réalisé par Brian De Palma
Scénarisé par Brian De Palma et Robert J. Avrech
Avec Craig Wasson, Gregg Henry, Melanie Griffith…
Année de production : 1984

Body Double est un suspense mâtiné d’érotisme, le genre de mélange qui enregistrait de bons scores au box-office au début des années 80 (c’était notamment le cas pour Pulsions, déjà dirigé par Brian De Palma, et La Fièvre au Corps de Lawrence Kasdan avec William Hurt et Kathleen Turner). Le film de De Palma peut également être vu comme une satire du monde du cinéma, un film-gigogne qui questionne la réalité de ce qui se passe à l’écran dès les premières minutes.

Le personnage de Jake Scully (incarné par Craig Wasson), acteur sans le sou, est présenté alors qu’il joue un vampire dans une série Z, rôle qu’il perd à cause de sa claustrophobie. Le générique défile sur un décor qui se révèle être faux et on suit les efforts de Jake pour retrouver un boulot (dans un Hollywood des années 80 filmé comme dans les années 50/60, voir ces transparences bien visibles dans les scènes de voiture par exemple), ce qui passe par les humiliations des auditions et des cours de « Méthode » donnés par des comédiens ratés. Pour un acteur, Jake Scully se révèle être un homme au caractère passif, ce qui est déjà un indice du comportement qu’il adoptera pendant la première partie du métrage…

Entre deux castings ratés, Jake rencontre un certain Sam Bouchard. Les deux hommes sympathisent et Sam propose à Jake de venir s’occuper de son appartement car il doit partir en voyage pendant quelques jours. De la fenêtre, Jake s’aperçoit qu’il peut mater une de ses voisines qui se livre chaque nuit à une danse érotique avant de s’endormir. Les références hitchcockiennes du cinéma de De Palma tournent à plein régime à partir de ce moment puisque le film devient une sorte de version (nettement) plus osée de Fenêtre sur cour (mais pas que…).

Lorsqu’il se rend compte qu’elle est également observée par un homme au visage menaçant (au maquillage tellement outré qu’il ressemble à un méchant de film d’horreur), Jake se met à suivre la femme partout. Jake est frustré, Jake est voyeur, Jake n’a qu’une seule idée en tête…condensé des obsessions de De Palma, Body Double navigue très efficacement entre le classique et le clinquant des eighties, entre le romantisme échevelé et la représentation de fantasmes un peu grotesque tout en étant totalement assumée (le réalisateur a avoué avoir voulu jouer avec la censure après les problèmes rencontrés pendant la production de Scarface).

Bien tendu pendant la première heure, le scénario déborde de symboles qui culminent pendant la scène de meurtre avec l’utilisation d’un engin de forme phallique pour une pénétration sanguinolente (De Palma en rajoute une couche dans la mise en scène de ce passage choc et là encore Jake ne peut que regarder). L’intrigue rebondit ensuite avec une révélation qui amènera le personnage principal à porter un nouveau regard sur tout ce qui vient de se passer, principalement par sa rencontre avec une actrice de films pornos campée par Melanie Griffith, dont la caractérisation apporte une touche de légèreté à l’ensemble.

Au fur et à mesure que l’histoire avance, le terme « body double » prend différentes significations, littéralement et (là encore) symboliquement, de manière assez savoureuse et vertigineuse…avant une scène de générique qui revient sur une démonstration plus technique de la « doublure corps », bouclant en même temps la boucle avec le plan d’ouverture…

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Je le trouve incroyable ce film. C’est un de mes De Palma favoris, et pourtant dieu sait que je porte sa filmo très haut dans mon petit panthéon perso…

En cela, le film se rapproche de l’excellent « Blow Out », dont l’entame est basée sur une idée similaire, traitée sur un mode ouvertement parodique, dont le « climax comique » est un cri d’actrice complètement raté. Le retour de ce cri à la fin du film se fait par contre sur un mode totalement tragique, c’est très fort comme bascule. De Palma est vraiment un maître pour mêler émotion, éventuellement pastiche, et « puissance théorique » pure au sein d’un même film, parfois au sein d’une même séquence.

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