Au début des années 2000, en Espagne, ce n’est pas Panini qui s’occupe de Marvel, c’est Forum. Et dans les kiosques, l’activité est frénétique, adaptant les nouveautés mais également les « vieilleries ».
En m’arrêtant de l’autre côté des Pyrénées, je m’intéressais à différentes collections. Par exemple les « Selecciones Marvel ». J’en ai plusieurs numéros.

L’intérêt, c’était que les kiosques à l’époque (j’imagine que c’est toujours pareil, mais sait-on jamais) disposaient de « back issues », si bien qu’il était possible de récupérer quelques exemplaires de numéros précédents.
J’ai pris le numéro 8 consacré aux Défenseurs et reprenant la première aventure répartie sur les séries consacrée à Hulk, au Docteur Strange et à Namor, ainsi que les deux premières aventures publiées à leur nom. Je crois que l’Essential américain était sorti (quoique, à vérifier), mais la possibilité d’avoir l’ensemble en couleurs d’époque m’a séduit.

Le numéro suivant est consacré aux Champions de Bill Mantlo et John Byrne, une petite série méconnue mais qui a connu ses grands moments. Là, c’est donc toute la fin de la série, avec plein de vilains cools et d’idées farfelues, et un sacré rythme. J’adore. OK, j’avais ça dans Titans, mais là, sans coupes ni retouches, j’ai pas résisté.

En bon fan de Docteur Fatalis, je n’ai pas résisté non plus au numéro 16, qui reprend le serial publié dans Astonishing Tales, à savoir les épisodes de Wally Wood (formidables, réminiscents de son boulot sur THUNDER Agents) et l’épisode par Conway et Colan, qui fixe les « origines » du bon Docteur, notamment ses rapports à sa mère damnée.

Autre très belle pièce, le numéro 17 reprend des épisodes de la série Inhumans par Doug Moench, George Pérez et Gil Kane. Pareil, j’ai ça dans des pockets, mais là encore, le retrouver dans un format prévu par les Américains, c’est un plus.
Et là, pour le coup, à ma connaissance, il n’y a pas eu de réédition américaine de cette période (ou alors du hardcover qui m’aurait échappé). Donc miam.
Dans l’ensemble, cette collection (que je visualise dans son entier en allant sur le site universomarvel.com) s’apparente un peu à notre Strange Spécial Origines hexagonal, ou à ses descendants que furent Spécial DC chez Semic ou Marvel Classics chez Panini : la volonté éditoriale d’explorer le passé de l’éditeur concerné, en ressortant des morceaux importants, des sagas lisibles indépendamment.
Le prix me semble très démocratique : en 2000-2001, le numéro se vendait 995 pesetas, ce qui correspondait à 5,98 euros, pour environ 96 ou 112 pages. Le numéro 9 consacré aux Champions fait 128 pages, pour 6,58 euros. Même à l’époque, c’est pas mal.
Les couvertures sont des créations locales (je ne sais pas si c’est encore possible aujourd’hui, sur le marché espagnol, l’éditeur américain devant se montrer tout autant inflexible qu’ici, mais allez savoir), peintes par Rafael Lopez Espi, un illustrateur né à Barcelone en 1937. Reprenant de près les compositions des comics américains, il donne aux images un grain séduisant et riche, avec des ambiances parfois très denses (j’adore la « Doctor Muerte »), qui ajoute un petit plus presque vintage à la revue.
Enfin, je reviens un instant sur les couleurs. Les quatre numéros que j’ai proposent, sur un beau papier mat et blanc, une reproduction des planches dans la colo d’époque, à savoir une trame un peu épaisse et donc visible. Là encore, il me semble que ce choix ne fait que renforcer l’aspect historique des sommaires, les BD étant présentées « dans leur jus ». J’avoue que, pour ma part, ça a été un argument d’achat évident. Et je concède que ça pourra faire sortir les plus jeunes de leur lecture, mais ils n’ont qu’à s’acheter des crampons, après tout.

Les sommaires sont complétés par quelques textes de présentation en amont et en aval, et par une galerie d’illustration, en général composée de couvertures américaines. Je note que sur certains des numéros, ces covers apparaissent comme légèrement moirées, ce qui pourrait être la trace d’une numérisation. Pourquoi les pages de BD, dans ce cas, ne sont pas moirées ? Sans doute parce que les éditeurs sont peut-être repartis des films d’impression achetés à Marvel.
À l’époque, les deux gros éditeurs n’avaient pas encore entamé à grande échelle la numérisation de leur fond. Si bien que les éditeurs étrangers pouvaient commander des épisodes de n’importe quelle période, à la condition de travailler avec un lettreur et un imprimeur capables de gérer les films d’imprimerie. En 2001, on en trouvait encore beaucoup, ce n’était pas un problème. Donc je pense que Forum commandait ce genre de matériel pour les pages intérieures.
Aujourd’hui, ce serait une autre paire de manches, car les gens capables de travailler avec ce type de matériel se font rares.
Le résultat est très propre, et leur papier, plutôt bon, facilitait la reproduction des couleurs pimpantes de l’époque.
Bref, une chouette collection.
Jim