COMICS & CONTRE-CULTURE (Jean-Marc Lainé)

Le Vil Faquin consacre une critique détaillée aux d’Alex NikolavitchDieux de Kirby. Il en profite également pour évoquer les autres ouvrages de l’éditeur, dont ce Comics & contre-culture.

Jim

Alors, parlons dédicaces.

À la PCE, je serai en dédicace sur le stand de Huggin & Muninn, pour Nos Années Temps X co-écrit avec Jérôme, qui sera présent samedi je crois :

  • le samedi de 14h à 15h30
  • le dimanche de 10h à 12h

Je participe à une table ronde le samedi de 15h45 à 16h45.

Le reste du temps, je serai disponible sur le stand des Éditions Confidentiel (pour Comics et contre-culture).

Donc, à très bientôt.

Jim

Deux dates à retenir :

  • Je donne une conférence à la Roche-sur-Yon le vendredi 29 avril prochain, sur le thème du super-héros et de la ville. L’intervention sera suivie d’une rencontre dédicace.

  • Je suis en dédicace à Évreux, le samedi 7 mai prochain à la librairie BD Lib, en tandem avec mon ami Thierry Olivier, pour la sortie de son Affreusement vôtre : des morts, des vivants et des morts-vivants.
    Je discutais avec le libraire au téléphone ce midi, et je me suis rendu compte que ce sera le jour du Free Comic Book Day. L’occasion, le larron, tout cela…

Jim

« C’est-très-bien-! »

Trêve de plaisanterie, j’ai commencé à me lire ça dans le train, et parfois je me tape le front en m’écriant « mais bien sûr » tellement les description sur l’évolution du « Comics Strip » au « Comics Book » est limpide.

Mais je me pose une question : Est-ce que tu vois un équivalant aux « Yellow Papers » (plus ou moins « journaux à sensation » comme tu le sous-entends) aujourd’hui ? Je vois les journaux et les « hebdomadaires à sensation » mais en ce qui concerne les « journaux à sensation », soit je baigne dedans et je n’ai pas le recule nécessaire, soit je n’ai jamais connu…

Bah merci.
Ça fait plaisir.

[size=85](quels passages, en particulier ?)[/size]

Je ne suis pas sûr de comprendre la question. Tu me demandes s’il y a aujourd’hui un équivalent d’une presse quotidienne un peu saumâtre, c’est ça ?
Je crois que non. Si je comprends bien (à la fois la presse d’aujourd’hui, que je vois du coin de l’œil mais que je ne lis que par bribes, et la presse de l’époque que je connais surtout par procuration), je crois que les quotidiens « jaunes », cette espèce de presse à ragots sur mauvais papier, est un mélange de deux trucs qu’on connaît aujourd’hui comme étant assez séparés, à savoir la presse quotidienne d’un côté et les journaux à scandales de l’autre.
Le truc, c’est que le papier des journaux à scandales d’aujourd’hui est souvent d’assez bonne qualité (pas toujours). Ce qui en fait des descendants des « slicks », les magazines sur beau papier qui naissent au tournant du 20e siècle. Et qui, à l’époque, ont un contenu aussi exigeant que le papier est beau. Grosso modo, le caca était imprimé sur papier cacateux, à l’époque. Aujourd’hui, il est nettement mieux emballé.
Me semble-t-il.
(Mais je ne sais pas si je réponds à ta question…)

Jim

Au Royaume-Uni, il me semble que certains journaux sont encore sur du papier de mauvaise qualité (mais je me trompe peut-être)… La dernière fois que j’ai eu un exemplaire du Sun entre les mains (ça date un peu, cela dit), le papier buvait l’encre des photos (et elle me restait sur les doigts, aussi… Mais ça, ça me le fait aussi avec des revues de meilleure qualité).

Tori.

Parce qu’il faut vraiment l’avoir lu ?!?

Plus sérieusement, c’est l’endroit où tu parles des premières rééditions (ou fausses rééditions dans certain cas) puis d’une nouvelle méthode de distribution (avec les céréales, la lessive, etc.) qui, j’imagine, doit se faire en parallèle à la course à l’électroménager, l’essor de l’art industriel, etc. L’American Dream en quelque sorte.

Si, c’est parfait.

Dans l’imaginaire, on associe souvent l’après-guerre avec l’explosion de l’électroménager (et l’entre-deux-guerres avec la crise économique). Et tu as raison de le rappeler, c’est pas aussi simple. L’électroménager a commencé à se développer avant la Seconde Guerre mondiale, en même temps que la radio, par exemple. Mais l’arrivée de la télé après la guerre, et de la publicité qui y passe, en fausse la perception.
Je n’ai pas trop abordé ça parce que je n’étais pas sûr de mon coup. Évoquer les lessiviers et tout ça, ça me permettait de parler de ces transformations sociales et économiques (et culturelles) sans rentrer dans les détails. Mais visiblement tu l’as ressenti.
Sur le blog de Chuck Dixon, il y a un papier de sa part où il réfléchit à l’évolution du marché. Et il entreprend de dépister des idées reçues. Notamment celle qui consiste à dire que les comics des années 1950 sont moribonds. Et il explique que si l’industrie s’est pris une claque dans le museau, les meilleurs ventes sont néanmoins atmosphériques, ce qui contredit l’idée de la mort du support. Je crois que des idées reçues de ce genre-là, on en a plein, et parfois, il convient de ne pas s’y empêtrer.

Cela dit, puisqu’on en est aux claques sur le front dans la lignée de l’Inspecteur Bourrel, je crois que tu vas trouver un chapitre qui devrait te surprendre, un peu plus loin dans le bouquin. J’imagine que tu viendras nous en reparler quand tu y seras.

Jim

Merci à vous pour les photos et le compte-rendu.

Jim

Tout à fait. Mais avec le Krash de 1929, j’imagine que l’American Dream devait être un doux rêve pour une grosse portion de la populace. Alors qu’après la guerre, lorsque le pays a renfloué ses caisses, il est peut-être plus accessible.

Tu sais, il me suffit de peu. Je suis déjà surpris que le Teen Comics se soit imposé quand le genre super-héros tombait en désuétude. Et pourtant, ça s’explique assez facilement avec les besoins de la guerre et ceux de l’après-guerre.
[size=85]Quant à savoir ce que ça veut dire pour notre société qui encense des surhommes sur grand écran ? Je n’ose imaginer la réponse ![/size]

Arrivée au passage sur les Crime Comics, je comprend mieux la chasse au sorcière survenue dans les années 50. Tous les comics étaient mis dans le même sac (à l’instar des jeux-vidéos aujourd’hui). C’est marrant parce que ce n’est pas un point sur lequel se répand Michael Chabon dans Les Extraordinaires Aventures de Kavalier & Clay où la chasse concerne avant tout les auteurs de super-héros (probablement dans le soucis de fluidifier le récit que je considère comme une référence, aussi pointue qu’agréable à lire).

Si je le trouve, si je le trouve…

Je te répondrai plus en détail demain, mais là, je pique un peu du nez…
Mais je reviens un instant sur ça…

Il y a deux jours, je suis retombé sur un article dans Charlie Hebdo d’il y a un mois ou deux, où le signataire évoquait le mot arabe pour « martyr », en expliquant qu’un chercheur a récemment affirmé qu’une autre traduction convenable serait « mort-vivant ».
Outre que l’idée du kamikaze blindé d’explosifs et celle du mort-vivant créent des étincelles quand elles se collisionnent, l’auteur de l’article faisait remarquer que les zombies apparaissent dans la fiction à l’orée de périodes troublées. Et de citer White Zombie de 1932 (juste avant Hitler, la guerre…), mais aussi le renouveau du genre avec Romero à la fin des années 1960 (Viêt-Nam, Watergate, conséquences catastrophiques du Summer of Love, chocs pétroliers…).
De là, il serait intéressant de réfléchir à la vigueur du genre depuis dix-quinze ans : peur de l’autre, méfiance envers les élites, montée des fascismes, crises sanitaires et sociales en rafale, économie sinistrosée…
La fiction comme baromètre de la société, en général, c’est flippant.

Jim

Oui c’est une théorie intéressante (que j’ai par ailleurs utilisée), mais de mon point de vue une « fausse bonne idée ».

Il est difficile me semble-t-il de passer directement du contenu supposé d’une fiction (films, romans, BD) à un climat social particulier en pensant que la première exprime directement le second.

Si on regarde d’un certain point de vue (toujours) les années après la Seconde guerre mondiale (par exemple) il n’y a pas une année où il n’y a pas de raison de se faire du mouron.
Je fais des recherches sur le Japon des années 1970 en ce moment, eh bien c’est pas triste.
Idem aux U.S.A pendant la même période.

Les années 1960 en France c’est les Trente Glorieuses et les Yéyés mais c’est aussi la guerre d’Algérie avec les appelés qu’on envoie là-bas, les attentats de l’OAS, et la peur d’un putsch militaire.

Les surhommes, les zombies ce sont des initiatives « spontanées » (et possibles grâce par exemple aux progrès des effets spéciaux) qui se révèlent convergentes, et l’élan est ensuite poursuivit par les éditeurs, les producteurs, les auteurs, etc., qui saisissent la balle au bond du succès si je puis dire, et rentabilisent le plus possible le ou les filons. Ou tente de le faire.

Et tu ne crois pas que la fiction peut rendre compte du zeitgeist, peut-être même avant tout le monde ?

Jim

Beaucoup de monde le pense, et je suis de ceux qui utilisent cette idée pour mettre en contexte des BD par exemple (Pour en savoir +), mais je crois surtout que le *zeitgeist * dépend du point de vue de celui qui l’analyse et de son propre propos.

Un regard a posteriori, peut-être ?

Jim

Oui, toujours a posteriori (de mon point de vue). + ce que j’ai énoncé.

Selon toi, le zeitgeist n’existe pas tout seul, il n’existe que dans le regard rétrospectif de celui qui analyse l’époque ?

Jim

Non, en y réfléchissant ce n’est pas forcément rétrospectif.

Je pense que certains auteurs (dans le sens le plus large possible) sont capables d’inventer quelque chose qui est de cet ordre ; le zeitgeist comme on dit.

Mais l’analyse de ce qu’ils ont fait est toujours de l’ordre du rétrospectif voire impossible à remarquer.

Deux exemples.

Je viens de voir un film intitulé Meurtres en direct de Richard Brooks, aujourd’hui ce film a tout de prémonitoire sur le plan du terrorisme ou disons de l’après-11 Septembre (2001) (en plus d’être un film absolument « invraisemblable » et d’une audace folle).
À partir du moment où je l’ai vu j’ai fais quelques recherches, et il semble que nulle part on ne mentionne qu’il est une concrétisation du zeitgeist, du moins dans les années proches qui ont suivi sa sortie. je ne parle pas du moment de sa sortie, ni des mois qui ont suivis.
On loue sa critique des médias (ce qui est vrai) mais rien sur le plan géopolitique.

Donc j’imagine que l’auteur du roman (seulement traduit en 2009 en France) qui précède le film de 3 ans (de mémoire) et Brooks ensuite, ont eu du « nez ».

Ou bien est-ce le hasard ?

Deuxième exemple, si disons 6 mois avant les attentats du 11 septembre 2001 (encore) un ingénieur avait l’idée de blinder les portes des cabines de pilotages, de mettre des caméras, etc. bref de faire en sorte qu’on ne puisse pas faire ce qui a été fait ce jour-là.
Je pense qu’on peut imaginer que quelqu’un quelque part ayant eu vent de ces modifications aurait pu dire qu’elles ne servent à rien, puisque rien ne se passe.
Forcément, puisque ces portes blindées (pour faire court) empêchent qu’il se passe quelque chose.

Donc c’est quoi le zeitgeist dans la fiction ?

À partir de quand se remarque-t-il ?

Je me glisse dans votre intéressante discussion pour vous signaler la possibilité de revoir « La grande librairie » de France 5 d’hier soir où Boris Cyrulnik a parlé de la notion de héros. Son dernier livre s’intitule : « Ivres paradis, bonheurs héroïques ». Je pense que cela pourrait vous intéresser :
france5.fr/emissions/la-gran … 016_473417

Ton argument me rappelle un sketch des guignols de l’info fait pour se moquer du bug de l’an 2000 où l’un des M. Sylvestre de la World Company préparait des serviettes en papier en cône à chaque place d’une salle de réunion. Un autre lui demande ce qu’il fait et il répond qu’il met les serviettes comme ça pour empêcher les girafes de venir. La réponse du 2e M. Sylvestre est que l’on a jamais vu de girafes ici. Mais oui, c’est grâce aux serviettes, explique le 1e… et les 2 rigolent!

C’est ce qui permet à des gourous de tous poils d’expliquer aux gens que c’est grâce à eux (à leur magie, à leurs prières, à leur force mentale…) que certains évènements graves n’arrivent pas… genre ciel qui nous tombe sur la tête, pluie de sauterelles ou autre plaisanterie du même genre.