DEMENTIA / DAUGHTER OF HORROR (John Parker)

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REALISATEUR & SCENARISTE

John Parker

DISTRIBUTION

Adrienne Barrett, Bruno VeSota, Ben Roseman, Lucille Rowland…

INFOS

Long métrage américain
Genre : horreur
Année de production : 1955

  • Come with me into the tormented, haunted, half-lit night of the insane. This is my world. Let me lead you into it. Let me take you into the mind of a woman who is mad. You may not recognize some things in this world, and the faces will look strange to you. For this is a place where there is no love, no hope…in the pulsing, throbbing world of the insane mind, where only nightmares are real, nightmares of the Daughter of Horror!*

Une jeune femme (jouée par une actrice non-professionnelle, la secrétaire particulière de John Parker) se réveille d’un profond cauchemar dans une chambre d’hôtel minable. Avant de quitter la pièce, elle ouvre un tiroir et récupère un couteau. Son errance nocturne la mènera à croiser un ivrogne qui bat sa femme, un nain vendeur de journaux, un maquereau, un obèse odsédé sexuel amateur de cigares, un flic sordide…un flic qui ressemble étrangement à son père d’ailleurs, père décédé dans de sordides circonsances des années auparavant…

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Un bien étrange petit film, ce Dementia. Unique réalisation d’un certain John Parker, un fils d’exploitant de cinéma, Dementia a été en tourné en noir et blanc et sans une seule ligne de dialogue prononcée pendant la petite heure que dure le métrage. L’histoire n’est pas linéaire, et s’apparente plus à un cauchemar éveillé, une plongée graduelle dans la folie soulignée par une musique étrange et envoûtante (grâce aux vocalises de la chanteuse Marni Noxon), des effets sonores entêtants, des rires aussi sardoniques qu’hystériques et des visuels frappants.

John Parker joue constamment de cette frontière floue entre rêve et réalité, notamment via une série de séquences surréalistes plus ou moins réussies. Le métrage atteint ainsi des sommets lorsque la « gamine » (telle qu’elle est surnommée dans le générique) est visitée par une figure cagoulée qui révélera son passé trouble. La surperposition de ce flashback et d’un décor de cimetière crée une atmosphère troublante, exacerbée par la photographie de William C. Thompson, un familier de ce tâcheron d’Ed Wood.

Par contre, la scène musicale qui conclut le film, véritable tourbillon hystérique, est un peu plus lourde…trop longue, moins maîtrisée…à l’image d’un esprit qui part en lambeaux…

Tourné en 1953, Dementia prit la poussière pendant deux ans suite à des démêlés avec la censure qui exigea quelques coupes. John Parker put enfin sortir son film en 1955, mais ce fut un échec cuisant. Dépité, Parker vendit les droits au distributeur Jack H. Harris et ne toucha plus à une caméra par la suite (sauf pour ses films de vacances peut-être…mais ceci ne nous regarde pas…).

Jack H. Harris procéda lui-même à quelques petits changements, retitra la pelloche Daughter of Horror et ajouta une voix-off (par Ed McMahon, future star de la télé U.S.) beaucoup trop démonstrative. Il profita également de l’occasion pour inclure quelques passages dans la série B Danger Planétaire avec Steve McQueen (c’est le film qui passe au cinéma pendant l’attaque du Blob).

Oui, une bien étrange petite production indépendante…tantôt brillante, tantôt maladroite, souvent fascinante…

Ha ha! Marked… Marked forever! Daughter of horror.

Grillé par le Doc…! Si j’avais été un peu moins fainéant, j’aurais pu me charger de ce billet : il se trouve que je suis très fan de ce « Dementia »…

Petit film totalement inconnu du grand public, tentative unique de son auteur (un peu comme « La Nuit du Chasseur », unique film de Charles Laughton), « Dementia » a des airs de cauchemar éveillé…pour une excellente raison : il s’agit en effet de la stricte reconstitution d’un authentique cauchemar.
En effet, Parker se vit un jour raconter par sa secrétaire un rêve qu’elle avait fait la nuit précédente et qui l’avait beaucoup perturbée. Fasciné par le récit de son employée, John Parker décida d’en faire la base du film qu’il projetait de réaliser. Sans sur-intellectualisation et psychanalyse de comptoir, « Dementia » adopte donc la structure d’un cauchemar, et expose ses nombreuses zones d’ombre.
L’actrice qui interprète le rôle, comme le précise le Doc, n’est donc autre que la rêveuse elle-même, secrétaire de John Parker. Elle connaîtra donc l’expérience troublante et atypique de revivre l’un de ses propres cauchemars « pour de vrai »…

Si j’aime beaucoup le film, je dois cependant comme le Doc souligner la faiblesse relative de certains passages : le film est en effet très inégal. Il comprend néanmoins quelques excellentes idées (ce début et cette fin « en miroir », rendant rêve et réalité parfaitement indistincts) et quelques morceaux de bravoure, comme cette impressionnante séquence avec l’homme cagoulé dans le cimetière, une petite merveille d’effroi.
Le film se propose également un défi intéressant et plutôt rare depuis le début des années 30 : le film est sonore mais pas parlant, un peu à l’instar (dans un genre radicalement différent) du « Dernier Combat » de Luc Besson. Une contrainte qui oblige les réalisateurs à redoubler d’efforts au niveau de la narration purement visuelle de leur film, par la force des choses.

Exemplaire d’une certaine veine pré-« lynchienne » avec quelques autres réussites majeures comme « Carnival of Souls » de Herk Hervey, le film est à voir impérativement dans sa forme originelle, dégraissée de la voix off qui vient bêtement surcharger le film dans la version connue sous le titre « Daughter of Horror ».

Pour les curieux :

:wink:

En tout cas, je te remercie de l’avoir mentionné à plusieurs reprises, ça m’a rendu curieux et ce fut une chouette découverte…

Je suis bien d’accord. J’ai vu les deux versions et on peut vraiment se passer de la voix-off…

FAITH NO MORE - « Separation Anxiety »

Le groupe de San Francisco a sorti il y a quelques jours à peine une vidéo, via le label Ipecac Recordings de leur chanteur/hurleur/crooner Mike Patton, illustrant le quatrième single extrait de leur dernier album en date, « Sol Invictus ».

Et quelle brillante idée que d’illustrer ce morceau un peu tendu et inquiet par des images extraites de « Dementia/Daughter of Horror »… On se croirait chez Fantômas, autre projet de Mike Patton, plus coutumier de ce type d’ambiance.

Excellent ! La musique s’accorde vraiment bien avec l’atmosphère particulière du film…c’est très réussi !

Ouaip, vraiment excellent.
Je viens de me refaire le clip à l’instant, et ils ont vraiment bien pensé le calage des images sur la zique. Et en termes de « mood », ça le fait vraiment.
Un bel écrin pour le morceau, et un bel hommage au film pour le coup.