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En 1986, Marvel lance une série mensuelle consacré à la guerre du Viêt-Nam (qui s’est conclue un peu plus de dix ans plus tôt, c’est encore très frais, donc), The 'Nam, dont le principe consiste à raconter le conflit « en temps réel », un mois par épisode. L’histoire commence avec le départ du première classe Ed Marks, complètement naïf, qui va être confronté au feu quasiment aussitôt. La série connaîtra plus de 80 épisodes, mais à ma connaissance seuls les deux premiers ont eu l’honneur d’une traduction, à l’occasion d’un album chez Delcourt en 1988.

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La série est marquée par la présence au dessin de Michael Golden, connu jusque-là pour son style rond, contrasté, très détaillé. Golden, c’est l’un des plus beaux épisodes de Doctor Strange par Roger Stern, ou le fameux Avengers Annual #10 qui marque l’arrivée de Rogue. Ou encore Bucky O’Hare ou Micronauts. Avec The 'Nam, il utilise un style plus épuré, plus semi-réaliste, presque cartoony. Les expressions sont caricaturales, le langage corporel outré. Ce qui est pas mal, d’ailleurs : le scénario de Doug Murray décrit l’horreur du conflit, donc un trait moins réaliste est le bienvenu, afin de désamorcer un peu la gravité du sujet. Ce qui n’empêche pas Golden d’être parfait pour représenter en détail les hélicoptères ou les chars. Il y a quelque chose d’eisnerien dans sa représentation des différents bidasses aux allures exagérées, notamment dans les cases muettes, une sensibilité humaniste assez rare.

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L’album Delcourt regroupe donc les deux premiers chapitres de « la mini-série la plus longue de l’histoire de la BD ». Dans le premier chapitre, Ed Marks (dont le parcours est inspiré par l’expérience de Doug Murray au Viêt-Nam : lui et Larry Hama, le responsable éditorial, ont fait la guerre, ils savent de quoi ils parlent) arrive sur le terrain et vit sa première expérience du feu. Dans le second, le peloton auquel il appartient, guidé par un roublard gueulard qui emprunte sans doute beaucoup à l’expérience du scénariste, mais aussi à des figures de chef bourru et honnête à la Nick Fury, se heurte à la corruption et aux combines propres aux unités sur le terrain, loin de la manière officielle qu’on trouve dans les manuels.

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L’album de Delcourt ne comporte pas de numérotation. L’éditeur avait peut-être prévu de ne pas aller plus loin, ou a choisi de ne pas prendre de risque. Dommage, on en aurait bien repris une dose. L’édition française a la particularité de présenter des couleurs refaites, et signées par Olivier Vatine. La traduction, quant à elle, est rédigée par Guy Delcourt lui-même (et elle me semble tout à fait convenable.

Une petite curiosité qui aurait pu donner naissance à une série d’albums. Dommage que l’expérience s’arrête là.

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