Il arrive dans la vie d’un lecteur des périodes où se succèdent des lectures qui, les unes après les autres, le transportent par leurs qualités ou par les émotions qui, pour une raison ou une autre, elles suscitent en lui.
Voilà donc la pile, de lectures ou de relectures, qui m’ont ravi et qui, il y a peu encore, ne semblaient jamais devoir finir.
Pas si souvent dans une vie de lecteurs.
Quelques commentaires en passant, donc :
Les Miller : Si DK2 était une relecture, Ronin, Martha et les superman year one étaient des découvertes.
Curieux que je lise le Ronin si tard. Il y a ainsi de troubles fidélités aux réactions de l’adolescence. C’est après avoir lu DKR que le premier contact avec Ronin eut lieu. L’œil peu formé encore, la filiation entre les deux œuvres ne paru pas évidentes au feuilletage. Pire, un véritable rejet du trait, une déception, une rancune peut-être, qui perdura bien audelà du raisonnable.
C’est en lisant et en polémiquant sur Miller qu’arriva enfin le moment de s’y plonger. Et quelle lecture : de DKR à Sin City, en passant par Elektra, tout est déjà dans Ronin. Mais aussi l’Europe avec Moebius et le japon avec son imagerie et aussi sans doute lone wolf. Une énorme claque graphique. Je n’étais tout simplement pas prêt lors de mon premier contact avec ce chef d’œuvre.
Martha et Parker ont en commun d’avoir une première moitié absolument géniale et une seconde plus mineure, presque à considérer comme des appendices.
C’est l’actualité qui est sidérante pour Martha, Miller ayant tout simplement tout prédit de l’Amérique et du monde d’aujourd’hui. Quant à Parker, c’est l’une des BD les plus immersives qu’il m’ait été donné de lire. Le style cartoony, l’unité des couleurs, très monochrome donc, donnent consistance à l’ambiance noir d’une façon sidérante. Ce constat est su, connu et reconnu et de l’ordre de l’évidence à la lecture.
Lois Lane est dans son genre une très belle réussite qu’à première lecture je n’avais pas su complètement apprécier. Jimmy invente son genre et c’est le comic-book qui m’a finalement convaincu que Fraction etait un grand auteur. Deux œuvres périphériques de la reprise de superman par Bendis, reprise dont j’ai souvent salué la qualité et la cohérence. Bien dommage et assez injuste que le lectorat et les éditeurs aient choisi ce run pour présenter à Bendis la facture de ses excès passés.
X-Static et les Cable de Kordey font partis d’une réinvention de la ligne des x men. Il a fallu des conditions si singulièrespour produire l’environnement éditorial qui a permis une telle liberté créative, qu’il est vain d’espérer qu’une telle qualité chez les x men puissent revenir de sitôt.
Toujours aussi curieux de constater que Quesada ait pu être l’un des meilleurs éditeurs de Marvel, initiateur d’une période créative aussi brève qu’intense, avant d’être celui qui systématiquement s’acharna à façonner le marvel corporate que l’on connait aujourd’hui.
X-Static jouit d’une grande réputation méritée, plus anonyme est la prestation de Macan et Kordey sur Cable. Pourtant, je considère que ce court run comme un chef d’œuvre de la marvel. Macan, comme je crois kordey, ont connu la guerre civile. Est ce cette expérience qui façonna le style inimitable du scénariste, mélange de comédie humaine et de tragédie où chaque personnage peut être aussi horrible de méchanceté que, pourtant, humain et touchant ? Le run des deux auteurs constituent une seule histoire ou presque et un épilogue, voyage dans une russie post urss, où les idéologies sont tombées emportant avec elles le pays. Cable y vivra une crise existentielle poétique, hilarante, triste. Pépite de Marvel qui semble pourtant en avoir honte, la parenthèse fut vite refermée sans plus jamais y faire référence. Trop différent, trop bon et trop différent. A lire par tout ceux qui seraient passés à coté et par le duo qui a pu me faire lire et aimer du western.
Un été cruel du tandem, louangé à raison, Brubaker et Phillips. Un été cruel s’inscrit dans l’univers de Criminal et nous relate comment c’est noué le passage entre deux générations de truands. C’est l’histoire de Criminal mais aussi du tandem qui, je crois, m’a le plus touché. Apre, violent, juste, un immense gâchis brillamment raconté.
Les Valerians n’ont pas pris une ride. L’éditions en intégrale est vivement conseillée, qui s’ouvre dans chaque tome sur un récapitulatif de l’époque et forme ainsi de tome en tome une biographie des auteurs et une rétrospectives des années 70 et 80 notamment. Une forme de nostalgie, particulière, celle du monde qui façonna l’enfance, mais qui déjà n’était plus avant même que la conscience de sa disparition n’ait pu se former. Même émotion, même si pas même qualité, pour le Ulysse de Lob et Pichard. « Lob et Pichard », ne serait ce que ces noms…