DÉTECTIVES t.1-7 (Herik Hanna / Sylvain Guinebaud, Nicolas Sure, Ceyles, Thomas Labourot, Julien Motteler, Mara)

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Grand amateur de romans policiers que ce soit du *whodunit * ou dans une veine plus *Noire * ou hard-boiled je n’ai découvert cette série que récemment.
Et par la même occasion son scénariste qui derechef, est entrée dans mes « petits papiers ».

Or donc, Hérik Hanna propose une série pensée à partir de l’album qu’il a scénarisé pour la série Sept de l’éditeur **Delcourt **: Sept Guerrières, Sept Survivants, Sept psychopathes, etc. et donc Sept Détectives (que je n’ai pas encore lu).

Dans ce premier tome, honneur aux dames, c’est à Miss Crumble qu’il incombe de résoudre une enquête.
Et je dois dire que pour le coup Hanna m’a bluffé, … malheureusement je ne puis en dire plus à ce sujet car je risquerais alors d’enlever une bonne partie de ce qui fait le piquant de cette enquête.

Une enquête où l’ambiance et les ingrédients de ce qui fait généralement un *whodunit * réussi sont présents, l’amateur du genre ne sera je pense, pas déçu.
Cependant il ne s’agit pas juste d’une simple affaire de style, Erik Hanna a écrit une excellente enquête qui prend place dans un scénario solide aux personnages souvent hauts en couleur (comme on a l’habitude de dire).

Sylvain Guinebaud dessine de très belles planches, dont le découpage ne vous laisse pas une minute pour penser à autre chose.
Je dirais que l’enquête et le découpage sont menés de concert dans le but de captiver le lecteur, et c’est chose faite en ce qui me concerne.
Ajouter à cela des visages extrêmement expressifs et un soin particulier apporté à la couleur (avec un joli travail sur les tons qui participe généreusement à l’ambiance mystérieuse) et vous aurez une idée de la qualité de cet album.

D’autant qu’on peut aussi s’amuser du découpage qui, s’il accompagne avec brio l’enquête comme je l’ai dit, n’en est pas moins ludique en tant que tel.

Bref cette série a gagné un nouveau lecteur. :slight_smile:

Avant de vous quitter je vous avise (gentiment) que si les quatre premiers albums peuvent se lire dans le désordre, à partir du tome 5, le scénariste va commencer à nouer quelques liens, croiser les intrigues, remplir des trous, faire entrer les récits en résonance.
Et il vaudra mieux respecter l’ordre de parution… dixit David Chauvel. :wink:

Et surtout, artemus dada, il faut que tu lises le « sept détectives » qui serait le 1e album de la série si l’on en croit l’introduction du 5.

C’est prévu amiga ! :wink:

Ce qui allait devenir un genre littéraire, c’est-à-dire ce qu’on peut définir comme une pratique institutionnelle visant à produire des récits dont les références narratives communes peuvent être reconnues par le public, sous le nom de roman hard-boiled a été inventé au début des années 1920 par des écrivains qui vendait leur prose aux éditeurs de pulp magazines, des fascicules à grande diffusion (à leur apogée les diverses maisons d’édition publiaient plus de 125 titres/mois pour plus de 10 millions de lecteurs) imprimés sur du mauvais papier et plus précisément dans les pages de l’un d’entre eux : Black Mask.

Né d’une préoccupation pour le réalisme qui se traduira dans un premier temps par une utilisation particulière de la langue américains (et non pas de l’anglais) et par un style dit béhavioriste, le récit hard-boiled fourni désormais les éléments d’un imaginaire des plus débridé.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le détective privé (l’une des figures majeures du genre) hard-boiled n’est pas un élève de Sherlock Holmes ou de Miss Crumble, maîtres de la féerie logique, mais un descendant des héros de la Frontière ; « c’est le cow-boy adapté à la vie des villes ».

Le détective privé hard-boiled (dur-à-cuir) est un personnage qui doit faire face à des situations qui dans une société policée ne sont censées avoir cours qu’exceptionnellement, mais qui pour lui sont monnaie courante.
Si dans le récit à énigme (Cf. l’album Miss Crumble) le cadavre est prétexte à la production d’un récit, dans le récit hard-boiled c’est le récit qui est prétexte à la production de cadavre(s).
La violence n’y est pas uniquement l’acte ultime et sans remède qu’il devrait être, mais un mode de comportement qui fonde, et en même temps qui désintègre les rapports humains.
Si le récit hard-boiled a rompu avec le positivisme de Sherlock Holmes (et de ses confrères & consœurs) l’enquête demeure néanmoins l’armature structurante essentielle pour décrire la façon dont le sens se construit à partir de signes éparses.
Signes avec lesquels joue Erik Hanna au travers de l’histoire de son héros Richard Monroe fortement inspiré (mais pas seulement) du Mike Hammer de Mickey Spillane.

Mike Hammer (hammer = marteau, tout un programme) n’est pas né de la dernière pluie ni dans les pulp magazines d’ailleurs.
C’est un personnage de paperback (livre de poche), ces derniers vont supplanter les pulp magazines aux alentours de la Seconde guerre mondiale.
Les *paperbacks *ont été un microcosme issu de l’imaginaire étasunien qui s’est emparé des rues ordinaires, des hôtels bon marché et des bars miteux pour en faire des objets « mythique ». S’ils n’ont pas été créés pour durer mais plus simplement pour donner quelques heures de distraction, ils ont laissé des traces dans l’imaginaire occidental encore visibles aujourd’hui.
Comme on peut

Si **Hammer ** n’est pas un personnage de pulp magazines, il s’inscrit dans la tradition du privé inventé par Caroll John Daly dans Black Mask. Les personnages de Daly sont en quelque sorte la branche « dure » des durs à cuire.

À l’instar de Mike Hammer dont les affaires commencent modestement pour aboutir à une lutte contre « la pieuvre du mal » : mafia, communistes, etc., Richard Monroe ira de surprise en surprise pour finalement se retrouver face à quelque chose d’inattendu et de monstrueux.
Mais je vous laisse le découvrir par vous-même.

Une petite précision toutefois, Richard Monroe n’est pas un simple décalque de Mike Hammer ou d’un autre de ces détectives qui ont fait l’histoire du genre (on remarquera aussi une certaine homophonie entre **Monroe **et Marlowe par exemple), Erik Hanna & **Richard Sure **ont su lui donner une personnalité propre.
D’autre part, il n’est pas nécessaire d’avoir une connaissance du genre « hard-boiled » pour apprécier cet album, tout ce dont le lecteur a besoin pour passer un bon moment se trouve dans cette excellente histoire.

Qu’on se le dise !

J’ai lu l’album à l’origine de la série, Détectives et je poste un petit billet ici puisqu’il fait en quelque sorte partie du même projet.

Le concept de « roman policier » n’apparaît que tardivement par rapport aux textes qu’il prétend rassembler. Quant au terme (anglais) *detective * il n’été inventé qu’en 1843 avec la création d’un « Detective Department » à Scotland Yard.
Pour mémoire, Double assassinat dans la rue Morgue d’Edgar Allan Poe a paru deux ans plus tôt dans le Graham’s Magazine aux U.S.A.. Et le terme « detective » ne devint célèbre à ce qu’il paraît, qu’à partir de 1850 grâce à Charles Dickens qui publia 3 articles consacrés à cette nouvelle unité de police.
Pour situer un peu plus précisément notre sujet c’est en 1863 qu’Emile Gaboriau publiera L’Affaire Lerouge et à cette occasion, l’éditeur Dentu créera le roman dit « judiciaire ».

Le récit policier à énigme paraît pleinement constitué au moment où la société bourgeoise est devenue « maîtresse du monde » et qu’elle s’inquiète de son négatif, le « mauvais côté des choses » qui veut la détruire.
Ce « mauvais côté des choses » apparaîtra bien entendu, sous la forme de la criminalité.
Dans le récit policier à énigme, le délit trouble l’ordre du Droit qu’il importe de restaurer par la découverte du coupable et son « élimination » du champ social (comme le dira fort justement Jean-Patrick Manchette).
Ainsi, après avoir suscité la peur (le suspense) le récit policier a pour fonction de rassurer le lecteur en lui donnant au final l’image d’un monde remis en ordre.

Toutefois le récit policier a longtemps était perçu comme de la mauvaise littérature (c’est d’ailleurs peut-être encore le cas de nos jours), et assimilé à un « jeu ».
Le jeu consistant en une sorte de compétition entre le lecteur et l’auteur, ce dernier présente un problème au premier qui devra tenter de le résoudre avant la fin de l’histoire.
D’où finalement la formule désignant le genre à lui tout seul, le whodunit ou en bon français : kilafé.

En théorie le récit de déduction est fort simple : quelqu’un est assassiné, il y a enquête, les soupçons retombent sur un certain nombre de personnes, le coupable est découvert et punie pour son crime.
Un assassinat qui souvent, il faut bien le dire, ne semble pouvoir être résolu que par un Polytechnicien tellement le modus operandi parait complexe et tortueux.

Ce qui est beau dans le récit policier à énigme, c’est le métier, la facture, le tour de main.
Ainsi, la virtuosité de l’auteur est parfois plus digne d’admiration que l’histoire elle-même ; avec 7 Détectives, heureusement, la synergie entre l’histoire et le tour de mains des auteurs est complète.
Et elle a pour le dire en terme balistique, une stupéfiante puissance d’arrêt qui se traduit par une sensation d’émerveillement (sens of wonder) à nulle autre pareille.

Bonne pioche, comme dirait l’autre !

Une petite anecdote avant de terminer, si Sept Détective s’insère dans un projet de série ayant comme point commun le chiffre en question : Sept Voleurs, Sept Dragons, Sept Psychopathes, etc., la réunion de ces 7 détectives m’a rappelé qu’en 1912 dans les pages de The Century Magazine (1881-1930), Carolyn Wells avait créé La Société des Détectives Infaillibles réunissant rien de moins que Sherlock Holmes, Auguste Dupin, Arsène Lupin ou encore Monsieur Lecoq. Cette équipe de détectives littéraires vivra une seconde aventure en 1915 dans la même revue.

Cette équipe donc avait la particularité de réunir ses membres autour d’une table pour se raconter leurs aventures, et elle aurait servi de modèle à la célèbre Justice Society of America dont les aventures enchanteront les jeunes lecteurs de comic books dans les années 1940, une JSA qui a elle-même inspiré la Justice League of America, et plus « récemment », Alan Moore a créé sa célèbre Ligue des Gentlemen Extraordinaires, toujours sur ce modèle.
Et voir ces 7 détectives autour d’une énigme m’a remis cette histoire en tête. :wink:

c’est une chouette série et j’aime particulièrement le Miss Crumble. j’adore ce que fait Sylvain Guinebaud. j’ai eu la chance de pouvoir le faire dédicacer

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merdum ma photo est floue

et sinon Sylvain vend des planches,des croquis et des crayonnés

photos.google.com/share/AF1QipP … FTXzBUa2JR

photos.google.com/share/AF1QipO … l4OXQ1cmF3

Artemus dada, merci pour tes passionnantes explications… J’ai appris beaucoup de choses mais il est vrai que j’ai longtemps négligé les romans policiers ou les romans noirs et privilégié la science-fiction… ou les BD!

Juste un bémol à ton précédent message sur Richard Monroe : même sans avoir lu beaucoup de romans hard-boiled, je l’ai apprécié via les films classiques en N&B avec Humphrey Bogart, par exemple. Côté fictions policières, ma culture est plus cinématographique ou télévisuelle.

:wink:

Merci.

Pourquoi un « bémol » ?

Oups! :blush:
En fait de bémol, c’est plutôt une confirmation de ton « il n’est pas nécessaire »…

J’ai tendance à lire (ou écrire) trop vite…

Moi aussi :slight_smile: , je viens de me rendre compte en me relisant (pour voir où était le bémol) que j’avais écrit « dur à cuir » au lieu de « dur à cuire ». :wink: