REALISATEURS
Albert & Charles Band
SCENARISTE
C. Courtney Joyner, d’après une idée de Charles Band
DISTRIBUTION
Jeffrey Combs, Yvette Nipar, Brian Thompson, Jay Acovone…
INFOS
Long métrage américain
Genre : fantastique
Année de production : 1992
Selon la version qui circule le plus sur le net, Doctor Mordrid, l’une des meilleures productions Full Moon, est né de la perte des droits cinématographiques du Dr Strange de l’éditeur Marvel Comics par le producteur/réalisateur/scénariste Charles Band (Puppet Master). Band aurait alors décidé de faire réécrire le script existant en incorporant des éléments du Dr Mortalis, un concept sorti de l’imagination du King Jack Kirby dans les années 80. En effet, Kirby avait à l’époque bossé sur quelques idées de films pour Empire, la société précédente de Charles Band, avant de quitter le navire.
Pourtant d’après le scénariste C. Courtney Joyner, l’histoire est tout autre. D’après lui, Band n’a jamais eu les droits pour développer un film Dr Strange (même si ça ne m’aurait pas vraiment étonné tant les droits Marvel se monneyaient pour des bouchées de pain à l’époque…voir Spider-Man et Captain America chez Cannon et Les 4 Fantastiques chez Roger Corman). Mais en tant que grand fan de Marvel, il voulait mettre en chantier un long métrage retrouvant l’atmosphère de la bande dessinée. Joyner a donc été chargé d’écrire un script avec cette idée en tête…tout en s’inspirant de Kirby et du Dr Mortalis.
Et franchement, tout en s’éloignant bien entendu du comic-book Marvel (le Dr Mordrid est ici un sorcier d’une autre dimension chargé de défendre la Terre contre les plans démoniaques de son frère Kabal), Charles Band, ici co-réalisateur avec son paternel Albert, réussit une meilleure (non)adaptation que le dessin animé Dr Strange sorti en 2007.
Cela se voit par exemple par le soin apporté aux décors, et notamment le « Sanctum Sanctorum » de Mordrid, l’un des plus beaux plateaux jamais construits pour une production Full Moon, avec une patine solennelle qui accepte sans problème une touche de modernité apportée par un petit mur d’écrans de télévision à la Ozymandias.
Toutes les figures imposées d’un ésotérisme un peu cheap sur les bords, à cause d’un budget pas mirobolant, mais tout à fait charmant sont là : formules et potions magiques, portails interdimensionnels, île suspendue dans les airs dans les limbes d’une autre dimension…
Les effets spéciaux sont l’oeuvre du regretté David Allen, solide artisan héritier des Willis O’Brien et Ray Harryhausen, qui, entre autres, réanime dans le dernier acte les dinosaures d’un musée pour un affrontement de très belle facture.
Dans le rôle-titre, on retrouve un vieux routier de la série B, Jeffrey Combs (Re-Animator), pour l’un des ses rares premiers rôles de héros. Il délivre sa prestation la gravité requise et beaucoup de charisme. Son frère ennemi, Kabal, campé par le massif Brian Thompson, est un peu plus daté avec sa coupe mulet et son look de chanteur de hard-rock des années 80…mais bon, c’est le genre de personnages qui lui colle comme un gant et qu’il peut jouer dans son sommeil. La jolie Yvette Nipar campe l’alliée (au début) un peu réticente de ce bon docteur.
Marque des films estampillés Full Moon, Doctor Mordrid boucle son histoire en 70 minutes, ce qui permet d’éviter trop de temps morts (bien que la scène du commissariat aurait mérité d’être un peu raccourcie). Le manque de moyens se fait tout de même de temps en temps sentir, notamment dans la résolution du face-à-face final, assez abrupte, mais cela ne gâche pas le plaisir de visionnage de cette épatante petite série B, pétrie de chouettes idées et vrai/fausse adaptation du Dr Strange…en attendant bien entendu la future superproduction de Scott Derrickson avec Benedict Cumberbatch.