REALISATEUR
Francis Ford Coppola
SCENARISTE
James V. Hart
DISTRIBUTION
Gary Oldman, Winona Ryder, Anthony Hopkins, Keanu Reeves, Cary Elwes, Richard E. Grant, Bill Campbell, Sadie Frost, Tom Waits, Monica Bellucci…
INFOS
Long métrage américain
Genre : horreur/romance
Année de production : 1992
Francis Ford Coppola a souvent déclaré qu’il a passé la majeure partie des années 80 à travailler pour éponger les dettes de l’échec cinglant de son drame musical Coup de Coeur sorti en 1982. Des films comme Outsiders, Rusty James, Cotton Club, Peggy Sue s’est mariée, Jardins de Pierre ou encore Tucker ont connu des fortunes diverses, sans véritablement faire de vagues au box-office. Si Coppola a accepté de la proposition de la Paramount de tourner Le Parrain III, c’était principalement pour raisons financières car pour le réalisateur, les deux premiers volets de la saga avaient déjà raconté l’histoire complète de la famille Corleone.
Le Parrain III a reçu des critiques mitigées, mais le film fut tout de même rentable. Il fallut tout de même attendre le début des années 90 pour que Francis Ford Coppola connaisse l’un des plus gros succès de sa carrière avec sa relecture du roman Dracula de Bram Stoker. Le projet lui a été apporté par Winona Ryder, qui avait précédemment quitté la production du Parrain III quelques jours avant le début du tournage. Ecrit par James V. Hart (Hook), le scénario circulait à Hollywood depuis plusieurs années et il était alors question qu’il fasse l’objet d’un téléfilm réalisé par Michael Apted. Coppola a été attiré par la sensualité qui se dégageait de cette adaptation et par l’idée de livrer une version qui serait la plus proche possible de l’oeuvre de Bram Stoker.
C’est ainsi que le film a été vendu à l’époque et de nombreux éléments du livre ont bien été retranscrits fidèlement, comme la narration épistolaire, la chronologie des événements et la course-poursuite de la fin qui est absente des autres adaptations. Mais il y a aussi de nombreux changements, car une transposition « à la lettre » aurait donné un rôle minime à Dracula, le roman de Bram Stoker étant surtout centré sur les chasseurs de vampire. Ce n’était pas la première fois que le comte était présenté comme un personnage romantique (voir par exemple le Dracula de John Badham en 1979…dont je ne garde pas un très bon souvenir, mais comme ma seule vision remonte à une quinzaine d’années, je ne m’étendrais pas sur le sujet), mais ici la romance est la caractéristique principale du script.
Dracula et Mina Harker sont en effet liés par delà les siècles, l’anglaise étant la réincarnation d’Elisabeta, la bien aimée de celui qui était alors connu sous le nom de Vlad Dracul et qui s’est suicidée parce qu’elle croyait à tort que son mari était mort pendant la guerre contre les Turcs. Quand il apprend qu’Elisabeta ne recevra pas les sacrements de l’Eglise pour avoir pris sa propre vie, Vlad renonce à Dieu avec colère et vend son âme au Diable. S’il est devenu immortel, s’il s’est maudit, s’il est devenu un monstre, c’est parce qu’il juge que l’Eglise l’a trahi…et c’est aussi et surtout par amour.
Une belle idée, qui donne lieu à des scènes émotionnellement très fortes…mais qui fonctionnent beaucoup moins lorsqu’on les remet en parallèle avec les éléments du roman. Le triangle amoureux formé entre Mina, Dracula et Jonathan Harker n’est pas vraiment convaincant et les tourments de la jeune femme, partagée entre ses deux amours, apparaissent alors bien confus…
Le scénario a quelques problèmes, mais visuellement ce Dracula est absolument somptueux. La production est séduisante à bien des niveaux : les costumes et les décors sont superbement travaillés, la photographie est éblouissante, la musique diffuse parfaitement ce parfum de romance gothique et le rejet des images de synthèse pour privilégier des effets spéciaux « à l’ancienne » (rétro-projection, miniatures, matte-paintings, perspectives forcées…) est pour beaucoup dans l’étrange beauté du long métrage qui ne manque pas de plans époustouflants, aux qualités presque lyriques. Même les hommages de Coppola (on reconnaît des références au Nosferatu de Murnau et à L’Exorciste de William Friedkin par exemple) s’intègrent bien à l’ensemble…
L’interprétation est par contre un peu plus inégale. Gary Oldman est vraiment très bon, et pourtant je le préfère tout de même lorsqu’il incarne le comte dans ses apparitions les plus monstrueuses (et il est stupéfiant en vieillard emperruqué dans le premier acte). Anthony Hopkins est quant à lui insupportable en Van Helsing grossier et maniaque, qui se met presque à dos l’équipe qu’il est censé inspirer. Mais le plus mauvais acteur de la distribution (qui comprend notamment Cary Elwes, Richard E. Grant et Bill « Rocketeer » Campbell) reste Keanu Reeves en Jonathan Harker, qui a livré là l’une de ses prestations les plus catastrophiques tant il a l’air complètement à côté de la plaque pendant tout le film. Une jolie erreur de casting…ce que Coppola et Keanu lui-même ont reconnu par la suite !