Un très beau film injustement méconnu de la filmographie de Spielberg (un des rares à avoir fait un bide au box-office) plus intimiste qu’à l’accoutumée malgré l’événement historique dont il est question, car il retranscrit la grande Histoire à travers le biais de la petite histoire, à savoir la seconde guerre mondiale perçue par un enfant (joué par le tout jeune Christian Bale) un choix qui a tendance à lui valoir des comparaisons récurrentes avec Le Tombeau des lucioles, ce qui est assez logique vu le prisme choisi.
Cette adaptation du roman de Ballard (Crash) permet également d’aborder ce conflit avec une vision plus réaliste et dramatique qu’avant pour le réalisateur (1941) qui se révèle très inspiré sur le sujet, notamment au niveau de la mise en scène admirable dans la gestion de l’environnement et de l’espace (le ralenti avec le gosse qui croit que le pilote le salue ).
Momentanément orphelin, James/Jim devra faire tout ce qui est possible dans ce contexte pour s’adapter et ainsi survivre coûte que coûte, entouré qui plus est par les modèles discutables (Basie) du camp où il se trouve, qui lui servent de substituts des parents disparus.
Le jeune héros se démarque par son rapport particulier et subjectif à l’événement, ce qui permet de l’aborder d’une manière assez rarement vue auparavant, Jim se détourne de tout cela, préférant la fuite dans son imaginaire réconfortant pour échapper à l’horreur du quotidien qui l’entoure perpétuellement (réarrangeant la réalité, interprétant à sa façon, créant une vision décalée qui apporte sa spécificité singulière à l’oeuvre).
Fasciné par les avions, il est du coup un des seuls à ne pas les considérer comme des engins de mort (allant même jusqu’à assimiler la bombe A à une intervention divine).
Cette tentative dérisoire se révèlera vaine puisque le gamin sera en fin de compte rattrapé par la réalité, donnant lieu à un constat amer qui fait que le happy-end semble très relatif.
Le réalisateur signe là un film humaniste et émouvant (qui souffre toutefois d’un ventre mou persistant) portant sur la perte de l’innocence, et le fait de grandir trop vite, quand on voit le regard de Bale à la fin, on se dit qu’il est devenu prématurément un adulte, du moins qu’il n’est dorénavant plus un enfant.
Le film marque ainsi une étape symbolique, importante (c’est compréhensible du coup qu’il ai eu du mal avec Hook qui le forçait à revenir vers un cinéma de divertissement plus positif et optimiste, avec justement un trajet inverse puisque le vieux Peter Pan apprend à renouer avec sa part d’enfance) qui amorce un virage crucial dans sa carrière, qui s’accentuera avec La Liste de Schindler et plus largement toute la période post-11 septembre de sa filmographie.