Donc les gens dont tu parles ici qui n’ont pas Internet (et qui manifestement ne vont pas non plus dans les médiathèques où on trouve souvent un ou deux postes Internet), qui ne vont pas en librairie (un comble pour qui s’intéresse aux livres), ni ne fréquentent les forums, finalement qui ne s’intéressent au sujet qui les intéresse ; et en tout cas pas à la BD ou plus particulièrement à la BD d’origine américaine, donc ces gens-là, auraient un problème avec les sorties trop nombreuses ?
Là sérieusement, je suis perdu.
Edit : Je doute quand même que le « lecteur » dont tu dresses ici le portrait ait conscience de la soi-disant saturation du marché.
Edit 2 : Je me demande comment la « notoriété » d’une BD pourrait parvenir à ce lecteur d’ailleurs.
Edit 3 :
Boulimique ?
Sans vouloir manquer de respect à qui que ce soit on est là, du côté de la « pathologie », plus que du côté du plaisir de la lecture.
Pour ma part je préfère avoir un plus grand choix qu’un choix restreint (d’autant qu’en fait, vu la piètre qualité de ce qui sort (rapporté à mes goûts s’entend), le choix est tout aussi restreint quand on enlève ce qui ne me plaît pas ).
Pour rester du côté de la BD U.S. je suis plutôt content de voir arriver Copperhead, Sheltered, Roche Limit, ou encore la série Glory de **Keatinge ** (déjà sortie je sais c’est un exemple) (liste non exhaustive) des titres à partir desquels je vais pouvoir choisir (et pas forcément tout pendre).
Seront-ils rentables ?
Je ne sais pas.
L’auraient-ils été s’il y avait moins de sorties ?
Je ne vois pas pourquoi.
Je pense que l’expression que tu cherches est « les gens normaux ». Et que tu ne te rendes pas compte à quel point tes propos sont méprisants pour 99,9% de l’humanité est un poil perturbant.
Il y a une nuance qui semble t’échapper entre être intéressé par et passionné de. Il y a aussi des fractures (générationnelles, sociales…) qui font que tout le monde n’a pas le même réflexe d’utilisation des mêmes outils. Il y a enfin le fait que certaines personnes ont des vies dans le cadre desquelles elles n’ont pas le loisir, voire le luxe, de répondre à ton idéal.
Je ne sais pas à quoi ressemble ton entourage, mais perso (si j’excepte les personnes que j’ai connues par le biais d’un forum, justement), si je regarde autour de moi, je vois pas mal de lecteurs et/ou de « consommateurs de bien culturels » réguliers, voire « gros » (et déjà je sais que ce n’est pas forcément la norme partout…), mais dans le tas il y en a grand maximum quatre ou cinq susceptibles de répondre à tes critères. Ils ne sont pas incultes pour autant.
La conscience de la saturation du marché au sens de la compréhension des logiques éditoriales et économiques profondes à l’œuvre, ça demande d’être un minimum plongé dans le sujet, mais l’impression d’être perdu devant un océan de bouquins (ou de disques, ou… etc.) quand on veut, ou qu’on ne peut que, en acheter un ou deux, ça t’est vraiment inimaginable ?
Pour reprendre l’exemple des gens qui m’entourent : ils vont plus ou moins occasionnellement dans une Fnac ou un Cultura, plus rarement en librairie (a fortiori en librairie spécialisée) ; ils voient ce qui est mis en avant (sur les présentoirs, à l’affiche…) ; il y a les échos des grosses sorties dans les médias de masse, éventuellement les rubriques simili-spécialisées de la presse généraliste ; ou encore les phénomènes d’engouement (dans le cas des comics) créés par une adaptation ciné ; mais surtout, il y a le bouche à oreille, les conseils donnés par un proche, ami ou membre de la famille.
Évidemment, l’effet pervers, c’est qu’à l’exception de la dernière citée, et encore (disons qu’il faut avoir dans ses relations quelqu’un capable de donner de bons conseils), on est dans des mécanismes où le succès appelle le succès.
En tant que client je pense la même chose. Par contre la surproduction est problématique en ce sens qu’elle ne peut être permanente et que le retour de bâton peut faire très mal
Tu as trop tendance à prêter des intentions à tes interlocuteurs.
Nous parlons ici d’un marché où il y aurait trop de titres.
Comment quelqu’un qui n’a ni l’Internet, ni ne fréquente les librairies, ni les forums de BD serait à même de ressentir l’affluence des titres en allant à l’occasion et seulement dans le rayon BD d’un supermarché ,
De quoi parle-t-on ici ?
Quel idéal, qui parle d’idéal ?
Mon sujet concerne la possibilité d’avoir plus ou moins de choix dans un domaine donné, la BD, ou @Jim_Laine & @KabFC dise qu’il y trop de titres.
Et moi je dis qu’on est pas obligé d’acheter tout ce qui sort, qu’on peut différer, faire des choix, avoir un budget.
Quels critères ? Quels incultes ,
De quoi parles-tu ?
En ne fréquentant que le rayon BD d’une grande surface ?
Je pense que tout le monde ici préfère avoir trop de choix que pas assez.
Et de ce point de vue ça fait des années que je répète en d’autres lieux que, en tant que lecteurs / auditeurs / spectateurs / consommateurs, on vit un âge d’or dans le sens où aucune génération avant celle-ci n’a pu jouir d’un accès aussi large et facile à un vaste choix d’œuvres issues d’époques, de cultures et de genres différents (qu’il s’agisse de livres, de BD, de musique, de films, etc.).
Ça n’empêche pas la conscience, d’une part, effectivement, que cette situation quasi idyllique du côté de la « réception » l’est nettement du côté de la production, et que donc il y a un risque que ça nous retombe aussi sur la gueule au bout d’un moment ; et, d’autre part, que ce n’est pas parce que l’offre est là que tout le monde est égal dans la demande.
Je me reconnais assez dans ce que dit Jim.
(je suis allé même plus loin que jim en arrêtant franco belge et Manga pour le comics mais aussi pas mal de ce qui est bouquins)
Pour Artemus, il y a pas mal de gens dans mon entourage qui achètent pas mal de biens culturels mais qui ne sont pas « passionnés ».
Même en lecteur de comics, j en connais qui ne suivent pas les forums ni les plannings des éditeurs… qui achètent le jour venu et selon ce qu’il y a sur l’étal.
Je pense par contre (c est juste perso sans chiffre à l appui) que si la production augmente dans les produits culturels… je ne suis pas sur qu’il y ait plus de consommateur mais plus que les éditeurs se battent pour l argent d une frange des acheteurs que nous sommes… le nombre de rééditions avec des bonus,remastering, repackaging, directorat cut… me fait quand même penser qu on vend énormément aux même acheteurs
Que tu puisses écrire ce que tu écris sans intention (donc sans un minimum de réflexion ?) ne me semble pas une hypothèse particulièrement rassurante. Mais tu vas encore dire que je surinterprète.
Passer aux abords du rayon BD de n’importe quelle Fnac d’une grande ville me semble une expérience suffisamment éclairante pour ce qui des effets, à défaut des causes.
De l’évolution du marché comics, si je me fie au titre du topic. Et qui dit « évolution du marché » dit considérer le large public, et pas seulement une poignée de lecteurs « spécialistes » / « éclairés » qui peuvent passer, en plus de leur temps de lecture des œuvres elles-mêmes, des heures sur le net [size=85](que ce soit sur leur propre accès Internet ou en médiathèque, même si j’ai quelques doutes quand au fait que les postes informatiques y servent majoritairement à ça…)[/size] à écumer reviews, blogs et forums…
Quand tu mets systématiquement des guillemets qui dénient à ces gens qui ne procèdent pas selon ton modèle le titre de « lecteurs », c’est sans intention ? Genre, ton doit a rippé sur la touche ?
Mais « passionnés », lecteurs occasionnels ou autre chose ça n’a pas d’importance.
Je dis que pour un lecteur qui ne suit pas les sorties - et il fait bien ce qu’il veut pour ma part je n’en ait rien à faire- je me demande comment il peut être conscient qu’il y a trop de titres.
Ce ressenti ne peut apparaître que chez quelqu’un qui justement à une connaissance des sorties et qui est suffisamment passionné.
Mais en tout cas ce n’est pas mon propos, qui est de dire que pour moi, je suis intéressé par ce qui sort et que j’arrive à faire des choix.
Si d’autres voient les choses autrement, qu’est-ce que je peux y faire ?
Et que je ne vois pas de lien entre les différentes sorties qui ne s’adressent pas forcément au même lecteur et des livres peu « rentables ».
Tu veux dire qu’interpréter que je suis méprisant pour « 99?9% de l’humanité est un poil perturbant » alors que je parle de tout autre chose, est une interprétation que je vais cautionner ?
De l’humanité !!
(99,9 %, c’est bien en dessous de la vérité)
@Jim_Laine - à qui je répondais - précise supermarché.
(Parce que c’est là que ça se passe, je réponds à quelqu’un en vertu de ses arguments, et avec les miens).
Je répondais à @Jim_Laine dans le cas d’exemples précis, qui lui-même me répondait.
Une sorte de conversation où il est question d’avoir l’impression ou pas, d’un marché disons saturé, donc de faire plus que lire une BD mais de s’intéresser aux sorties par exemple.
Non parce que pour moi quelqu’un qui fait ses achats BD dans une grande surface n’est pas un lecteur mais un consommateur.
Un peu comme quand j’y achète des haricots verts, ça ne fait pas de moi un jardinier.
Ecouter de la musique ne fait pas plus de moi un mélomane, ni aller au cinéma un cinéphile. Suis-je méprisable pour autant ?
Est-ce que je méprise les gens qui écoutent de la musique sans être mélomanes, les gens qui vont au cinéma sans être cinéphiles ?
Pas le moins du monde.
Et il n’est pas pire ou mieux d’être lecteur ou consommateur, mais c’est simplement différent.
Mais je doute fort qu’il ait conscience (le consommateur qui ne fréquente que son supermarché pour acheter ses BD) de l’avalanche de titres dont on parle ici.
Qui est le cœur du débat plutôt que l’analyse des propos des autres en leur faisant dire ce qu’il ne disent pas.
En outre le systématiquement est en trop (cela dit ce n’est pas non plus comme si c’était la seule chose en trop).
Maintenant si tu as un souci avec ma prose je te propose de ne pas me lire et d’éviter de me répondre (surtout quand je ne m’adresse pas à toi).
Ne te donne pas la peine de répondre d’ailleurs, je vais derechef m’appliquer mon propre conseil en ce qui te concerne.
Bien sûr. D’ailleurs, on l’a dit avant, ceux qui se plaignent de la surproduction sont d’abord les auteurs. ensuite certains éditeurs. Les libraires (mais les libraires sont comme les paysans du sketch de Fernand Raynaud, ils se plaignent, c’est normal…). Les lecteurs, non. Car ils font des choix. Ceux qui expriment un « malaise », c’est les anciens boulimiques (moi, j’ai été un boulimique de comics, je suis sûr que les lecteurs appartenant à la génération manga ont été boulimiques aussi).
Mais je crois qu’il faut aussi voir une chose : le grand public se compose de lecteurs qui ne sont pas « spécialistes » ou « pointus » ou ouatéveur. Le lecteur de XIII ou Largo Winch n’est pas un spécialiste. Il achète cinq ou dix BD par an, mais il est suffisamment nombreux pour que ce genre de titres fasse un carton. Mais ce n’est pas un spécialiste, ni un boulimique.
J’en doute aussi. Les premiers signaux d’alarme, justifiés ou non, sont venus des professionnels. En revanche, les bédévores, eux, en parlent depuis longtemps.
Entièrement d’accord. Et là aussi, je me reconnais là-dedans.
C’est pas pour rien que j’emploie la métaphore du drogué.
Durant ma première période de chômage (qui, pour la petite histoire, succédait à mon divorce, autant dire que c’était pas la joie), mon « shoot » mensuel de comics de super-héros m’a beaucoup aidé.
Vous avez beaucoup parlé, dit plein de choses auxquelles j’ai envie de répondre, mais il est tard et je vais y répondre demain.
Cependant :
Rajoutons à cela que le développement d’un marché de première main est toujours lié au développement d’un marché de seconde main. À Paris, dans les grandes villes universitaires mais également dans des agglomérations provinciales plus modestes, il y a de nombreux points de ventes, anciens ou nouveaux, qui ont développé voire créé des rayons de soldes, pour la BD (mais aussi les romans, les beaux livres, blablabla).
En tant que consommateur, je me fournis aussi en solderies, en bouquineries, ce genre de choses. Et je trouve pas mal de produits : plus de production en amont génère beaucoup d’achats (qui génèrent des reventes) mais aussi des invendus (qui génèrent des stocks à pas cher dans certains chaînes).
Y a donc moyen de goûter à des choses auxquelles on n’aurait peut-être pas goûté au prix fort.
Et tu oublies les sites de reventes en ligne comme leboncoin, source de mes principaux achats de librairie aussi.
Mais en fait je ne parlais pas vraiment des lecteurs quand j’ai fait ma remarque (même si un peu tout de même), je refléchissais surtout poru les éditeurs et les comicshops. Pas plu tard que samedi, j’assistais à la découverte des oeuvres d’un comicshop et de sa prochaine commande de bouquin et qui se dit à chaque fois qu’il y a encore une nouvelle série indé « encore ? Pff, j’en prends un et on verra… » ou « Ca, ça ne vendra pas, je n’en prends pas ».
J’en ai pas mal discuté avec mon vendeur qui m’affirme que les oeuvres indés tu as quelques best sellers mais après… néant, la plupart repart en retour. J’ai aussi quelques retours de vente (par exemple, on m’a expliqué que Lazarus a des ventes catastrophiques).
Donc si tu as des grosses oeuvres qui flanchent déjà, pourquoi continuer à proposer 2-3 nouvelles séries tous les mois (je parle de série et pas de one shot) alors que le marché semble déjà saturé ?
Je ne sais pas mais ça va peut être un peu trop vite à mon gout là.
Et pour ma part tant pis, je fais des choix mais si j’en suis réduit à là alors que j’ai un énorme budget bd par mois (autour de 400 par mois), je n’imagine même pas pour les budgets plus serrés…
pourquoi pas pour le constat mais alors que faire de tous ces titres s’il devait en avoir moins ? Ne pas les publier ?
Est ce à dire que la qualité baisse à tant produire ? et dans le cas contraire où il y aurait de plus en plus d’auteurs compétant voulant publier, diminuer les publications se ferait alors sur quel critère ?
Parce que certains lecteurs n’achètent pas par défaut.
ce n’est pas parce que Urban vend du Green Lantern par Johns que je vais en prendre même s’il n’y a que ça.
Par contre je vais acheter Glory (par exemple) parce que ça me plaît (ou disons que ça risque de me plaire). Idem pour Lazarus.
Pourquoi : « tant pis, je fais des choix » ?
Ben non, j’ai un budget 4 fois inférieur et compte tenu du temps que j’ai pour lire (et du fait que je ne lis pas que de la BD) et du temps que je passe à écrire sur ce que je lis (et pourtant en ce moment j’ai du temps), de ce qui sort et qui est susceptible de ma plaire plus (pas beaucoup de choses en définitive) de « l’échelonnage » de mes achats (pas souvent de neuf), et de l’utilisation assez intensive d’une médiathèque ; 100 euros/mois c’est suffisant.
Et pourtant Glénat a sorti 4 tomes déjà, alors soit les infos sont erronées, soit **Glénat ** soutient vraiment beaucoup les séries qu’il publie au point d’en continuer la publication malgré des ventes catastrophiques.
La question du choix ne couvre pas le spectre des lectures pulsionnelles. Je n’ai jamais tout acheté. J’ai toujours opéré un choix dans mes lectures basées sur mes préférences mais j’avais la possibilité d’acheter tout ce que je choisissais de lire.
Par contre à mesure que les années passaient et que je devenais un cœur de cible de plus en plus sollicité par les sorties, je me suis retrouvé à ne plus pouvoir acheter tout ce que j’aurais eu envie de lire.
Et là cela a eu un effet paradoxal : quitte à ne pas avoir tout ce qui m’intéressait autant ne rien avoir.
(tiens, je connais la boutique qu’on voit sur l’une des photos : chouette endroit, d’ailleurs, dans mon souvenir.)
Je pense que ça déteint aussi sur la BD, notamment franco-belge.
Je vais faire une comparaison qui est peut-être maladroite ou inadaptée, mais il me semble qu’elle est explicite.
Il y a trente cinq ans, on avait trois chaînes télé. Tout le monde regardait la même chose. Quand un film passait, la France entière le voyait. Dans la cour de récréation, on en parlait tous. Aujourd’hui, sans même compter les bouquets, on a vingt-quatre (ou vingt-six, chaiplus) chaînes. Fatalement, l’offre s’étant élargie, chaque programme est « moins » regardé. L’attention du public est répartie sur les différentes propositions.
Je crois que dans l’édition, c’est la même chose. La « génération Strange » a lu la même chose. Aujourd’hui, on ne lit pas tous la même chose, le tronc commun se réduit. Les références sont éparpillées.
On me rétorquera qu’il y a l’évolution du public, qu’une offre élargie peut attirer un nouveau lectorat (d’une certaine manière, l’arrivée de Vertigo en est la démonstration, puisqu’elle a attiré vers les comic books des lecteurs précédemment allergiques aux super-héros), qu’on ne peut pas comparer l’incomparable, tout ça.
Cela dit, reconnaissons aussi que le public s’est réduit, en tout cas en ce qui concerne les super-héros. Les cent cinquante mille ventes de Strange en 1980 constituent un sommet, aujourd’hui inaccessible (les meilleures ventes en kiosques, c’est quinze ou vingt mille, les meilleures ventes en libraires, c’est vingt ou trente mille, et ça se passe souvent à Gotham…).
D’un autre côté, il y a douze ans, une bonne vente de Batman, c’était cinq mille. Donc un public a entre-temps été convaincu, séduit et fidélisé. Ce qui veut dire que la tendance à la baisse n’est pas une fatalité.
Mais, justement, Batman rentre assez bien dans le schéma dont nous parlons, à savoir que les grosses licences vendent bien, et que les petits produits ont du mal à s’imposer. Batman (ainsi que les X-Men et Spider-Man) fonctionnent ainsi, attirant la médiatisation, le public, les ventes. Si l’on élargit aux comic books en général, on a le grand contre-exemple de Walking Dead, petit produit qui a surpris tout le monde. Mais qui, depuis lors, est à son tour devenu une licence éclipsant le reste et générant du produit dérivé.
Donc oui, ma comparaison n’est peut-être pas la plus ingénieuse qui soit, mais je crois qu’elle explique en partie les mécanismes menant à la situation d’aujourd’hui : l’offre est plus vaste, et la demande doit trouver où s’ancrer, et s’ancre sur des « valeurs sûres ».
Zactement.
Je crois que nous tous, ici sur ce forums, nous sommes davantage des exceptions qu’une norme. Nous sommes « plongés » dedans (la BD, le ciné, les bouquins, ouatéveur).
C’est le constat auquel je suis arrivé à force de fréquenter les salons comics, que ce soit en tant qu’éditeur, scénariste ou essayiste. Même si j’avoue qu’il me semble que le public s’élargit un peu depuis quelque temps.
Ah je ne suis pas d’accord.
Le passionné se tient au courant (dans les années 1980, il lit des fanzines, aujourd’hui, il va sur des forums, lit des blogs…). Le lecteur occasionnel n’a pas la même perception du marché, c’est normal.
Les libraires ne peuvent pas pousser les murs, tout simplement. Donc ils prendront une pile de Walking Dead parce qu’il faut bien payer les factures (et si tu n’as pas le produit porteur, le lecteur « boulimique » qui ne peut pas attendre ira l’acheter ailleurs), et ils prendront un ou deux exemplaires de la dernière série indé, ou d’un recueil EC Comics d’Akileos… et peut-être même que certains trucs plus obscurs, ils n’en prendront pas du tout. Et de tout ce qu’ils reçoivent dans la semaine, ils n’auront peut-être pas la place de tout mettre en présentoir, et ils rangeront les arrivages en rayon.
Pas assez de place, peu de visibilité… ça impacte sur les ventes.
Il y a des années, un pote à moi, dessinateur, sort son premier album. L’un de nos potes communs, lui-même libraire, lui dit « bon, j’en commande soixante ». Le pote dessinateur s’inquiète : « attends, c’est mon premier bouquin, je ne suis pas connu, tu vas te prendre plein de retours, tu vas tout renvoyer ». Le libraire explique : « écoute, je vais en mettre deux en vitrine, et je vais faire une pile de cinquante-huit exemplaires à l’entrée. Les lecteurs vont voir la pile, et vont tenir le raisonnement suivant : ‹ s’il en prend autant, c’est que ça marche, si ça marche, c’est que c’est bon, et si c’est bon, faut que je l’aie ›. Et comme ça, je vais en vendre beaucoup, en garder maxi quatre en rayon, et je n’aurais quasiment pas d’invendus ».
Et il se trouve que ça a marché.
Je n’en suis pas sûr.
L’endroit où l’on achète les produits n’a pas grand-chose à voir avec ce que nous en faisons.
Je crois que l’on peut dire d’un supermarché que c’est un boutiquier, pas un libraire, mais je ne pense pas qu’on puisse qualifier l’acheteur en supermarché de quoi que ce soit. La boîte de haricots verts, si on l’achète en supermarché, on est un consommateur, mais si on l’achète chez un traiteur, on est un gourmet ? Je ne crois pas.
Personnellement, j’achète des BD en supermarché (le Leclerc auquel je vais parfois, mais il est loin toussa toussa… a un bon rayon qui ressemble à une « vraie » librairie), je ne crois pas que je sois davantage un consommateur que si j’achète chez un libraire généraliste ou chez un libraire spécialisé.
J’aurais tendance à dire que je suis, à chaque fois, consommateur quand je passe à la caisse et lecteur quand je tourne les pages.
Vous voyez pourquoi je l’aime bien, l’Oncle Hermès, malgré sa tête de bois ?
À défaut d’être erronées, ces infos trahissent peut-être des attentes déçues.
Par exemple, l’éditeur avait peut-être des attentes plus élevées en matière de vente. Peut-être aussi que le libraire avait des attentes plus élevées, a commandé beaucoup d’exemplaires, et a dû en retourner plus qu’il n’avait envisagé.
Dans le premier cas, l’éditeur cale le tirage des tomes suivants en fonction du succès plus ou moins grand du premier, parvenant dans une certaine mesure à équilibrer son bilan d’exploitation. Dans le second cas, le libraire est échaudé, prendra moins d’exemplaires (là aussi calant sur ses ventes précédentes), mais conserve le souvenir, plus ou moins cuisant, d’espoirs mal récompensés.