FILII t.1-3 (Thibaud De Rochebrune)

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2 I, donc 2 tomes !

Tout commence à la suite d’une prise d’otages qui finit en explosion ravageuse. Les agences américaines croient à un attentat terroriste et enquêtent. On soit donc deux représentants des autorités qui assemblent divers éléments et se retrouvent très vite confrontés à des éléments qui lorgnent vers le surnaturel.

Parallèlement, dans les pays de l’Est, un biologiste et sa fille sont enlevés par des jeunes ferrailleurs qui cachent visiblement leur jeu. Les deux affaires sont liées, et le vieux savant s’avère en réalité un ancien informaticien de génie ayant profité de l’aide de l’Occident pour passer le rideau de fer. Le spectre de la guerre froide ressurgit.

C’est sur ces bases que Thibaud de Rochebrune tisse un récit d’espionnage, mobilisant différentes thématiques modernes (le terrorisme, la sécurité d’État, la corruption, les virus informatiques) dans un récit assez rapide, au rythme de séquences soutenu.

Graphiquement, même si le dessinateur propose un trait un peu vert et pas encore affirmé (comme il l’est davantage dans Inhumain), on sent une grande maîtrise de la narration et des emprunts à la génération de Mathieu Lauffray ou Benoît Springer. Les visages de ses personnages sont beaux et expressifs et la composition des planches joue agréablement sur la taille des cases et la succession de plans bien articulée.

Jim

Ayant enlevé le professeur, désormais séparé de sa fille, les « terroristes » procèdent à l’extraction d’un malade plongé dans le coma. Mystère mystère.

Parallèlement, les deux agents dont nous suivons, dans le monde entier, les investigations, suspectent leur supérieur de les envoyer sur des pistes peu fiables. On est donc dans le registre du thriller d’espionnage, mais on découvre petit à petit les capacités hors norme de certains membres de ce groupe d’activiste. Au milieu des fusillades, l’intrigue permet de mettre en avant la télépathie, la télékinésie, et de faire basculer le récit vers autre chose : la série, c’est du crypto-super-héros.

L’un des thèmes est donc l’émergence d’une nouvelle race d’humains, évoquée par un petit gag récurrent, celui du nom à donner à cette nouvelle espèce. Parallèlement, l’auteur fait une comparaison entre un virus informatique et une nouvelle souche biologique, les deux cherchant un biotope où prospérer.

Jim

L’objectif des « terroristes » devient clair : viser un bâtiment fédéral. Les protagonistes découvrent petit à petit qu’il s’agit du Pentagone, et plus précisément du réseau de serveur informatique du bâtiment.

Dans le même temps, les deux agents ont mis au jour un réseau de corruption au sein même des services américains, ce qui a pour conséquence de ralentir leur action : ça tombe mal. On va apprendre qu’en fait, tout est lié, et que les agents ont été « baladé » afin de faire tomber quelques pommes pourris de l’arbre de la CIA, et donc de faciliter la tâche de ceux qu’ils traquent.

Petite série qui semble être un peu passée sous le radar, Filii brosse le portrait d’un groupe harcelé et stigmatisé, mais qui décide de mener une lutte pour la survie en tentant, dans la mesure du possible, de minimiser les pertes humaines. C’est cette surprenante dimension qui attire l’attention des enquêteurs, de plus en plus persuadés que les méchants ne sont pas ceux qu’on croit. La fin du troisième volet dévoile le maître-plan et jongle également avec le thème de l’immigration. Astucieux.

Au fil des trois tomes, on voit aussi le dessin s’affirmer. Si les personnages restent encore un peu courtauds et tassés, les décors en imposent et la narration reste claire. À redécouvrir.

Jim