Mais c’est avec Creatures on the Loose #33 que l’intrigue prend un tournant différent. En effet, l’épisode marque l’arrivée d’un nouveau scénariste, David « pas encore Anthony » Kraft, et d’un nouveau dessinateur, un certain George Pérez. Ce dernier, ancien assistant de Rich Buckler, reproduit dans un premier temps certains tics visuels de son mentor, mais son style va très rapidement progresser : regarder de près les Creatures of the Loose de Pérez fait le même effet que la lecture des Iron Fist de Byrne : on voit le dessinateur en pleine formation. Spectaculaire.
Sous la houlette d’abord de Roy Thomas puis de Len Wein, dont l’importance semble grande dans l’évolution de la série, Kraft et Pérez vont appuyer sur l’accélérateur et livrer une saga pleine d’idées et à la surenchère permanente.
Kraft fonce : il montre que Kristine commence à se souvenir (enfin). Il laisse entendre que Kraven a un associé, un mystérieux commanditaire dont les consignes ont tendance à agacer le Chasseur. Et enfin il aboutit à l’arrestation de John Jameson par Simon Stroud.
Mais dès l’épisode suivant, Kraft fait un saut dans le temps et nous montre le Man-Wolf en fuite dans les contrées sauvages de Georgie. Après s’être fendu d’un flash-back dans lequel il fait le lien depuis l’arrestation, il confronte le héros à un projet secret mené par quelques habitants du coin qui n’ont pas hésité à faire dérailler un train afin de le piller.
Dans l’épisode 35, le Man-Wolf découvre que les criminels travaillent pour le Hate-Monger, et se retrouve mêlé à une intervention du SHIELD. Prenant de l’assurance, Pérez commence à livrer des doubles pages de plus en plus spectaculaires.
Nouveau saut temporel dans l’épisode 36, où John Jameson a pour mission d’explorer le satellite du Hate Monger, qui avait été reconquis par les troupes américaines mais qui ne donne plus signe de vie. Sous l’influence de la Lune, l’astronaute se transforme et entre dans la station, où il découvre deux factions : des guerriers aux allures étranges qui semblent y être entrés de manière clandestine, et des humains, qui sabotent la gravité artificielle afin de gêner les déplacements des autres.
Pendant ce temps, sur Terre, Kristine Saunders, qui reçoit des leçons de dessin, est hypnotisée par son professeur. Ce dernier semble emporté par son complexe de divinité, mais on n’en saura pas plus.
Autre subplot , celui de la symbiose entre John Jameson et la pierre qu’il porte au cou. La fin du dernier épisode laisse entendre qu’il n’est plus tout à fait humain, et qu’il est désormais le produit de l’union de deux créatures.
Malheureusement, pour l’heure, les lecteurs n’en sauront pas plus. En effet, la série Creatures on the Loose s’interrompt avec son trente-septième numéro, daté de septembre 1975. Il faudra attendre plus de trois ans, et Marvel Premiere #45-46, pour avoir la fin de la saga.
Les auteurs disposent de deux fois dix-sept pages afin de boucler leurs idées en cours. Kraft et Pérez se concentrent donc sur les raisons de la présence du héros sur Terre, expliquant au passage pourquoi les guerriers présents sur la station semblaient reconnaître sa « gemstone ».
Échoué à la surface de la Lune, le Man-Wolf découvre que son pouvoir y est plus grand : il est plus fort, il peut survivre dans le vide spatial… et il parvient à se diriger, retrouvant au fond d’un cratère un portail dimensionnel qui le conduit… sur un « autre monde ». Dans cet « autre royaume », il est le Stargod, sorte d’élu dont les guerriers locaux attendaient la venue.
Sans renoncer à l’action, Kraft explique que le souverain de ce royaume, avant de mourir, a placé son essence dans une gemme qu’il a dissimulée sur la Lune, de l’autre côté du portail. Si jamais son royaume tombait entre de mauvaises mains, il était donc possible de raviver son énergie et de sauver l’endroit.
Dans le même élan, Kraft explique pourquoi le pouvoir du Man-Wolf s’accroissait : ce n’était pas l’attraction lunaire, mais la proximité du portail dimensionnel. Désormais, sur ce monde, le héros est capable de formuler sa pensée et de s’exprimer, signe qu’il contrôle ses talents.
Le dernier épisode raconte la rébellion menée par Man-Wolf / Stargod contre l’usurpateur, qui s’avère être le professeur de dessin de Kristine, qu’il a enlevée afin de s’assurer un moyen de pression sur le fédérateur des forces rebelles.
Kraft parvient à façonner un récit épique qui mélange fantasy et science-fiction, et à boucler les principales pistes qu’il avait lancées dans Creatures on the Loose . Il trouve même l’espace afin de renvoyer John et Kristine sur Terre, dans l’espoir évident qu’ils poussent vivre des aventures parmi les super-héros.