LA GRANDE LESSIVE (!) (Jean-Pierre Mocky)

Comédie
Long métrage français
Réalisé par Jean-Pierre Mocky
Scénarisé par Jean-Pierre Mocky, Alain Moury et Claude Pennec
Avec Bourvil, Francis Blanche, Roland Dubillard, Michael Lonsdale, Jean Poiret…
Année de production : 1968

Les années 60 ont marqué le boom de la télévision en France. Le petit écran s’est imposé dans de nombreux foyers et une deuxième chaîne a été inaugurée en 1964. En avance sur son temps, Jean-Pierre Mocky montre dans les premières minutes de son neuvième long métrage des familles entières rivées devant leur poste et cela jusqu’à la toute dernière seconde des programmes. Avec pour conséquence, des enfants somnolents et incapables de se concentrer en cours le lendemain…

Le professeur de lettres Armand Saint-Just en a assez. Pour lui, la télé a une influence néfaste sur ses chères petites têtes blondes. Comme ses pétitions sont restées sans suite, il décide de passer à l’action en compagnie de ses amis Missenard, professeur de sport, et Benjamin, ancien artificier. Ce dernier a mis au point un liquide révolutionnaire capable de brouiller les ondes…

Avec La Grande Lessive (!), l’anar Jean-Pierre Mocky s’en prenait une nouvelle fois à ses cibles habituelles…et tout le monde prend cher. Si le professeur Saint-Just campé par un excellent Bourvil (ravi de s’éloigner de ses rôles de gentils un peu naïfs) se présente comme un héros en mission contre les antennes qui ramollissent les cerveaux, l’éducation nationale est montrée comme un peu trop passive face au phénomène. Le président de la chaîne savoureusement interprété par un Jean Poiret au sourire carnassier est un rapace hypocrite qui est bien conscient qu’il ne vend que de la merde à ses téléspectateurs.

Les policiers sont incompétents (avec en tête le duo de bande dessinée lancé aux trousses de Saint-Just et cie) et les bourgeois et la classe ouvrière ne sont pas épargnés. Les premiers par l’intermédiaire d’un irrécupérable alcoolique qui se révèlera être le secrétaire de l’Elysée (Michael Lonsdale est très drôle sans en faire trop) et la seconde par l’incapacité des gens à se détacher de la lucarne, sauf quand on leur propose une chasse à l’homme avec télévision gratuite en récompense.

La Grande Lessive (!) n’échappe pas par moments à la grosse caricature, la construction est foutraque aussi (ce qui était l’une des marques de fabrique du cinéma de Mocky), mais la charge est mordante et les scènes délirantes ne manquent pas, entre comique de situation, quiproquos hérités du vaudeville et dialogues soignés. La distribution est de qualité, Bourvil formant une équipe attachante avec Roland Dubillard et surtout Francis Blanche, irrésistible en dentiste raté et obsédé.

Jean-Pierre Mocky voulait intituler son film Le Tube. Mais ses producteurs l’ont changé en La Grande Lessive car l’adjectif Grand était en quelque sorte à la mode à l’époque (La Grande Vadrouille, Les Grandes Vacances, Le Grand Restaurant…). Il lui était déjà arrivé la même chose avec La Cité de l’Indicible Peur, rebaptisé La Grande Frousse. Comme il ne pouvait rien y faire, Mocky a imposé un (!) entre parenthèses car c’était sa façon de dire qu’il trouvait ça « vraiment trop con » pour reprendre ses propres termes.

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