REALISATEUR
Antonio Margheriti (sous le pseudonyme de Anthony Dawson)
SCENARISTE
Ennio de Concini
DISTRIBUTION
CLaude Rains, Bill Carter, Umberto Orsini, Maya Brent…
INFOS
Long métrage italien
Genre : science-fiction
Titre original : Il pianeta degli uomini spenti
Année de production : 1961
Solide artisan du bis italien, Antonio Margheriti se fait d’abord connaître en tant que scénariste avant de se distinguer comme spécialiste des effets spéciaux tout en signant ses premières réalisations au début des années 60. Touche-à-tout polyvalent, comme la plupart de ses collègues de l’époque, Margheriti s’est illustré dans quasiment tous les genres du cinéma d’exploitation rital, de la S.F. (Le vainqueur de l’espace) au nanar préhistorico-S.F. (Yor, le chasseur du futur) en passant par le western (Et le vent apporta la violence, La Brute, le colt et le karaté…), le sous-James Bond (A077 défie les tueurs), l’horreur gothique (Danse macabre, La vierge de Nuremberg…), le film de cannibales (Pulsions cannibales), le péplum (La terreur des Khirgiz), l’aventure (Les aventuriers du Cobra d’Or), le thriller, la comédie et j’en passe. Filmo pour laquelle l’italien a le plus souvent utilisé son pseudonyme américanisé, Anthony M. Dawson.
Dans le domaine des effets spéciaux, il est à noter qu’il fit partie de l’équipe de techniciens qui travaillèrent sur 2001, L’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick.
Les deux premières incursions de Margheriti derrière la caméra se firent donc à l’occasion de deux longs métrages de S.F. sortis au début des sixties : Le Vainqueur de l’espace en 1960 et cette Planète des Hommes Perdus en 1961.
Des savants basés sur Terre et sur Mars découvrent qu’une planète venant d’un autre système solaire a dérivé de son orbite et se dirige inéluctablement vers la Terre. D’après les calculs du Professeur Benson, celle-ci ne devrait pas percuter la Terre. Ce qui n’empêche pas l’armée d’envoyer des fusées de reconnaissance. À l’approche de l’orbite terrestre, la planète s’immobilise et déclenche des catastrophes climatiques. C’est alors que surgit une armada de soucoupes volantes…
Dans les années 60, le cinéma italien connaît l’une de ses meilleures périodes, son véritable âge d’or selon de nombreux spécialistes. Le cinéma d’auteur, emmené par Fellini, Rossellini et Antonioni (entre autres) engrange les récompenses et le cinéma populaire connaît un énorme succès. Péplum, guerre, aventures, horreur, western…tous les genres sont représentés et attirent de nombreux noms venant d’Angleterre ou d’Amérique, autant de stars en devenir (un certain Clint Eastwood doit sa carrière au western spaghetti) ou en fin de carrière.
C’est le cas de Claude Rains qui incarne l’arrogant scientifique de La Planète des Hommes Perdus. Prolifique comédien britannique, Claude Rains fut révélé à Hollywood par un rôle où son visage ne fut dévoilé qu’à la dernière scène : l’excellent Homme Invisible de James Whale. Il enchaîna ensuite les plus grandes productions, comme Casablanca, Les aventures de Robin des Bois, Le Fantôme de l’Opéra, Le Loup-Garou et Les Enchaînés. Après son escapade italienne, on le revit notamment dans Lawrence d’Arabie avant son décès survenu en 1967.
Son personnage de savant misanthrope et irrascible, dont l’obsession le mènera à la folie, vole la vedette à une distribution un peu fade. Sa théâtralité fait merveille dans de nombreuses scènes dans lesquelles son arrogance est confrontée aux réactions de son entourage, faisant de lui un savoureux modèle de vieil illuminé malgré son tempérament plus que désagréable. Ses interventions dynamisent un ensemble qui manque un peu de relief : pendant la première partie du métrage, Margheriti et son scénariste s’attardent sur les points de vue des membres de la base face à l’arrivée proche de la planète ainsi que sur les rapports divergents entre les savants et l’armée sur la façon de régler le problème. Rien de bien nouveau sous le soleil, relation amoureuse convenue à l’appui. Le scénariste Ennio Concini part également dans des délires qui font office de remplissage, notamment par l’intermédiaire d’une secrétaire/médium dont l’utilité est loin d’être flagrante.
Là où le film se distingue surtout, c’est par son atmosphère particulière, renforcée par une bande-son travaillée et un soin apporté aux décors, qu’ils soient naturels lorsque l’action se passe sur Terre ou les très belles maquettes des scènes spatiales.
Alors que la première partie mise sur l’introspection et les considérations philosophiques, l’action bascule dans le space-opéra un peu cheap quand les forces terrestres doivent affronter une armada de soucoupes volantes venue de la mystérieuse planète qui menace la Terre. Séquences qui auraient mérité d’être un peu plus ramassée afin d’en accentuer l’efficacité. Là, c’est un peu long et pas vraiment convaincant niveau effets spéciaux.
On change encore d’ambiance avec l’intense final qui voit les héros se rendrent sur la Planète avant sa destruction afin d’en découvrir tous les secrets. Grâce à des décors impressionnants, un judicieux travail sur le couleurs sublimé par une très belle photographie, Margheriti ajoute une touche horrifique, presque gothique au climax.
La Planète des Hommes Perdus est un bon représentant de la science-fiction italienne des années 60. Assez irrégulier dans l’ensemble, le long métrage de Antonio Margheriti arrive tout de même à faire oublier ses défauts grâce aux trouvailles de sa réalisation et à la truculence de son interprète principal.