LE DERNIER ATLAS t.1-3 (Fabien Vehlmann, Gwen de Bonneval / Hervé Tanquerelle, Fred Blanchard)

Quelques pages :

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Jim

Le dernier Atlas - Tome 3

Dans l’intrigue de cette uchronie, l’Algérie n’a eu son indépendance qu’à la suite de la catastrophe de Batna, en 1976, qui aurait fait 6.000 morts et conduit au démantèlement du nucléaire mobile, les Atlas, des robots géants. Au coeur du parc de Tassili en Algérie où l’Umo a surgi, la menace se précise dans le deuxième tome de cette trilogique. Tandis que Françoise Halfort, l’ancienne reporter de guerre vient d’accoucher à 53 ans d’une fille qui porte une marque sur le front, le George Sand , le dernier Atlas, a finalement décollé de l’Inde où il gisait depuis des décennies. Autour d’Ismaël Tayeb, le bandit investi d’une nouvelle mission, l’équipage se met en route pour affronter le titan surnaturel à bord du robot volant. Entre l’indienne charismatique et sa discrète assistante, diplômée en génie civil et en géopolitique, l’ancien mécano et l’ingénieur nucléaire, le truand russe et le cul-de-jatte aventurier, la fresque anime sa galerie de héros atypiques.

  • ASIN : B092C7SM12
  • Éditeur : DUPUIS (3 septembre 2021)
  • Langue : Français
  • ISBN-13 : 979-1034737932
  • Poids de l’article : 505 g

L’avantage d’avoir du temps pour lire (parce que moins de boulot, des délais un peu moins foufou, un week-end plus long où les emails ne pleuvent pas), c’est que l’on peut déterrer des lectures perdues dans la pile. Et c’est le cas des tomes 2 et 3 du Dernier Atlas, que j’ai pris à leur sortie (donc pour le deuxième, ça fait presque deux ans : on dirait Soyouz et ses comics).

Et c’est bigrement bien : l’équipage aux commandes de l’Atlas, réuni dans le premier tome et constitué de gens d’horizons très divers, parvient à s’emparer de l’engin et à le faire décoller, afin d’entamer un long voyage. Le récit s’ouvre directement sur l’aspect le plus spectaculaire de l’intrigue, à savoir un robot géant, qui va bientôt se confronter à un monstre géant que tout le monde identifie comme extraterrestre.

Ce tome se charge de nouer ensemble les différentes sous-intrigues dévoilées dans le précédent, et à faire se croiser les personnages : qui fait quoi, qui connaît qui, qui agit pour le compte de qui. La trame en destins croisés est efficace, d’autant qu’elle est portée par des ellipses astucieuses qui donnent beaucoup de nerf à l’ensemble.

Bien entendu, cela permet aussi de rajouter de la tension : au périple de l’Atlas vient se greffer la possibilité que des traîtres passent à l’action au sein de l’équipage. De la même façon, par le biais de scènes intéressantes (d’autant que les personnages sont des vieux, qui traînent avec eux leur bagage hérité d’une jeunesse rocambolesque et parfois hippie), certains personnages dont on se méfie dès le début adoptent un rôle inattendu.

Au contexte de science-fiction, qui permet d’actionner des mécanismes narratifs, des accélérations, des changements, des coups de théâtre, s’ajoute aussi une réflexion intéressante sur la colonisation. Nous sommes dans une uchronie, reconnaissable à quelques signes (les robots géants qui ont permis de construire certaines infrastructures en Algérie, mais aussi la présidence de Rocard, entre autres…), mais dans ce monde, la guerre d’Algérie n’a pas été non plus un moment de plaisir, et a laissé ses traces. Les personnages l’ont vécu, se sont forgé une opinion tranchée, et leurs commentaires permettent d’adopter divers angles de vue. Et notamment, de réfléchir au phénomène d’acculturation, ici souvent vécue comme une perte (l’assimilation de la culture de l’autre à la sienne ayant pour résultat de dissoudre la sienne dans un nouveau schéma : les personnages l’ont tous mal vécu…). Les comparaisons entre la colonisation, l’Occupation et le plan Marshall, dans la bouche de personnages qui ont, clairement, morflé, tapent juste. Notamment aussi parce que les scénaristes ne font pas l’économie de personnages maghrébins (le père de Tayeb, Chahinez qui héberge Françoise…), mettant ainsi en scène plusieurs générations et donc plusieurs rapports à la métropole.

Vraiment, l’ensemble est savoureux, car la dimension politique n’écrase jamais la partie aventure, et la caractérisation des héros est parfaite, avec les moments de silence qui vont bien.
Hop, la lecture du troisième tome n’est qu’une affaire de minutes !

Jim

Ca dépend. Y a pire avec certains.

Le troisième tome se situe un peu après les événements du précédent. L’action décrit les conséquences (sanitaires et humanitaires) d’un des coups de théâtre de la fin du tome 2 (coup de théâtre qui avait été amené par des subplots discrets, ce qui avait rendu sa révélation d’autant plus forte).

L’équipage de l’Atlas, après sa « victoire » en Algérie, s’est dispersé, certains se faisant plus discrets, d’autres étant récupéré par la propagande officielle. C’est d’autant plus frappant que le gouvernement en place (mené par un François Fillon uchronique, donc) a noué quelques alliances douteuses.

Le tome est sans doute moins historique que les précédents, mais assurément plus politique. Les scénaristes décrivent un monde paranoïaque, arbitraire et clientéliste, livré aux factions et où prospère le banditisme. C’est assez frappant de lire cet album durant la période de l’entre-deux tours, même s’il est sorti il y a un. C’est d’autant plus marquant que la Russie de Poutine est là, par l’entremise d’un croiseur tirant des projectiles à haute vélocité : visionnaire !

D’une certaine manière, le récit se conclut de la même façon que le Dark Knight de Frank Miller : un hors-la-loi vieillissant fédère autour de lui une armée d’individus prêts à en découvre, coalisant les colères diverses et agissant en dehors d’un cadre officiel devenu corrompu. Ismael Tayeb et Bruce Wayne, même combat. C’est assez frappant.

La trilogie, bien sûr, est un magnifique hommage au genre « robot géant ». L’Atlas, contre le « kaiju » extraterrestre, connaît ici son dernier combat, son baroud d’honneur. La dimension science-fiction est plutôt bien maîtrisée, trouvant un équilibre fragile, entre moteur narratif central et élément secondaire par rapport à l’intrigue politico-polar. Une chouette réussite, qui invite à la relecture.

Jim

C’est une de mes séries préférées. Une de celles que je conseille le plus également

J’avais été très agréablement surpris par le premier tome, et reprendre la lecture des mois après n’a pas gêné du tout la plongée dans l’univers.
Je trouve la transition du deuxième au troisième, à cause de ce saut temporel, un peu brutale, mais l’équilibre entre l’intrigue polar, le décor politique et le fond de science-fiction est vraiment chouette.

Jim