LES VOYAGES DE GULLIVER (Dave Fleischer)

REALISATEURS

Collectif, supervisé par Dave Fleischer

SCENARISTES

Dan Gordon, Cal Howard, Tedd Pierce, Izzy Sparber et Edmond Seward d’après le livre de Jonathan Swift

INFOS

Long métrage américain
Genre : animation/aventures
Titre original : Gulliver’s Travel
Année de production : 1939

Les frères Max et Dave Fleischer font partie des pionniers de l’animation américaine. De leur société, d’abord nommée Out of the Inkwell Studios à sa création en 1921 avant d’être rebaptisée Fleischer Studios en 1929, sont sortis quelques uns des cartoons les plus inventifs de leur époque, comme Koko le Clown, Betty Boop et Popeye. Les ennuis commencèrent en 1934, dès l’adoption du Code Hays qui les a notamment obligés à atténuer la sexualité de Betty Boop. La Paramount, le studio qui distribuait les dessins animés des Fleischer, encourageait également une compétition avec Walt Disney, ce qui a eu pour résultat de brider la créativité des productions Fleischer, qui ne retrouvèrent véritablement le succès qu’avec l’excellente série de cartoons Superman de 1941/1942. Mais même l’Homme d’Acier n’a pu renflouer les comptes des frères Fleischer qui durent fermer boutique en 1942 et vendre leur studio à la Paramount.

La concurrence avec Disney s’est intensifiée à la sortie de Blanche-Neige et les Sept Nains en 1937. Paramount comptait bien répliquer avec son propre long métrage d’animation et la date de sortie fut même officialisée avant le début de la production : Noël 1939…et cela pour précéder la sortie de Pinocchio, annoncée par Walt Disney pour 1940. Les Voyages de Gulliver devint donc le premier film d’animation américain non produit par Walt Disney.

Mais cela n’a laissé alors aux Fleischer que 18 mois pour compléter Les Voyages de Gulliver, très libre adaptation de l’oeuvre satirique de Jonathan Swift. C’était deux fois moins que le développement de Blanche-Neige et les Sept Nains. La Paramount n’alloua aux frangins qu’un budget d’environ 500.000 dollars. C’était trois fois moins que le coût du premier Classique de l’Animation Disney…et comme ce n’était pas suffisant, les Fleischer ont fait face à un dépassement de budget d’environ 200.000 dollars. Le studio Fleischer dut alors engager à tour de bras et des centaines d’artistes sans expérience ont rejoint la production pour aider des animateurs qui travaillaient déjà à des cadences infernales.

Pour réduire une partie des coûts, les Fleischer firent un usage important de la rotoscopie, procédé de leur invention, pour animer Gulliver (petite anecdote : Popeye fut un temps envisagé comme héros du film à la place du chirurgien de marine naufragé) mais le manque de temps pour peaufiner l’ensemble fait que le héros ne s’intègre jamais vraiment à une Lilliput peuplée de personnages beaucoup plus cartoony, aux rondeurs qui rappellent les Sept Nains de Disney.

Il y a de très jolis éléments dans Les Voyages de Gulliver…les plans de Lilliput sont enchanteurs, certains personnages secondaires sont très amusants et il y a de très jolis trouvailles visuelles. Mais contrairement à Blanche-Neige et les Sept Nains, le film des frères Fleischer a tout de même assez mal vieilli. Le scénario manque de péripéties et souffre de passages un peu trop étirés (par exemple, la scène où un Gulliver endormi est transporté de la plage à la cour du roi de Lilliput ne manque pas d’idées savoureuses…mais elle est hélas beaucoup trop longue). Quant aux numéros chantés, ceux-ci sont terriblement mièvres.

Les Voyages de Gulliver fut un succès public (pour la critique, ce fut plus mitigé), mais les Fleischer n’en profitèrent pas car la Paramount leur infligea une amende pour avoir dépassé le budget. Et Walt Disney ne fut guère impressionné par le film. Selon plusieurs sources, ce bon vieux Tonton Walt aurait déclaré : « on aurait pu faire mieux avec nos animateurs remplaçants ».

Le problème, en ce qui concerne la majorité des adaptation des Voyages de Gulliver, c’est que la partie satirique est souvent mise de côté et oubliée, pour ne conserver que la partie « aventures »…

Tori.