Horreur
Long métrage américain
Ecrit et réalisé par William Peter Blatty, d’après son roman
Avec George C. Scott, Ed Flanders, Jason Miller, Scott Wilson, Brad Dourif, Nicol Williamson…
Titre original : The Exorcist III
Année de production : 1990
Le succès de L’Exorciste, le chef d’oeuvre de William Friedkin, en 1973 a bien évidemment amené des discussions sur un possible numéro 2. William Peter Blatty n’avait au départ pas l’intention de donner une suite à son roman (principalement à cause de ses problèmes avec la Warner) mais il a fini par changer d’avis après la sortie de L’Exorciste II : L’Hérétique, deuxième volet qu’il a cordialement détesté (et il n’était pas le seul, le long métrage de John Boorman s’étant fait copieusement lynché par à peu près tout le monde, à quelques exceptions près…d’ailleurs, je ne le trouve pas si mauvais que ça malgré ses évidents défauts). Blatty a alors imaginé une histoire intitulée Legion qui mettait l’accent sur l’un des personnages secondaires de L’Exorciste, le flic cinéphile William Kinderman.
William Friedkin était intéressé et le studio n’était pas mécontent de pouvoir réunir à nouveau le réalisateur et le romancier/scénariste après la mauvaise réception du II. Mais des désaccords ont fini par enterrer le projet. William Peter Blatty a ensuite fait de Legion un roman, devenu un best-seller en 1983. Il a donc décidé d’en écrire une adaptation cinématographique, dont les droits ont été achetés par les productions Morgan Creek, avec la 20th Century Fox à la distribution. John Carpenter a brièvement été envisagé à la réalisation mais ce dernier s’est retiré quand il est devenu clair après une discussion que William Peter Blatty voulait mettre en scène le film lui-même.
William Peter Blatty n’a en tout réalisé que deux longs métrages. En 1980, il a signé La Neuvième Configuration (que je n’ai pas vu), qu’il considérait comme une véritable suite spirituelle à L’Exorciste. Après L’Exorciste : La Suite, il n’est plus jamais repassé derrière la caméra, ce que l’on peut imputer à ses relations une nouvelle fois conflictuelles avec ses producteurs. Blatty voulait que le film ait pour titre celui du livre mais pour des raisons commerciales, le studio voulait garder L’Exorciste…alors qu’il n’y avait pas d’exorcisme dans le récit. Après une projection-test jugée catastrophique, une rallonge budgétaire a permis l’ajout de nouvelles scènes, dont un exorcisme qui ajoute du saignant à un suspense qui s’en passait jusque là.
Avec son mélange de retenue et d’exubérance, le massif George C. Scott (Patton) a succédé à Lee J. Cobb dans le rôle de Bill Kinderman. Quinze ans après les événements du premier film (Blatty ignore le II, ce que souligne bien le sous-titre de la V.F.), le policier est toujours hanté par la mort de son ami Damien Karras. Il enquête sur une série de meurtres particulièrement horribles, des mutilations qui lui rappellent les rituels sanglants du Gémeau, un tueur en série pourtant décédé des années plus tôt. L’investigation de Kinderman va le conduire dans les couloirs d’un hôpital psychiatrique…et dans une cellule dont l’occupant affiche littéralement plusieurs visages…et l’un d’entre eux lui rappelle de douloureux souvenirs…
William Peter Blatty joue principalement sur la suggestion, les non-dits. Il construit méthodiquement le drame qui s’empare de la ville en imposant dès les premières minutes un rythme assez lent, une langueur qui se ressent un peu plus que celle du premier Exorciste. Ce parti-pris peut désarçonner tout en sachant progressivement apporter la surprise lors des rares scènes-chocs. Celles-ci ne sont pas toutes efficaces…et il y a quelques choix un brin ridicules (le réalisateur se plante un peu dans le symbolisme onirique du rêve de Kinderman et en terminant un bon passage atmosphérique sur un jump-scare foireux)…mais dans l’ensemble, une véritable noirceur se dégage de cette rencontre entre les histoires de possession et de serial killer…
L’exorcisme final fait un peu trop « pièce rajoutée »…et il est loin de valoir l’intensité des face-à-face entre Kinderman et le Patient X, l’occupant de cette cellule d’où suinte le mal doublement interprété par Jason Miller et un Brad Dourif enfiévré…