REALISATEUR
F.W. Murnau
SCENARISTE
Henrik Galeen, d’après le roman de Bram Stoker
DISTRIBUTION
Max Schreck, Gustav von Wangenheim, Greta Schröder, Ruth Landshoff…
INFOS
Long métrage allemand
Titre original : Nosferatu, eine Symphonie des Grauens
Genre : horreur
Année de production : 1922
Je n’ai pas effectué de recherches poussées, mais je ne pense pas me tromper en écrivant qu’il existe peu de personnages qui ont su aller au delà de la déclinaison d’un concept (ou de la pure et simple copie) pour acquérir une vie propre et devenir une véritable icône de son genre cinématographique. Nosferatu est de ceux là…
À la base, Nosferatu est une copie de Dracula. Le producteur Albin Grau, qui venait de fonder sa propre société, voulait se spécialiser dans le fantastique et se lancer dans une adaptation du Dracula de Bram Stoker…des droits que son modeste studio n’a pas pu acquérir. Qu’à cela ne tienne, Grau a tout de même commandé un scénario à Henrik Galeen, co-scénariste du Golem (autre classique du cinéma muet allemand), en lui demandant de reprendre la trame narrative du célèbre roman tout en procédant à de nombreux changements (ce qui ne leur a tout de même pas permis d’échapper à un procès de la part de la veuve de Bram Stoker qui tenta, en vain, de faire détruire toutes les copies).
L’un des principaux lieux de l’action a été transposé en Allemagne (tandis que les scènes du château de Nosferatu ont été tournées dans les Carpates) et les noms ont été changés : Harker est devenu Hutter, Mina est Ellen, Renfield est Knock…et Dracula est le comte Orlok, au physique aussi saisissant que repoussant.
Si son apparence physique est plus monstrueuse que celle de Dracula, Nosferatu le vampire partage tout de même quelques points communs avec le comte transylvanien : un nez aquilin, des sourcils broussailleux, des dents pointues…mais ces caractéristiques sont beaucoup plus poussées chez Orlok, qui ressemble à un cadavre émacié, au regard habité et effrayant.
Interprété par le comédien Max Schreck, à jamais associé à ce rôle (d’ailleurs une grande partie de sa filmographie est restée inédite dans nos contrées), le personnage instille le malaise à chaque fois qu’il occupe l’écran (et on le voit au final très peu, ce qui donne encore plus d’impact à ses apparitions), sensation sublimée par la sublime mise en scène de Friedrich Willem Murnau (Faust, une légende allemande, L’Aurore…).
Passé le pont, les fantômes vinrent à sa rencontre.
Et dès ce moment, Hutter, comme le spectateur, pénètre dans littéralement dans un autre monde. La composition des plans, les expérimentations sur l’image, l’utilisation de filtres pour souligner les différents passages diurnes et nocturnes, les mouvements saccadés du vampire…tous ces éléments renforcent l’étrangeté de la rencontre entre le clerc de notaire et Orlok. Le jeu sur les ombres alimente la claustrophobie des premiers actes…avant que le récit ne prenne le large pour suivre Orlok jusqu’à sa nouvelle propriété de Wisborg, amenant la mort et la désolation dans son sillage.
Cauchemar expressionniste…poème hallucinatoire…symphonie de l’horreur…
Oui, le navire de la mort avait un nouveau capitaine…