OPUS HUMANO #1-3

L’avantage des Opus Humano, c’est que, pour le prix de la revue, je lis plusieurs albums que je n’aurais sans doute jamais lus sans ça. Encore moins achetés. Et il y a des chances pour que je ne change pas d’avis, en plus…

C’est le cas d’Adam Sarlech, signé Frédéric Bézian, appelé à devenir le premier volet d’une trilogie. Le récit se déroule au sein d’une famille très fin de race, hanté par ses lourds secrets et les statues de cire représentant ses ancêtres, au grenier. L’album s’ouvre sur l’enterrement du précédent curé, office supervisé par son remplaçant, qui rencontre les jumeaux de la famille et le docteur proche de leur mère. Par le biais de l’ecclésiastique, le lecteur peut découvrir les tenants et les aboutissants, se faisant une idée de cette famille dégénérée mue par le ressentiment : la petite dernière nymphomane, l’oncle catatonique gardant son chien empaillé sur les genoux…

Si ce microcosme aristocratique en bout de course est amusant, d’autant que Bézian, via le personnage d’Adam Sarlech, un médium ayant croisé les destins de la famille avant de disparaître en laissant une influence plus ou moins délétère sur les jumeaux, s’amuse à connoter son récit de fantastique et à convoquer la fascination pour le surnaturel qui a marqué la fin du XIXe et le début du XXe (Adam Sarlech est clairement un décalque d’Allan Kardec, figure incontournable du spiritisme du XIXe), le tout est quand même bien confus. Certaines compositions de planches insèrent des cases d’une action parallèle au milieu de celles dédiées à l’action principale, sans transition ni changement chromatique ni indication textuelle. Il abuse des cadrages de guingois, mais il parvient à construire des perspectives déroutantes qui participent à ce sentiment diffus de malaise.

De même, les personnages que Bézian dessine, lorgnant beaucoup vers ceux de Muñoz et un peu vers ceux de Comès, aux visages couturés de traits zébrés, sont souvent difficiles à identifier, d’autant que les explosions capillaires, marque de famille apparemment, les rendent parfois un brin méconnaissables. Le tout est nébuleux, en dépit d’une histoire intéressante, avec son lot de révélations diverses sur les sourds secrets familiaux (il y a bien entendu des révélations de paternité tragiques, comme de juste, qui cachent des non-dits encore pires).

Bref, un album qui cumule des intrigues classiques, voire convenues, et revient sur un imaginaire déjà bien identifié, dans une narration foutraque et sans doute trop dense. Pas réellement une déception, mais pas non plus un éblouissement, loin s’en faut.

Jim

2 « J'aime »