Il faut rajouter un autre truc, aussi, que m’avait fait remarquer Jay Wicky : c’est que les films (bons ou mauvais, en l’occurrence peu importe), il faut savoir vieillir avec eux. Et pour ce faire, il faut les revoir régulièrement. Un film dépend de son contexte (de création, mais aussi de découverte), mais nous également dépendons de notre contexte. Le contexte évolue, et si nous savons évoluer en tandem avec les films, il n’y a pas de décalage.
Pour répondre à ta question, une partie de la SF des années 1970 vieillit très mal, malgré la qualité des récits, des intrigues et des structures. On a récemment parlé de Zardoz, mais je crois que ce n’est pas le pire exemple (d’autant que Zardoz parle des métamorphoses des formes sans histoire : les formes perdues dans leur transmission, puis mal réinterprété, la dilution de la culture, en quelque sorte).
Mais si on regarde deux excellents films qui parlent de la société qui a vu leur tournage (l’Occident des années 1970, fin des trente glorieuses, peur de l’effondrement, crise du couple…), à savoir Saturn 3 et Rollerball, on constate que, même avec toute la bienveillance du monde, ils ont fichument vieilli. Que ce soit les coiffures exubérantes de Farah Fawcett ou les décors et meubliers sixties transposés dans l’espace ou le futur, c’est complètement daté.
A contrario, la survivance de designs du passé dans Soleil Vert peut s’expliquer dans le sens où la société industrielle est au point mort dans ce monde, et où tout, chez les riches ou les pauvres, est déjà daté, traces d’un passé qu’on s’acharne à conserver parce qu’il n’y a plus de présent. De même, dans Outland, les décors sont d’aujourd’hui (l’aujourd’hui du tournage et l’aujourd’hui du visionnage), les coursives, la cantine, les bureau sont atemporels parce qu’ils répondent à une logique évidente, à savoir que les installations minières répondent à des critères pratiques, pas esthétiques. Même les vieux écrans à gros caractères jaunes font encore sens aujourd’hui, selon le principe que la compagnie minière fera des économies et qu’on n’a pas le temps de changer les ordinateurs.
La science-fiction, pour la simple raison qu’elle place l’action dans un futur qui, par définition, n’advient jamais, est l’un des genres à être potentiellement daté avant l’heure. Les choix esthétiques doivent donc être dictés par la logique interne à l’histoire, et certains films l’ont copieusement oublié.
L’autre genre qui est exposé au même risque, c’est l’humour. Je ne suis pas sûr que La Vérité si je mens vieillisse aussi bien que Le Corniaud, par exemple. De même, je pense que Deadpool vieillira bien plus vite que Spider-Man version Raimi. L’humour est parfois atemporel. Et parfois pas.
Jim