QUAND LES COLTS FUMENT...ON L'APPELLE CIMETIÈRE (A. Ascott)

REALISATEUR

Anthony Ascott (de son vrai nom Giuliano Carnimeo)

SCENARISTE

E.B. Clucher (ou Enzo Barboni)

DISTRIBUTION

Gianni Garko, William Berger, Chris Chittell, John Fordyce…

INFOS

Long métrage italien
Genre : western/comédie
Titre original : Gli fumavano le Colt… lo chiamavano Camposanto
Année de production : 1971

Comme tous ses collègues réalisateurs, l’italien Giuliano Carnimeo a traîné ses bottes dans tous les genres possibles du cinéma d’exploitation. On retrouve ainsi son pseudonyme américanisé aux génériques de comédies (Les péquenots, La Vamp du bahut), de post-apo (Les exterminateurs de l’an 3000), de films d’horreur (Ratman) et de giallo (Les Rendez-vous de Satan, que je n’ai pas vu et qui est paraît-il l’un de ses meilleurs films).
Mais c’est surtout dans le western qu’il s’est le plus distingué. Il a notamment réalisé les premières aventures du pistolero Sartana, une série de cinq longs métrages, presque tous interprétés (à l’exception d’un seul, C’è Sartana… vendi la pistola e comprati la bara!, traduit en France par Django arrive, préparez vos cercueils !!!) par le comédien croate Gianni Garko.
Entre deux Sartana, le metteur en scène et son acteur fétiche avaient reformé leur duo à l’occasion de Quand les colts fument…on l’appelle cimetière…cette fois-ci pour un résultat à l’ambiance nettement moins sérieuse.

Les deux fils de John McIntire, un propriétaire terrien, rentrent au ranch familial après avoir terminé leurs études dans la grande ville. Mais les deux frangins ne sont pas vraiment préparés à la rude vie dans l’Ouest sauvage… Aussitôt descendus de la diligence, ils se font ennuyer par des bandits. Un mystérieux étranger vêtu de noir leur vient alors en aide. Un peu plus tard, leur père leur explique qu’une bande de gangsters terrorise les environs et rackette les habitants. Les frangins ne veulent pas se laisser faire et se mettent encore dans les ennuis quand ils tentent de récupérer l’argent extorqué et de fédérer les gens contre les bandits. C’est alors que leur ange gardien, qui semble avoir une dette envers leur père, leur sauve encore la mise. Pendant ce temps, un tueur arrive en ville, un tueur que l’étranger connaît bien…

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Sorti en 1970, On l’appelle Trinita fut le premier succès de Terence Hill et Bud Spencer, les Laurel et Hardy italiens, et marqua véritablement les débuts d’une vague de westerns à tendance comique, ce qui pour les détracteurs de ce courant cinématographique a commencé à signer le glas du genre (je suis quant à moi nettement moins catégorique sur ce sujet, même si la qualité des films du célèbre duo n’a fait que décliner au fur et à mesure des années).
Le scénariste de Quand les colts fument… est d’ailleurs un certain Enzo Barboni, plus connu sous son pseudonyme E.B. Clucher. Clucher avait débuté en tant que directeur de la photographie avant de se mettre à l’écriture et à la réalisation. Son coup d’essai, qui se révéla gagnant, fut justement On l’appelle Trinita. Si la carrière du bonhomme a souvent croisé la route de Terence Hill et Bud Spencer (et pas toujours pour le meilleur), on lui doit aussi quelques scénariis qui ne manquent pas d’intérêt.

Quand les colts fument… fait ainsi partie de la veine comique du western spaghetti, mais on est quand même loin de l’humour slapstick à base de grosses tartes dans la tronche. Du slasptick, il y en a quand même un tout petit peu ici…cependant l’accent est plutôt mis sur un constant décalage entre le jeu des acteurs et les dialogues et le traitement des situations et des figures établies du genre. Donc pas de grosse parodie, plutôt un travail plus subtil, entre sérieux et décontraction générale.

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La trame globale est tout ce qu’il y a de plus classique. Ce qui fait le sel de l’ensemble, c’est l’écriture et la mise en scène des relations entre les personnages, que l’on peut répartir en trois duos. D’abord, les deux frères, les plus naïfs du lot, qui vont devoir s’adapter rapidement au mode de vie de l’ouest, qui passe plus par les flingues et les poings que par la discussion. Puis leurs serviteurs, frères eux aussi, peons lanceurs de couteaux et amusants faire-valoir comiques.

Le troisième duo, le plus intéressant, est celui des deux pistoleros, les meilleurs dans leur partie. Ils ne sont pas frères, tout en ayant une relation presque fraternelle. Ils se respectent dans leur milieu très compétitif, tout en ne rechignant pas à se mettre des bâtons dans les roues. Gianni Garko, alias l’Etranger, alias Cimetière, rejoue des particularismes de Sartana, tout en se montrant moins cynique. L’impeccable William Berger (un autre vieux routier du cinéma du genre, passé chez Bava, Castellari, Sollima, Franco…et j’en passe énormément) incarne un tueur à gages de grande classe, à la caractérisation plus que savoureuse. Des personnalités soignées, qui animent une aventure aux péripéties qui se suivent avec un grand plaisir.

Comme dans tout bon western spaghetti, la musique de Bruno Nicolai, aux accents forcément « morriconiens », est entraînante et accompagne avec bonheur l’action. Mené sur un rythme enlevé et sans aucun temps morts, Quand les colts fument…on l’appelle cimetière est un western réjouissant, à l’interprétation de qualité et à l’humour croustillant. Dans le genre, une vraie réussite !