RAÏKA t.1-5 (Yu Terashima / Kamui Fujiwara)

Je garde un bon souvenir de cette série, qui se situe dans un Japon du passé, pas encore unifié, traité à la sauce fantasy. Le dessin, sans atteindre la précision minutieuse d’un Otomo, étalait une volonté de réalisme qui était assez agréable.

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Ce qui était à la fois amusant et découcertant, c’est que, en dépit de l’axe fantastico-super-héroïque de la saga, il y avait des blocs de voix off qui venait expliquer des détails sur la nourriture, sur les armes, sur les coutumes, sur la forge… Cela donnait l’impression d’une solide documentation dans une intrigue où les personnages flottent dans les airs, courent sur la cime des arbres et lancent des rayons d’énergie. Le contraste était amusant.

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L’action se déroule dans un Japon lointain, pas encore unifié, où des royaumes locaux mènent des guerres de territoires et de conquêtes. On suit le parcours d’un jeune guerrier, Raïka, aux dons très variés, qui se retrouve pris dans ces luttes de pouvoir.

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Coup classique, le jeune guerrier en question est un orphelin (dont les circonstances de la naissance et de l’abandon seront révélées au fil du récit, nourrissant d’autres rebondissements), suivi par une malédiction. Donc on se doute bien qu’il va y avoir une de ces révélations dramatiques de paternité (ou révélations de paternité dramatique, allez savoir) dont Molière et George Lucas ont tiré un certain miel.

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Ça bastonne sec. On a droit à de grandes cases de charges de cavalerie, à des duels bien expressifs, à un jeu de surenchère des pouvoirs qui, à mon sens, fonctionne toujours bien dans des récits au long cours (la série est composée de cinq volumes de 300 pages chacun, dans l’édition que j’ai, donc y a de quoi raconter).

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L’autre particularité, c’est que le parcours de Raïka l’amène à rencontrer d’autres personnages et d’autres groupes, et que les jeux d’alliance varient en fonction de la situation (que l’on qualifiera de géopolitique, pour faire vite). L’ennemi d’hier est l’allié de demain, en quelque sorte, ce qui est assez agréable et sort la série d’un schéma manichéen qui aurait pu la laisser ronfler.

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Une partie de l’intrigue, vers la fin de la série, tourne autour des avancées technologiques. Et notamment de la maîtrise du fer. Le royaume qui aura des épées de fer aura aussi l’avantage sur les voisins, qui en sont encore aux épées de bronze. Là encore, le récit mélange considérations historiques et ambiance exagérée (parce que bon, les épées, dans le récit, on s’en sert pour découper des flancs de montagne, hein…).

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Le récit propose de grosses séquences, où Raïka et ses alliés règlent les problèmes à mesure qu’ils arrivent, ce qui constitue un ensemble de cycles à l’intérieur d’une saga plus vaste tissée autour d’un fil rouge (le sort de la Reine Iyo et la guerre contre le Yamatai). Un petit côté Games of Thrones avant l’heure ?

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Les auteurs prennent le temps d’épaissir les nombreux personnages secondaires, même chez « les méchants », notion assez floue puisque l’obstacle change de visage selon les enjeux, qui évoluent au fil du récit. Ainsi, ils parviennent à faire de Raïka le moteur de l’intrigue sans que celui-ci ne tire trop la couverture à lui.

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Mais la guerre contre le Yamataï n’aura pas lieu. Pourtant annoncée dans les différents textes de quatrième de couverture, elle n’arrivera pas avant la fin de la série, qui nous laisse avec des personnages en pleins préparatifs. Un peu comme si, une fois que les mystères de la naissance de Raïka sont résolus, il n’y avait plus rien à raconter.

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Je ne sais pas si l’éditeur français a décidé d’arrêter la série pour mévente, ou bien si elle se conclut ainsi au Japon, mais je garde le souvenir d’un titre qui avait su faire monter la sauce et avait abandonné ses lecteurs (en tout cas un lecteur en particulier : moi) avant le dernier acte, qui promettait une grosse confrontation épique. Un goût d’inachevé bien dommage pour une série qui envoyait du bois, malgré ses bases assez classiques.

Jim