RÉÉDITIONS DC : TPBs, Hardcovers, Graphic Novels

Au gré de mes visites chez les soldeurs, je suis tombé récemment sur un recueil d’épisodes provenant de la série Superman / Batman, celle que Jeph Loeb et Ed McGuinness ont lancée en 2003. L’album Sorcerer Kings rassemble plusieurs histoires tirées des épisodes 78 à 84, réalisés par plusieurs équipes différentes.

Le premier épisode casse un peu la formule de la série, qui propose des aventures du tandem des World’s Finest. Ici, deux récits, avec deux équipes de héros. La première histoire, écrit par Joe Kelly et Jack Kelly et illustrée par Ed Benes, se penche sur la question de savoir qui gagnerait, de Batman ou de Superman, à travers le regard de deux fanboys déchaînés.

Le second récit, par Amanda McMurray et Brett Booth, met en scène Powr Girl et Huntress, face à un extraterrestre perdu sur Terre, comme la première des deux héroïnes. Le récit s’arrête sur le « mensonge » de l’équipe, qui promet de trouver un moyen de renvoyer le visiteur chez lui. C’est un postulat classique dans les récits de super-héros, et si la scénariste décrit cela comme un pieux mensonge, c’est aussi une manière de commenter les lieux communs propres à ces péripéties.

Passées ces deux petites curiosités sympathiques mais anecdotiques, le sommaire propose de retrouver un diptyque écrit par Chris Roberson et illustré par Jesus Merino, dans son style le plus pachequien qui soit.

Le récit met en scène Epoch, le « Maître du Temps », et débute dans le lointain futur exploré par Grant Morrison dans la série JLA et le cross-over DC One Million. Le super-vilain, poursuivi par le Superman du futur (aidé de son compère Superman de la même époque) parvient à s’échapper dans le passé (notre présent, ou presque).

C’est foisonnant, bourré d’idées, généreux, très proche de l’esprit morrisonien et retrouvant cette version moderne du « sense of wonder » que le scénariste est parvenu à constituer dans sa version de la Ligue. Les textes, notamment les voix off, laissent entrevoir un monde plus vaste encore, aux concepts novateurs et surprenants. D’une grande richesse et avec cette sensation de lire quelque chose d’ambitieux qui fait rêver et emporte au loin.

L’astuce de Roberson consiste également à opposer Epoch à nos héros contemporains… mais issus d’un passé un peu Silver Age. Le récit s’étale donc entre le lointain futur morrisonien et le passé classique des personnages.

Divisé en deux époques, ce diptyque nous offre la possibilité de suivre deux tandems. Les deux équipes tombent dans des pièges temporels tendus par Epoch et parviennent à s’en sortir à l’aide d’astuces réellement ingénieuses qui contribuent à cette atmosphère merveilleuse. Une franche réussite.


Le recueil se conclut sur un gros morceau, une saga en quatre épisodes écrits par Cullen Bunn et illustrés par Chriscross. Ce dernier œuvre dans un style moins caricatural et outrancier que d’ordinaire, et assez agréable à regarder. Quant à Bunn, je fais partie de ceux qui apprécient en général son travail, que ce soit sur ses séries indés mais aussi sur ses prestations chez les gros éditeurs, où il mélange les genres souvent avec astuce.

Ici, le scénariste mélange voyage temporel, enjeux à la Terminator / Days of Future Past, monde magique et double des héros. L’affaire commence par une intervention du groupe magique Shadowpact (ce qui m’a donné envie de relire la série, tiens…), qui repousse une invasion de créatures mystiques aux côtés d’un étrange chevalier en armure. Ce dernier tombe sous les coups des assaillants. Une fois ces derniers partis, les membres du Shadowpact comprennent qu’il s’agit de Superman. Mais un Superman alternatif, puisque le vrai est bien vivant.

Tandis que le Batman alternatif vient chercher le « vrai » Superman et l’emporte dans son monde, le « vrai » Batman enquête sur la disparition de son allié. Il est épaulé par Detective Chimp et Doctor Occult (que le chimpanzé surnomme « Doc Occ ») puis Klarion. Bunn peut donc mener en parallèle le récit de Superman, dans le monde alternatif qui s’avère en fait une version future et dystopique de notre univers, et l’enquête de Batman dans le présent.

Tout tourne autour d’une cabale menée par Felix Faust, Blackbriar Thorn, Morgaine le Fey et Brother Blood, qui ont lancé un sort faisant basculer la Terre, et donc ses héros, dans une version heroico-fantasyfiée. Et autour de la chronomancie, un voyage temporel d’origine magique qui relie le futur où Superman s’est retrouvé au présent où Batman tente d’arrêter la cabale. C’est plutôt bien troussé, bien rythmé, et en mélangeant les genres, en appliquant une intrigue de SF à un monde de fantasy et en faisant intervenir de nombreux personnages secondaires de l’univers DC, Bunn signe quatre épisodes très agréables à lire.

Bref, un recueil que j’ai pris un peu par hasard, et curiosité, sans doute motivé par un prix modique, et donc je ne regrette absolument pas l’acquisition.

Jim

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