Alors « Dark Knight Over Metropolis », c’est l’une des sagas importantes, et particulièrement mésestimées, de Batman et Superman. En gros, après Crisis on Infinite Earths, on a deux héros qui ne s’aiment pas. Ils se sont croisés fugitivement dans les Man of Steel de Byrne, et cette saga (une enquête de Batman à Metropolis) est leur première « rencontre officielle », en gros. Et la fin est vraiment super (c’est une scène qui sera reprise de multiples fois, et qui a une grande importance dans la construction des personnages dans cette version de l’univers).
Vraiment, c’est un récit très important. Et en plus, assez joli : Batman par Ordway, ça donne bien !
L’Annual dessiné par Art Adams et contant une histoire assez bateau de vampires est beaucoup plus anecdotique, mais le TPB, pour sa principale saga, est fortement conseillé.[/quote]
Je viens de relire le TPB. Et je suis emballé par la partie donnant le titre au recueil. En revanche, l’Annual écrit par Byrne et dessiné par Art Adams n’est franchement pas terrible. Outre que l’action en est assez téléphonée, les décors brillent par leur absence et l’ensemble n’est pas réellement chouette à regarder, comme si la rencontre Adams / Giordano ne s’était pas produite. Et l’on se rend compte que la présence d’un Terry Austin changeait déjà tout.
En revanche, le récit « Dark Knight Over Metropolis » est assez formidable.
Déjà, c’est la troisième rencontre entre Superman et Batman dans cette version post-Crisis de l’univers DC (après celle dans Man of Steel, celle dans l’Annual évoqué plus haut, on ne comptera pas Legends, qui est un gros cross-over, ni Cosmic Odyssey). Et c’est la deuxième dans ce qui s’apparente à une série régulière. Il fallait donc quelque chose d’exceptionnel qui fasse avancer les relations entre les deux héros, relations tendues, chacun surveillant l’autre du coin de l’œil, loin de l’amitié sans concession et un peu béate de la version précédente.
L’intrigue tourne autour d’une bague ornée de kryptonite possédée par Lex Luthor, qui permettra à une toubib de confirmer ses soupçons sur l’identité secrète de Clark Kent. Le devenir tragique de ladite médecin justifiera la présence de Batman à Metropolis, dans le cadre d’une enquête. La résolution d’icelle amènera un changement dans les relations des deux héros, et la construction d’une confiance teintée de réalisme, dans une scène qui restera comme l’un des fondements de cette version du tandem (au point que certains dialogues en seront repris dans d’autres récits, la scène finale devenant un incontournable.
Outre l’intérêt évident pour les personnages, le récit a de nombreuses qualités, et la relecture met en valeur le grand nombre de choses qui s’y passent. L’air de rien, cette trilogie (précédée par deux épisodes « prologues ») est séminale.
Par exemple, c’est dans les trois chapitres de « Dark Knight over Metropolis » que se développe officiellement la relation amoureuse entre Lois et Clark. De même, l’un des épisodes prologues met en scène Hank Henshaw, le futur Superman Cyborg. Ou encore, la présence de la bague de kryptonite et ses conséquences sur la santé de Luthor entraîneront un vaste feuilleton (« mort » de Luthor, arrivée de son fils, révélation du clonage…). Sans compter quelques petits détails, comme la présence d’un Slam Bradley au détour d’un épisode (bon, on apprendra plus tard qu’il s’agit de son fils).
Nous sommes en 1990, Mike Carlin est bien installé aux commandes des titres Superman, mais les couvertures ne présentent pas encore l’écusson avec le numéro du sens de lecture. Cependant, c’est à l’occasion de cette « mini-série dans les séries » que Carlin et ses auteurs commencent à forger le vaste feuilleton que deviendront les séries Superman. Responsables éditoriaux et lecteurs savent que c’est possible, la saga avec l’Eradicator vient de le prouver, et Action Comics est redevenu mensuel depuis peu, ce qui fait un épisode de Superman toutes les semaines. Mais avec « Dark Knight over Metropolis », le sens du feuilleton bat son plein, dans un constant ballet de causes et de conséquences. Dans le récit, par exemple, on voit bien que l’affaire de l’Eradicator (Clark était possédé par un vieil esprit kryptonien, pour faire court) a nui aux relations entre Perry White et son ancien journaliste fétiche. De même, la présence de Cat Grant au procès de Morgan Edge prend ses racines dans le passé. Tout cela s’inscrit dans une évolution au long cours. Et les titres Superman entrent dans ce qui sera une décennie faste.
Bref, un vrai plaisir de relecture, avec tous les ingrédients des bons comics classiques : des grands sentiments, de l’humour, du suspense. Un chouette feuilleton.
Jim