RÉÉDITIONS MARVEL : TPBs, omnibus, masterworks, Epic…

Autre tome récemment arrivé pour compléter ma collection West Coast Avengers, le recueil intitulé Family Ties reprend les débuts de la série. Mes souvenirs de la lecture dans Titans me laissaient penser que je n’avais pas grand-chose à découvrir. Mais le tome contient quelques surprises pour quelqu’un qui n’a abordé la série qu’avec sa première édition chez Lug-Semic.

La série West Coast Avengers est lancée par Steve Englehart en même temps qu’une série limitée de douze épisodes, Vision & Scarlet Witch, qu’il écrit également. Afin de faire bonne mesure, le scénariste en profite pour ouvrir les hostilités avec un cross-over, qui voit le groupe et le couple faire front commun face à une nouvelle formation de la Lethal Legion.

L’intrigue fait intervenir une nouvelle version d’Ultron, qui se considère comme le fils de Hank Pym, ainsi que le Grim Reaper, en quelque sorte frère de Wonder Man et de Vision. Le sous-texte du cross-over est donc bien entendu la famille, comme le titre du recueil l’indique. C’est un fil rouge sur lequel Englehart reviendra, notamment en faisant apparaître une énième version d’Ultron, en fils aimant luttant contre l’autre robot, fils maléfique, ou encore en glissant dans les dialogues l’idée que ce qui lie les héros entre eux, ce n’est pas seulement de l’amitié.

La série West Coast Avengers est dessinée par Al Milgrom (souvent encré par Joe Sinnott, même si Kim DeMulder livre un épisode très vivant et si Kyle Baker prête son encrage nerveux à un autre chapitre), tandis que Vision et Scarlett Witch est illustré par Richard Howell, au style rétro. Je n’avais jamais remarqué que c’est Tom Orzechowski, célèbre pour ses longues années au service d’Uncanny X-Men, qui gère le lettrage des deux premiers épisodes puis de certains autres, en alternance avec Janice Chiang : et il y a une différence, une aisance supplémentaire qui fait qu’Orzechowski ren très fluides certains passages bavards, qui paraissent encombrés quand c’est Chiang qui s’en charge.

L’un des fils rouges du scénariste tourne autour de l’énergie que déploie Hawkeye afin de former une équipe stable. De nombreux personnages passent donc dans le repaire californien des héros, dont Ben Grimm, que Clint veut absolument recruter, et Firebird, qu’il néglige, ce qui vaut des scènes musclées avec Mockingbird. Il y a tout un sous-texte sur les rapports hommes-femmes, sur la misogynie et l’invisibilisation (le mot peut sembler anachronique pour une série de la moitié des années 1980, mais l’adjectif « invisible » apparaît dans les dialogues, avec ce sens précis). La valse des personnages est propice aussi à des rencontres, des séductions, des sous-entendus (parfois pas si « sous » que ça, d’ailleurs). Certains pages sont emplies d’allusion sexuelles ou de blagues de cul déguisées, c’est assez réjouissant.

Englehart s’intéresse dans un premier temps à deux personnages : Wonder Man, à la reconquête de lui-même, comme si le scénariste reprenait le héros qu’il a contribué à ramener dans Avengers (juste avant de quitter le titre), et Tigra, hanté par son « âme chat » et séduisant tous les membres masculins du groupe. Et la lecture de ce recueil fait prendre conscience du massacre lors de l’adaptation chez Lug-Semic.

Sur neuf épisodes de West Coast Avengers, trois ont tout simplement été écartés de la traduction dans Titans. Le cinquième numéro, qui voit Tigra s’intéresser à Master Pandemonium et chercher des informations dans le milieu occulte, déroule l’intrigue que le scénariste a en tête. C’est aussi l’occasion d’opposer la féline héroïne à Jack Russell, le Werewolf by Night, patient du docteur Michael Morbius.

Les épisodes 8 et 9 font intervenir les Rangers, le groupe auquel appartenait Firebird précédemment. Mais l’équipe est infiltrée par un démon de Master Pandemonium, ce qui conduit, dans la seconde partie de ce diptyque, le groupe de Clint à affronter celui qui s’impose petit à petit comme l’un de leurs adversaires les plus tenaces. Sauf que le travail lent et minutieux de subplots mené par Englehart est bien dynamité par l’adaptation dans Titans. Plein d’éléments qui paraissaient tomber un peu de nulle part, sont ici installés et déroulés avec logique. Et je ne parle même pas des séquences horrifiques ou des pleines pages qui ont été sucrées soit par crainte de la censure soit par convenance liée à la pagination.

Renouer avec cette série en VO permet de la redécouvrir, de voir comment Englehart construit son petit univers, trouvant sa place entre les séries des autres. Certes, les grosses sagas viendront plus tard (le deuxième voyage chez le Peuple-Chat, l’épopée temporelle, la lutte contre le Zodiac et le final autour de Pym), et la série avance lentement, mais la découverte de ces premiers pas, y compris et surtout avec les épisodes jadis passés sous silence, redonne des couleurs à l’ensemble.

Jim

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