RÉÉDITIONS MARVEL : TPBs, omnibus, masterworks, Epic…

Dans mon entreprise d’exploration de mes étagères, j’ai récemment ressorti le TPB Rise of the Midnight Sons. Que voilà un étrange objet.

RiseOfTheMidnightSons-TPB

En 1992, l’ambiance est étonnante. Grosso modo, pour faire très court, les super-héros mainstream (comprendre : DC et Marvel) sont sous l’influence de deux phénomènes, différents mais liés : d’une part le glissement du « grim & gritty* » vers une action violente, musclée et armée, d’autre part le succès d’auteurs au style tapageur (mais pas toujours laid) qui, la même année, quittent Marvel en claquant la porte afin de fonder le studio Image (d’abord chez Malibu, puis tout seuls). Le résultat, ce sont des héros musculeux, portant des armes plus grandes qu’eux et affrontant des méchants très sadiques dans des ambiances sombres et saignantes. Le surnaturel, qu’on trouve dans les Spider-Man de McFarlane puis dans son Spawn, est l’un des angles qui seront exploités.

Bref, à une époque où la bulle spéculative autour des comics se développe, les deux éditeurs traditionnels réagissent en occupant la tendance. Surtout Marvel, qui est le berceau des transfuges. La collection « Midnight Sons » fait partie de ces réactions.

Et c’est quoi donc ?
Au début des années 1990, plusieurs titres sont lancés, et si certains sont des héritiers de la tradition héroïque classiques (genre : New Warriors), d’autres sont plus musclés, à l’image de la nouvelle version pêchue de Ghost Rider. Cette dernière rencontre un vif succès, et c’est vrai que les histoires à rebondissements de Howard Mackie et le dessin puissant de Javier Saltares encré par Mark Texeira donnent une nouvelle dimension au Motard Fantôme.

C’est donc le candidat idéal pour servir de fondation à une collection qui peut répondre à la tendance développée par la concurrence, et à combler le vide laissé par le départ des vedettes d’hier. Si bien qu’en plus de Ghost Rider, Marvel lance Spirits of Vengeance (le nouveau et l’ancien Motards ensemble), Morbius (le vampire ennemi de Spidey avec un nouveau costume), Darkhold (la traque des pages du Livre de Chton) et Nightstalkers (La réunion de Blade, Hannibal King et Frank Drake, tous devenus de velus barbouzes loin de leur caractérisation d’autrefois). Ces nouvelles séries sont lancées à l’automne 1992, à raison d’une par mois, et un fil rouge court entre les premiers numéros de chacun, celui du retour de Lilith la reine des démons.

Dans Ghost Rider 28, le héros a la vision de la menace, mais également des alliés qui peuvent l’aider. Ce qui explique qu’il arpente les terrains de jeu de tous les autres. La grosse baston située dans son numéro 31 permet de rassembler tous les gentils contre tous les méchants, Mackie avançant ses pions quant au destin de Dan Ketch.

L’ensemble est sympa, globalement lisible (malgré quelques planches bâties de manière spectaculaire mais au sens de lecture bordélique), et le choix des dessinateurs est plutôt sympa : Ron Wagner dessine Morbius, Ron Garney illustre Nightstalkers (et Tom Palmer vantait déjà la qualité de son dessin), quant aux fistons Kubert, ils se chargent des deux séries de motards.

L’ensemble navigue dans les eaux du Jim Lee de l’époque, avec plein de hachures partout et une narration qui cherche surtout à faire spectaculaire au détriment de la narration. Mais ça reste très sympathique et distrayant.

Étonnamment, Richard Case dessine Darkhold, donnant une petite touche Vertigo à la série. Ce qui démontre que l’ensemble de la collection est construite de bric et de broc en copiant les influences en vogue à l’époque.

Le plus bizarre dans ce TPB, c’est son apparence. La couverture est splendide, à rabats, avec un gaufrage pour le titre et un vernis sélectif doré. Le papier est épais, ce qui donne une très belle main à l’ouvrage. En revanche, parfois, la découpe des pages fait que les bulles sont tronquées (c’est rare, une page ou deux).

Et truc encore plus bizarre, il n’y a ni ours ni mention légale. L’ensemble de la pagination est bourré par les pages de BD, sans rien de plus, ni encadrement éditorial ni illustration, ni rien. Quel drôle de bouquin, impossible à dater. Et pourtant très bel objet.

SpiritsOfVengeance

J’ai appris récemment que cette saga a été rééditée au sein d’une nouvelle édition, avec les six premiers numéro de Spirits of Vengeance. Sans doute avec un papier glacé et moins épais, ce qui fait qu’il doit être aussi épais que l’édition que j’ai. Il faudra que je compare, un jour.

Jim

(*) Rappelons que le « grim & gritty », au départ, c’est la plongée des super-héros dans un monde réaliste, celui du quotidien. C’est une évolution des super-héros à problèmes chers à Stan Lee. Le « grim & gritty » tire ses origines dans le cancer de Captain Marvel ou l’alcoolisme de Tony Stark. Hank Pym qui bat sa femme ou Flash qui perd sa fortune et devient clodo, c’est du grim & gritty. Mais cette dimension a été éclipsée par les fusillades du Punisher ou par les bastons mystico-infernales du Ghost Rider.