Avant d’entamer ma relecture de la période Big Time, j’ai eu envie de me replonger dans les arcs précédents de Dan Slott qui correspondent à l’ère Brand New Day, généralement ceux qui ont montré la capacité du scénariste à redonner une certaine fraîcheur à la série avec un bon mélange d’humour et d’imprévisibilité, le tout soutenu par un usage malin de la continuité dans sa façon de piocher dans diverses périodes, même les plus décriées.
Le tpb « Died in Your Arms Tonight » inclut pas mal d’histoires annexes à l’intérêt variable, avec notamment un court récit où l’on retrouve un caméo de Stan Lee en psychiatre, et qui vaut surtout pour la présence de Marcos Martin.
Le style détaillé et tout en sensibilité de Colleen Doran se prête bien à une histoire centrée sur la relation entre l’oncle Ben et son neveu (je me rappelle qu’elle avait déjà illustré une belle histoire courte sur une gamine sdf, qui fonctionne un peu sur le même principe que le fameux back-up de Roger Stern aka « The Kid Who Collects Spider-Man »).
Enfin l’annual à l’intrigue assez convenue et anecdotique se sert de la saga du clone pour introduire un nouvel antagoniste éphémère. Cet épisode est dessiné par Pat Olliffe, ce qui est plutôt plaisant quand on est fan des Untold Tales de Busiek.
Le gros morceau de ce recueil c’est l’épisode 600, qui marque le retour en fanfare d’Octopus après une relativement longue absence.
À force le niveau de dangerosité du personnage semblait s’être émoussé avec les années, un peu comme si les lecteurs et les créatifs prenaient certains vilains issus de l’ère classique pour acquis, tellement iconiques qu’à force il font partie intégrante du décorum du titre. Ils n’ont plus l’attrait de la nouveauté, et après s’être pris une raclée à de nombreuses reprises, ils montrent parfois des signes de fatigue, nécessitant du coup leur prise en charge par un scénariste inspiré capable de les revitaliser.
Dans ce cas il est donc parfois nécessaire de frapper un grand coup, en ramenant ces vilains sous un angle plus ou moins inédit, pour démontrer de nouveau leur importance et réaffirmer leur place au sein de la série (The Gauntlet s’inscrit également dans cette démarche tout en étant beaucoup moins satisfaisant).
Ce fut le cas avec DeMatteis qui fit de Kraven un adversaire inoubliable au crépuscule de son existence, en lui concédant une dernier baroud d’honneur d’envergure (une histoire prévue au départ pour Wonder Woman et son frangin le Grim Reaper) qu’il lui aura offert en guise d’adieu, sa plus belle histoire finalement, lui permettant d’accéder à une certaine stature, une dimension tragique au moment de son trépas.
Le récit débute en faisant le point sur le piètre état de santé d’Octopus, car malgré son irradiation, il n’a pas pour autant acquis une robustesse en mesure de lui permettre de tenir la distance sur le long terme. Forcément quand le Hulk de Keown l’étale avec une simple pichenette (une revanche de la part de PAD qui n’avait pas apprécié la manière dont Larsen avait traité le géant de jade) cela a tendance à laisser des séquelles.
C’est assez bien vu, et cette fin programmée lui donne une motivation renouvelée, comme cela a pu être le cas avec la mère du Death-Stalker dans le cadre de l’épisode de Daredevil avec la maison piégée.
Rétrospectivement cet épisode marque un véritable retour en force graduel pour celui qui avec Norman Osborn s’est le plus immiscé dans la vie privée du héros, étant donné qu’Octavius a eu des vues sur l’increvable tante de Peter depuis les années 60.
Les autres prétendants l’ont depuis vite remplacé, mais c’est sans compter sur Slott qui aime bien appuyer là où ça fait mal, en particulier pour son héros fétiche, qui apprend lors du numéro 699, et de la pire des façons, que sa tante semble bel et bien avoir fauté avec le savant fou rondouillard, juste avant leur tentative de vie maritale sous l’égide du scénariste Gerry Conway.
En ce sens le travail effectué par le scénariste à compter de cet épisode anniversaire est remarquable dans cette façon de lui redonner une motivation et un degré de dangerosité qu’il n’avait plus depuis les années 90, sans oublier sa présence dans la formidable adaptation qu’est Spider-Man 2 de Sam Raimi, qui n’a pas oublié la dimension fondamentale de figure paternelle négative qui relie les antagonistes les plus mémorables du héros.
Le personnage a droit à un relooking plutôt efficace façon momie high-tech, bien éloigné de la version originelle et pour cause.
N’ayant qu’une connaissance partielle de la série, je ne saurais dire si Slott a encore trouvé là le moyen d’inclure une référence à Docteur Who (la série du Surfer en est truffé, mais dans ce cas-là, cela m’a l’air plus diffus) dans le cadre du plan de Dock Ock de contrôler la grande pomme par le biais de la technologie environnante.
Depuis l’excellente mini-série Spider-Man/Human Torch (peut-être bien ce que Slott a fait de mieux jusque-là dans sa carrière avec son run d’anthologie sur She-Hulk) le scénariste a su montrer avec brio sa manière de gérer la dynamique propre à ces deux héros, dans sa façon de dépeindre à merveille la complicité qui unit les deux, en dépit de leur tendance à se chamailler continuellement. Cela donne lieu dans le cadre de cet épisode à des échanges plutôt efficaces, à base de ping-pong verbal et de remarques bien senties.
Le scénariste a la bonne idée d’éloigner la Torche humaine de son terrain de jeu habituel, ce qui donne souvent lieu à un résultat détonnant, à l’instar de ce qu’a fait Ann Nocenti sur le titre de tête à cornes, lorsque Johnny Storm s’est retrouvé dans les bas-fonds d’Hell’s Kitchen, pas une mince affaire pour celui qui est plus habitué à combattre Annihilus que des loubards patibulaires. À propos de DD, son alliance avec Spidey débouche sur une discussion qui porte sur un sujet assez ironique a posteriori, à l’aune de ce que Soule semble faire actuellement (en tout cas je présume vu que je n’ai pas lu le début du run en question) puisque le justicier aveugle considère que son camarade est chanceux car il a réussi à rétablir son identité secrète.
Slott s’amuse avec plein de petits détails qui font la différence en jouant avec les situations, avec notamment le fait qu’en plein Dark Reign il y a plusieurs équipes qui prétendent être les véritables Vengeurs, certaines avec plus de légitimité que d’autres, ou encore ce moment où Hydro-Man passe par les toilettes du bar sans nom pour échapper à la police.
Même s’il n’a clairement plus le niveau d’antan, JRjr se débrouille convenablement avec ce personnage qu’il connaît par coeur, bien secondé par Janson, et dans une bien moindre mesure par Dean White, qui n’y va pas de main morte sur les effets et les teintes assez saturées.
Mark Waid embraye dans la foulée avec l’épisode suivant, en débutant avec une intro qui s’inscrit à fond dans la veine « soap opera » du titre (Peter se réveille avec une nénette dans son plumard, mais il est plutôt surpris quand il découvre de qui il s’agit). La partie graphique est l’oeuvre de Mario Alberti bien, dans le ton de l’histoire avec son trait souple et dynamique qui dégage parfois un feeling à la Leonardi pas déplaisant dans les scènes en civil.
Pour ceux que ça intéresse, voici un billet de Phil Cordier, qui revient sur l’évolution graphique de Romita Jr dans sa façon de représenter le monte-en-l’air au fil des décennies, notamment au niveau de la silhouette plus ou moins musclée selon les périodes.
philcordier.blogspot.fr/2015/12/ … ignee.html