Discutez de Scarlett Dream
Ah, ben tiens, dans le même carton que la Vallée des Ghlomes, il y avait deux albums de cette série (le troisième et le cinquième ou sixième, j’ai un doute), et ça m’avait plus plu… Il faudrait que je relise ça, à l’occasion, tiens… Je n’aurai peut-être plus le même avis.
Tori.
Toi aussi tu as des histoires de BD en carton …
Et moi aussi, j’ai des BD dans des cartons non déballés… qui ne datent pas de mon dernier déménagement, mais du précédent (mais bon, ce n’était qu’en 2005, après tout).
Tori.
La grande majeure partie des cartons datent de juste avant la naissance de ma fille … y a eu 2 déménagements entre temps !
Quand je vois que chez ma mère, il y a encore des cartons qui datent de son déménagement de 1979, ça fait un peu peur… ~___^
Bon, moi, il n’y a que des cartons de livres et de DVD (et pour les mangas et les DVD, j’ai un fichier Excel indiquant ce que chaque carton contient… J’y ai pensé trop tard pour les premiers cartons de BD).
Tori.
Ah bah là, on ne joue pas dans la même cour …
Je dois avoir le cinquième, pour ma part. Il faudrait que je regarde, précisément.
J’aimais bien cette héroïne, espionne rousse chez qui quelques commentateurs voyaient une ressemblance avec Marlène Jobert (ses cheveux longs ne m’ont jamais rendu la similitude frappante, pour ma part).
Espionne rousse ? Oui, mais vêtue de blanc, et non de noir comme Natacha Romanov. Ses aventures la mènent dans tous les coins du monde. Avec pour particularité d’être un peu plus sage visuellement à mesure que la série avance, celle-ci étant reprise par Dargaud à partir du troisième tome (et je crois que ça correspond aussi à l’arrivée de la couleur sur les planches).
Les deux premiers sont publiés par Eric Losfeld puis à la SERG (avec, d’après ce que je vois sur Bédéthèque, une préface de Stan Lee : il va vraiment falloir que je le trouve, ce tome).
La création du personnage dans le giron de Losfeld (j’ai lu quelque part que Scarlett Dream est apparue dans une revue appelée V Magazine, dirigée par Forest, en 1967, et qui semble être une publication pour messieurs ornée d’une couverture photographique présentant une jolie pin-up) correspondant à cette période ayant vu la naissance de Barbarella ou de Pravda la Survireuse, culmination de deux mouvements, celui de la libération de la femme et celui du sacre de la femme-objet, l’un semblant ne pas pouvoir aller sans l’autre dans un amusant paradoxe.
Jim
Oui, mais elle s’appelle Scarlett, comme une certaine actrice… ~___^
Tori.
Récemment, à l’occasion des premières dédicaces pour Fredric, William et l’Amazone (dont je vous recommande la lecture, si vous n’avez pas entendu parler de l’album), je me suis retrouvé à déjeuner avec les membres de l’AMBD, une petite amicale de la région d’Évreux réunissant des amateurs de bande dessinée, parmi lesquels quelques professionnels (Thierry Olivier, Christophe Dépinay, Thierry Lamy…). Et nous avons notamment discuté de V Magazine (ou simplement V).
Laurent, l’un des participants à ce repas déguisé en réunion informelle, nous a amenés des exemplaires de V Magazine, datant respectivement d’avril 1949 et décembre 1950 (si mes informations sont justes, la revue est née en septembre 1944). Ces numéros sont notables, pour Laurent, notamment grâce aux couvertures présentant des pin-ups peintes par l’illustrateur Jean David, un dessinateur d’origine marseillaise qui signait également des bandes à l’intérieur, notamment « Les Amours de Barbara Smith ».
Contrairement à ce que j’ai écrit plus haut, dans les années 1960, ce n’est apparemment pas Éric Losfeld qui en était rédacteur en chef, mais un dénommé Georges-Hilaire Gallet, renommé non seulement pour son goût pour les jolies filles et les dessins coquins, mais aussi pour son attirance envers la science-fiction (apparemment, des textes de genre ont été publiés dans les pages de V Magazine).
Pour de plus amples infos, je vous invite à lire la fiche wikipédia du monsieur :
C’est ce monsieur qui a invité dans les colonnes de son magazine des illustrateurs qui, jusque-là, n’avaient pas fait de bande dessinée. Il s’agit de gens comme Jean-Claude Forest, Georges Pichard ou Robert Gigi. Cela vaudra donc la création de séries telles que Barbarella, Blanche Épiphanie ou Scarlett Dream.
C’est à ce moment qu’intervient Éric Losfeld, éditeur belge qui se qualifie lui-même se « surréaliste ». En lien avec Gallet, il recueille les aventures des héroïnes dénudées que publie ce dernier sous forme d’albums, attirant le regard courroucé de la censure.
Si vous tapez « V Magazine Losfeld » sur un célèbre moteur de recherche, vous tomberez, sans doute dès le premier lien, sur un PDF compilé par Thierry Groensteen et se faisant l’écho d’une conférence de Benoît Preteseille, qui explicite les liens entre l’éditeur et la fameuse « bande dessinée adulte » dont on parle souvent dans ces colonnes.
Ce qui frappe dans les propos du conférencier, ce sont les indications claires de l’importance d’un support de presse dans l’émergence d’une bande dessinée adulte qu’on croit souvent née dans l’album. Or, ce n’est pas tout à fait ça.
Il ouvre son intervention par une remarque intéressante :
Une bande dessinée différente, plus adulte, émerge en effet dans le début des années 60 en France. Cela se fait en dehors du milieu traditionnel de la bande dessinée qui était plus tourné vers le public des enfants, et les choses bougent notamment dans un support de presse catalogué comme érotique : V Magazine.
Et de poursuivre :
Périodique largement oublié, V Magazine a eu une grande importance pour l’émergence d’une nouvelle forme de bande dessinée, il a contribué à la maturation du travail de Forest, Georges Pichard et Robert Gigi, qui tous trois publieront un livre chez Éric Losfeld. Aucun pourtant n’y fait de la bande dessinée avant 1962. Cette année-là, c’est dans les pages de V Magazine que Forest commence Barbarella, suivant l’impulsion de son rédacteur en chef, Georges-Hilaire Gallet.
Et de citer les propos (amusants) de Forest :
« Conçu pour ‘V. Magazine’, journal assez orienté, il fallait que ce soit assez léger ; j’avais presque la contrainte de montrer mon héroïne pratiquement nue à toutes les pages. Contrainte que je n’ai même plus dans le second album. J’ai pu me permettre de tenir plusieurs pages sans déshabiller Barbarella. »
Puis :
Malgré une certaine retenue qui s’estompera dans les œuvres suivantes de Forest, ce récit s’écarte nettement de ceux qui étaient proposés dans la presse jeunesse au même moment, les commentaires des critiques le démontrent bien. V Magazine continuera l’expérience avec Scarlett Dream de Gigi et Moliterni, Blanche Epiphanie de Pichard et Lob, ou les deuxièmes aventures de Barbarella.
Et surtout :
Mais si la création de Forest a fait date, c’est surtout grâce au fait qu’elle est sortie des pages d’un journal équivoque pour devenir un livre.
Certes, l’accès au livre donne une pérennité à l’héroïne, mais le conférencier ne manque pas d’insister sur le dynamisme de V Magazine. Ces rappels ont bien le mérite de sorte de l’ombre une réalité que les commentateurs, pendant des décennies (en tout cas ceux à qui j’ai eu accès) se sont empressés d’escamoter, à savoir que la BD franco-belge dite adulte a fait ses premiers pas en kiosque.
La suite de la conférence (compilée sous forme de PDF) s’attarde davantage sur le travail de Losfeld, s’éloignant de Gallet et de sa revue légère. Mais cela mérite le détour, donc n’hésitez pas à le consulter.
Jim
Ah oui quand même !
Le temps passe à une vitesse, c’est fou…
Jim
Ah oui quand même
Aussi, oui.
Bon, ça va, hein !
Fais une photo de ta dédicace de Gun Club, plutôt, au lieu de te moquer !
Jim
Pas eu de dédicace … pas pensé à demander … (bon, Niko en fait 3 autres sur ses deux bouquins et le Disney … j’étais ému devant une telle offrande, en fait … même pas pu lui payer une bière pour la peine)
Il est méchant, Niko, hein !
Infirmière ?
Et la photo, alors ?
N’entretiens pas ses vices, non plus !
Jim
Minute papillon … j’ai 11 dédicaces à prendre en photo dans ce cas.
Chouette !
Jim
J’avais gardé un bon souvenir de Scarlett Dream en général, surtout à cause du dessin de Gigi, mais un souvenir plus mauvais des scripts de Claude Moliterni en général. J’ai remis le nez dans À deux pas de l’enfer, et c’est pire que dans mes impressions.
Le scénario se traîne, les dialogues sont répétitifs (et maladroits, sans caractérisation), l’ensemble donnant l’impression d’un remplissage peu habile. L’histoire raconte de quelle manière Scarlett et son équipiers sont contactés (alors qu’ils sont sous couverture dans une école de danse) et sont rapidement mêlés à une affaire de détournement d’avion visant à cacher l’enlèvement d’un savant (dont le look laisserait penser à Donald Sutherland qui ferait un cosplay d’Albert Einstein) par Styx, un adversaire des héros, qui détient une bombe capable de défolier des régions entières.
Après une tentative d’évasion avortée, Scarlett est contrainte de s’allier à Styx afin de dérober des documents secrets dans la république corrompue du Saranguay, moment où le récit s’enfonce dans le pastiche jamesbondien, avec gadgets, déguisements, décors insolites et grandioses, tout ça. L’album se conclut sur un cliffhanger (le volcan, le volcan, le volcan…) et malgré les dessin de Gigi, qui dans ses meilleures cases s’aligne un peu sur Gillon (alors que dans le reste de l’album, il est du niveau d’un Forton, ce qui est déjà pas si mal), cela ne donne pas envie de lire la suite.
Qu’est-ce que ça a mal vieilli, tout de même.
jim
Modesty Blaise?