Chez Arédit/Artima, le pocket Spectral faisait partie de ces revues dédiées aux recoins les plus sombres de l’univers DC…et la série mise en vedette était celle de la Créature du Marais, le Swamp Thing, tout au long des trois incarnations du titre : un premier pocket de 15 numéros entre 1974 et 1977, un deuxième pocket de 25 numéros entre 1978 et 1984 et un troisième volume de 16 numéros entre 1985 et 1988 (l’un des tout derniers bouquins de l’éditeur avant sa disparition en 1989).
Je n’ai que deux numéros de Spectral sous la forme d’un album relié comprenant les #13 et 14 du volume 1. Swamp Thing ouvre chaque sommaire avec deux épisodes qui correspondent à la reprise de la série par David Michelinie (le précédent scénariste étant Len Wein). Les Etres du Futur (Swamp Thing #14) reprend une scène classique des récits de monstres, celle d’êtres au physique difforme poursuivis par une foule en colère. Et ce qui fait bouillir les veines pleines de sève de celui qui fut Alec Holland est que les victimes sont cette fois des enfants. Après un affrontement qui tourne en faveur de Swamp Thing, la créature en apprend plus sur l’histoire des enfants qui vivent dans une partie des marais contaminée par des produits chimiques. Ce qui donne également lieu à des visions d’insectes gigantesques comme dans les séries B de monstres des années 50.
L’épisode monte bien en puissance, avec une dernière partie intense et un final qui souligne impitoyablement l’hypocrisie des habitants envers les jeunes mutants, au grand dégoût de la créature. Un Alec Holland qui retrouve ses vieux amis Matt Cable et Abigail Arcane dans un #15 à la menace plus surnaturelle, un démon invoqué par un homme d’église désabusé. Malgré quelques dialogues un brin mélodramatiques, les scénarios de Michelinie sont bien ficelés et la partie graphique signée par le phillipin Nestor Redondo est impeccable, son travail sur les textures et son sens du détail faisant des merveilles sur ces ambiances horrifiques.
Dans Spectral, on retrouvait aussi régulièrement les aventures du Spectre et du Shadow. Les Spectre étaient tirés de la revue Adventure Comics pour une courte série en grande partie réalisée par Michael Fleisher et l’excellent Jim Aparo. Les auteurs ne se donnaient pas de limites dans les représentations les plus macabres des « punitions » données par l’esprit de la vengeance, sans gore malgré l’aspect horrible de ces exécutions, ce qui a donné lieu à quelques critiques dans le courrier des lecteurs de l’époque. C’est en tout cas très efficace et délicieusement morbide. Pour le Shadow, on replonge dans une ambiance plus pulp avec les #10 et 11, des enquêtes riches en action et en rebondissements, le scénariste Michael Uslan (futur producteur des films Batman) faisant même intervenir un autre héros de ces magazines bon marché dans le #11 en la personne de l’Avenger, un ersatz de Doc Savage.
Le reste du sommaire est composé d’histoires courtes extraites des différentes anthologies fantastico-horrifique de DC Comics telles que Ghost, House of Mystery et House of Secrets. Je reste assez friand de ces historiettes, certes inégales mais avec souvent de bonnes idées, de bonnes chutes et une atmosphère aussi soignée que les planches de dessinateurs comme Wally Wood, Lee Elias ou encore Alex Niño.