[quote=« Le Doc »]L’une des forces d’Oculus, c’est cet équilibre très réussi entre drame et horreur, entre fantaisie et réalité, entre réel et irréel. Mike Flannagan prend d’abord le temps de décrire la relation entre ce frère et cette soeur dont la jeunesse a été brisée par un événement traumatique, la perte de leurs parents causée par un miroir démoniaque. La faute était pourtant retombée sur le cadet, qui s’est persuadé après des années en hôpital psychiatrique que l’horreur de cette fameuse nuit a été causée par la folie de leur père. La soeur, quant à elle, reste convaincue que le miroir est la cause de tout et a préparé une confrontation avec l’entité qui se trouve à l’intérieur.
J’ai aimé la façon dont le réalisateur et scénariste sème constamment le doute sur la véracité de ce qui se déroule, par des fausses pistes, par des effets de montage. Le montage est d’ailleurs très important puisqu’on assiste en parallèle aux actions du passé et du présent…deux temporalités qui ne cessent de se chevaucher pour mieux se rejoindre dans un final de plus en plus ébouriffant. L’entité maléfique brouille autant la réalité que les sens et il devient alors aisé de se perdre dans cette ambiance cauchemardesque.
C’est bien réalisé, très bien interprété (autant par les gamins que par les adultes), les effets chocs et les visuels horrifiques sont redoutablement efficaces, le suspense est palpitant…bref, un très bon film d’horreur ![/quote]
Alors je serai un poil moins enthousiaste (bah ouais, je viens de le voir : en général, quand le Doc aime bien, je suis curieux). C’est très sympa, mais l’expression « final ébouriffant » m’a sans doute un peu trop bien vendu le truc.
C’est quand même très basique, comme postulat de départ : un personnage traumatisé (on pense au Haunting de Robert Wise), une maison (là, relativement moderne et pavillonnaire, ça change, mais pas tant que ça…), une volonté de rationaliser, des lampes qui s’éteignent (Poltergeist, tout ça…), un homme qui travaille à son bureau et des papiers qui témoignent de son obsession grandissante (Shining…). Le miroir lui-même est également l’une des portes d’entrées du fantastique, donc, pareil, terrain connu.
Après, le scénario s’amuse à tromper les attentes en posant plein de jalons (le chien, les caméras…) et en proposant d’autres solutions. D’une part, ça surprend le spectateur en mode « on me la fera pas à moi », et d’autre part ça permet de maintenir l’atmosphère « on va rationaliser tout le bazar ». Du coup, on a une moitié de film où la tension repose sur la fratrie qui se déchire autour d’un passé douloureux.
L’autre moitié, c’est l’intrigue fantastique elle-même. S’il reste quelques trucs hautement prévisibles, c’est assez bien mené. La folie n’arrive pas toujours là où on l’attend, donc c’est pas mal. Ça fonctionne un peu comme un virus, il y a quelque chose de très maladif dans la représentation de la démence, c’est plutôt bien vu.
Ensuite, effectivement, le montage est assez fort, il joue sur les perceptions des protagonistes, mais aussi sur celles des personnages. Comme une sorte de mise en abyme. C’est bien foutu.
Autre truc intéressant, le film tourne autour des souvenirs du frère et de la sœur. Du coup, on navigue entre présent narratif et flash-back, mais au final, on peut même se demander si, à l’intérieur de la maison, le temps ne fonctionnerait pas de manière différente, en boucles, en nœuds, en croisillons. Comme si, au final, la fratrie adulte revit ce qu’elle a vécu enfant, les jeunes étant témoins aussi de ce qu’ils vivront plus tard. Et là, ça crée une temporalité vraiment intéressante.
L’autre point fort, c’est que le film, travaillant sur les impressions, est d’une sobriété de chameaux sur les effets gore. C’est rafraîchissant, ça soulage, renouant avec une dimension implicite de l’horreur.
Alors oui, c’est pas mal. Surtout parce que les personnages sont crédibles à force d’avoir été travaillés en amont. C’est pas le film de possession / malédiction / fantômes du siècle, mais c’est plutôt roublard et bien ficelé.
Je suis moins enthousiaste que le Doc, mais j’y trouve pas mal de qualités.
Jim