THE SILENCE (John R. Leonetti)

De terrifiantes créatures ont envahi la Terre, chassant leurs proies humaines au bruit. Pour leur échapper, les Andrews se réfugient dans un lieu isolé, mais découvrent un culte sinistre qui cherche à exploiter les sens suraiguisés de leur fille Ally, sourde depuis ses 13 ans.

Avec notamment Stanley Tucci, Kiernan Shipka, Miranda Otto.
Production Netflix : The Silence | Netflix Official Site

Netflix m’a proposé ce film après que j’ai vu la deuxième partie de Chilling Adventures of Sabrina (bien, mais plus maladroit et moins puissant que la première partie). Notamment parce qu’on retrouve ici deux actrices de la série : la jeune Kiernan Shipka (Sabrina), et Miranda Otto (Zelda).
Bon, soyons honnêtes : le film surfe sur l’engouement récent pour les films liés à un sens. Sans un bruit a été un immense succès, Bird Box aussi, et Netflix entend retrouver la puissante réussite de ce deuxième film, produit par le distributeur.
Clairement, The Silence n’a pas la même qualité, même si ça n’en fait pas pour autant un mauvais film.
Cette fois-ci, on a une explication et un visuel pour les fameuses créatures qui s’en prennent à l’Humanité. Elles détectent le son, sont aveugles, et on suit une famille tentant de survivre à ça ; avec la fille qui est sourde, suite à un accident. Suivent les péripéties attendues, la perte d’un ami de la famille, la découverte d’un sanctuaire, une menace bien humaine et terrible, un combat sauvage, un sacrifice… et un final ouvert, plein d’espérance contrastée.
Oui, le film est fortement prévisible, voire même convenu. Et The Silence emprunte tellement à d’autres films similaires que ça flirte avec la copie, un pas aisément franchi lors de « la bataille finale », avec un personnage qui suit le même destin qu’un autre dans Sans un bruit. Mais ça ne m’a pas gêné : je suis plutôt bon public, j’ai été happé par la tension successive au fil des scènes, et j’ai apprécié plusieurs éléments de ce film court (1H30) qui propose plusieurs rebondissements et avancées dans une telle durée.
Déjà, les acteurs sont bons et impliqués : Stanley Tucci est toujours propre et professionnel, et incarne un père qui tente de gérer comme il peut, en palliant son manque de présence physique ; Miranda Otto quitte l’allure stricte et sévère de Zelda pour une mère sympathique et attentionnée, en belle synergie avec son époux ; et Kiernan Shipka est encore une fois très bien, dans ce portrait difficile d’une jeune fille sourde, perdue mais pas stupide ou débile. Surtout, j’ai apprécié d’avoir plusieurs rebondissements, plusieurs « moments » sans qu’ils soient trop longs ou trop étirés. De même, le fait d’avoir une « origine » à tout ça, ça devient rafraîchissant, car les films similaires veillent généralement à ne rien en dire, et ça devient lassant.
Et, encore une fois, la durée courte, le nombre de rebondissements, et un rythme efficace, tout ça rend le visionnage très agréable. La direction d’acteurs est bonne, la photographie est discrète mais efficace, et plusieurs plans sont jolis et travaillés. Le final, en plein orage, est très beau ; et le réalisateur gère bien et ses personnages, et les quelques idées pertinentes du script (cette fameuse secte un peu tombée de nulle part, mais flippante, avec deux idées de pièges bien dégueulasses, mais bien trouvées).

The Silence n’est pas un grand film, ni un film dont je me souviendrais forcément. Mais c’est un film qui gère bien ses tensions, minimes (on ne bondit pas, on ne détourne pas le regard de terreur), et fournit plusieurs rebondissements pour que l’ensemble soit agréable. Avec de bons acteurs, un script « pas fou » mais cohérent et solide, ce film est un divertissement correct et honnête, bien qu’il suive de très près ses glorieux aînés, eux-mêmes pas sans défaut.
Il y aura sûrement d’autres « copycats » de Sans un bruit & Bird Box, et The Silence ne restera pas dans les mémoires ; mais il n’est pas honteux, et fait passer un bon moment. Une bonne réussite, du coup, pour ma part !

Tu vends bien le truc, cela dit.

Jim

J’espère ne pas trop décevoir, du coup.^^ J’ai conscience d’être très bon public.

On va voir. Je trouve beaucoup de défauts à Sans un bruit, donc je suis curieux, là…

Jim

Lesquels ?

Je suis en train de le regarder, et plusieurs choses me frappent.
En premier lieu, c’est thématiquement une suite de The Cave / La Crypte, le film de Bruce Hunt avec Cole Hauser et Lena Headey, qui se conclut justement sur « l’évasion » de la créature (sous une forme différente, certes, mais également aveugle et utilisant une « écholocation »), qui sort de la grotte, correspondant au moment où The Silence commence.
Ensuite, ce qui est intéressant, c’est que la menace, si elle est rapidement identifiée, il faut environ vingt-cinq minutes avant que la famille y soit confrontée directement. Ce qui fait monter la tension, au sein de la famille, mais aussi dans la société (quelques petites saynètes permettent de montrer des moments aussi forts que discutables sur la réaction des gens.
Enfin, la menace en elle-même est pas mal du tout : là encore, ce n’est pas la créature (sorte de croisement entre une chauve-souris et un bébé ptéranodon) qui est inquiétante, c’est son nombre. Ce qui permet de véhiculer des peurs souvent associés aux récits de zombies ou de contaminés. Plutôt bien joué.
Bon, je continue mon visionnage, mais je trouve pour l’instant que c’est pas mal du tout.

Jim

Et le reste t’a plu ?

Oui oui.
J’aime bien la double révélation, à la fois le cycle de vie des créatures et les sordides motivations des « méchants », qui tombe à peu près au même moment et crée un parallèle intéressant sur le thème de la survie (deux espèces qui se retrouvent en milieu hostile et qui tentent de subsister). Le piège tendu par l’autre groupe est astucieux, mais à partir de là, le film accélère un peu, de sorte que la fin paraît rapide, voire bâclée.
Mais grosso modo, j’aime bien, ouais : c’est un petit film qui promet peu, mais tient ce qu’il avance. En cela, je le trouve plus réussi que Sans un bruit, qui promet beaucoup et, selon moi et pour des raisons déjà évoquées, ne tient pas toutes ses promesses.

im

Oui, The Silence a une ambition mesurée, presque humble, mais qu’il assume et qu’il réalise ; c’est bien, aussi, des « petits » films qui ne veulent pas faire plus, mais réussissent ce qu’ils veulent faire.

Oui, j’aime ça aussi en BD, en roman… J’apprécie parfois beaucoup des petits films avec de petites ambitions, mais qui remplissent leur contrat.
Dans un genre voisin, j’aime beaucoup [REC] (surtout le premier), mais ce premier opus ne tient plus son postulat de départ quand on arrive au rembobinage de la scène du couloir. Ça ne tient techniquement pas la route, ça ne correspond pas au pari du « found footage » (là où le rembobinage dans Cloverfield n’est pas montré - logique - mais apporte d’autres éléments narratifs).
Je crois que mon approche est liée à ce qu’Artemus Dada appelle (je crois), le pacte de lecture : des choses annoncent, souvent en ouverture du récit (ou sur la couverture, ou dans la bande-annonce) une perspective, un parti pris. Si la découverte du récit ne correspond pas à cette annonce, pas en termes de surprises et de coup de théâtre (Matrix annonçait un film avec des hacker et des hommes en noir, et en fait c’est pas ça, la révélation est frappante), mais plutôt en termes de constance dans le suivi du projet, ça me fait en général tiquer, surtout quand le changement semble ne pas être voulu (la scène sonore dans The Artist, c’est voulu, par exemple). C’est pour cela aussi que Pyramide, de Grégory Levasseur, m’a déçu, parce que les changements de registre m’ont semblé arriver au petit bonheur la chance.
Ce matin, je passe chez un libraire et j’ouvre Les Mentors, de Zidrou et Porcel. Parce que je suis attiré par une couverture qui me semble annoncer de la science-fiction. Et en fait, j’ai un thriller contemporain. Alors bien entendu, il est possible que j’aie vu des intentions dans la couverture qui ne sont pas celles des auteurs, auquel cas j’ai compris de travers, mais j’ai eu l’impression que le « pacte de lecture » n’était pas respecté.
À tout cela se rajoute le fait que j’ai toujours bien aimé le « cinéma modeste », celui qui est capable de faire du « genre » sans claquer un budget colossal, mais simplement en essayant de raconter une bonne histoire d’une manière simple. Un film d’une heure et demie sans esbrouffe, j’aime bien.

Jim