Je profite de cette année anniversaire pour déterrer des profondeurs du forum mon article de 2014 sur le film Spider-Man avorté de la Cannon…
LE SPIDER-MAN DE LA CANNON
Marvel est maintenant une puissance cinématographique, mais il fut un temps où ce n’était pas du tout le cas…et je parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître.
Dans les années 70/80, les personnages Marvel étaient surtout représentés à la télévision, avec des résultats plus ou moins heureux. La plus célèbre adaptation de l’époque est toujours la série L’Incroyable Hulk avec Bill Bixby et Lou Ferrigno, qui a pris d’énormes libertés avec le matériel de base mais qui est restée ancrée dans l’inconscient collectif notamment par le biais des aussi répétitives que mythiques scènes de transformation (que j’attendais avec impatience étant gamin).
Il y eut aussi un pilote du Dr Strange qui n’a pas débouché sur une série et des choses encore plus cheap comme les téléfilms Captain America et le feuilleton Spider-Man .
Avant d’être porté à l’écran avec le succès que l’on sait par Columbia/Sony et Sam Raimi en 2002, l’Homme Araignée passa plus d’une dizaine d’années dans les limbes du development hell, avec des droits qui se sont baladés de Roger Corman à la MGM en passant par Carolco, 21st Century…et bien sûr la Cannon .
Comme souvent, ce fut d’abord Roger Corman qui acquit les droits cinématographiques de Spider-Man pour une bouchée de pain. Il ne les a pas gardés longtemps (heureusement, vu son nanardesque Fantastic Four, tourné mais jamais sorti sur grand écran) et le bébé fut refilé à la Cannon Films, les rois de la série B des années 80 (ah, ma jeunesse passée à regarder les American Ninja avec Michael Dudikoff, les Justiciers avec Charles Bronson et les plus mauvais films de Stallone…entre beaucoup d’autres choses), pour 5 ans avec option de retour des droits à Marvel si le film n’était pas réalisé avant 1990.
Tobe Hooper, le réalisateur du légendaire Massacre à la tronçonneuse , était sous contrat chez Cannon et fut désigné pour diriger Spider-Man , alors qu’il préparait la suite bien barrée de son chef d’oeuvre de 1974. Si Golan & Globus, les big boss du studio, avaient choisi un spécialiste de l’horreur, c’était surtout qu’ils n’y connaissaient rien aux comics : le premier script confié à Leslie Stevens ( Au-delà du réel ) voyait un Peter Parker transformé en araignée humaine monstrueuse (avec poils, huit bras et tout le toutim) par un savant fou à la Dr Moreau désireux de conquérir le monde avec son armée de mutants (!).
Et comme le duo israélien savait très bien vendre les concepts avant de les tourner, une affiche-teaser annonçait fièrement la production (voir ci-dessus).
Bien que Stan Lee laissait faire un peu tout et n’importe quoi avec les héros de la Maison des Idées (coucou Howard the Duck ), ce traitement n’était pas de son goût et il insista donc pour que des changements soient opérés. Exit donc l’option dark et Tobe Hooper. Le script suivant renvoyait Peter à l’université, avec un Docteur Octavius en mentor qu’il finira par combattre. Les origines de Spidey et du Docteur Octopus étaient d’ailleurs liées dans cette version.
C’est un autre habitué du studio, Joseph Zito ( Invasion USA avec Chuck Norris) qui hérite du projet, annoncé en pleine page dans Variety .
Pour le rôle-titre, de futures stars comme Tom Cruise et Charlie Sheen furent envisagées. Mais même si rien ne fut signé, c’est le cascadeur Scott Leva qui fut le plus longtemps associé au projet.
Dans les années 80, certaines couvertures de Marvel étaient illustrées par une photographie et Leva avait personnifié l’Homme-Araignée sur l’une d’entre elles (je ne sais pas si c’était monnaie courante, mais j’ai quelque part dans ma collection un numéro du Punisher avec une couverture-photo).
Il posa donc naturellement pour des images promotionnelles du studio.
La pré-production prit du temps, principalement à cause des multiples réécritures du scénario. Un court teaser fut tout de même tourné pour promouvoir le long métrage :
Et vous remarquerez que Steve Ditko, le co-créateur de Spidey, n’est évoqué à aucun moment sur les affiches et dans le teaser.
Superman 4 et Les Maîtres de l’Univers , deux productions plus onéreuses en tournage au même moment, mirent à mal les finances du studio (même si on peut quand même se demander où était passé le fric vu le résultat final de Superman 4 ). Cannon coupa donc le budget de Spider-Man en deux, ce qui provoqua le départ de Zito. Il fut remplacé par le bidouilleur Albert Pyun, le futur réalisateur du Captain America de 1990 (oui, ouch).
Finalement, après avoir dépensé plus d’un million de dollars sans résultats, Golan arrêta les frais mais sans abandonner totalement les droits puisqu’il parvient à les conserver jusqu’en 1992 via sa nouvelle boîte, 21st Century Film Corporation .
Ensuite, Carolco entra dans la danse ainsi qu’un certain James Cameron qui écrivit un traitement resté célèbre puisque l’un de ses éléments, la toile organique, se retrouvera dans la trilogie de Sam Raimi.
Mais ceci est une autre histoire…
L’Araignée, l’Araignée, est un être bien singulier. Dans sa toile, il attend d’attraper les brigands. Attention ! Car l’Araignée est là…