Les Vengeurs des années 50 (désormais plus connus en tant qu’Agents of Atlas depuis l’année 2006) par Frank Quitely (couverture variante faite en 1998 pour l’Avengers Forever#4 publié début 1999) :
À l’occasion du récent décès de Carlos Pacheco, son compère Kurt Busiek se remémore la genèse de leur magnum opus Avengers Forever (l’un des deux sommets du run de Busiek avec l’arc sur Ultron).
À la fin des années 1980, les Vengeurs sont populaires, en grande partie grâce au travail de Roger Stern puis de Steve Englehart qui ont remis en selle la licence. Si bien que les héros ont droit à deux séries mensuelles, diverses mini-séries, une présence dans toutes les grosses fiestas de l’époque, et aussi une anthologie également mensuelle, baptisée Solo Avengers et organisée selon la méthode suivante : une série à suivre consacrée à Hawkeye pour la première moitié, et une aventure en solo (d’où le titre) présentant un autre membre de la colossale équipe, dans la seconde moitié.
Ce sont donc des histoires courtes que la série propose, et en général la réalisation est plutôt de qualité. La série dans son ensemble est bien entendu inégale, la partie consacrée à Hawkeye étant souvent la plus faiblarde (sans être rédhibitoirement mauvaise non plus). Il faut dire que, quand le segment « solo » est bon… il est très bon !!!
C’est le cas notamment de Solo Avengers#19, daté de juin 1989, dans lequel Sandy Plunkett consacre un récit à Black Panther. Le récit se situe en Afrique, alors que T’Challa socialise « dans la haute ». Revenant de son séjour à l’étranger, il est pris dans un accident d’avion, et son appareil s’écrase. Le héros tente de protéger les autres passagers, dont Philip, un ami journaliste qu’il a rencontré lors de ses études à Princeton. Assailli par une créature qui est l’incarnation des souffrances (selon une légende africaine que Plunkett parvient à raconter dans ses onze pages), Black Panther est sauvé par Philip, qui décède dans des circonstances que je ne raconterai pas ici, mort qui est glissée dans une ellipse, à la fin, l’auteur profitant de plans sur les personnages et leurs émotions face au deuil.
L’histoire n’est peut-être pas sans défaut (beaucoup trop de choses en onze pages, si bien que c’est peut-être un poil précipité, un usage des bulles de pensée qui aurait pu être réduit…), mais elle fait montre de belles qualités, notamment une voix off très intéressante, avec juste ce qu’il faut d’ironie et de distance (signalons le formidable lettrage de Gaspar Saladino). Quant au dessin, il est formidable, Plunkett canalisant ses évidentes influences frazettiennes (l’encrage de Scott Hampton y est pour beaucoup aussi).
Une petite pépite qui montre à quel point la série Solo Avengers savait proposer une régulière qualité à ses lecteurs. Le récit est lisible ici :
Autre anthologie intéressante, et très inégale là aussi, Marvel Comics Presents, titre hebdomadaire lancé à la fin des années 1980 et dominée par la figure de Wolverine, super-star de l’époque, qui compte parmi les personnages du premier numéros et qui devient le pilier du titre, figurant sur toutes les couvertures : c’est dans Marvel Comics Presents que le héros griffu vit ses premières aventures à Madripoor grâce à Chris Claremont et John Buscema, mais c’est aussi dans cette revue que Barry Windsor-Smith publie Weapon-X, fixation des origines du héros sous une forme particulièrement réussie.
Dans Marvel Comics Presents#131, Sandy Plunkett signe une histoire d’Ant-Man. Ce n’est pas le membre fondateur Henry Pym, mais son successeur, Scott Lang. Le récit s’ouvre sur la fuite d’un homme, dont on apprendra plus tard qu’il s’agit d’un voleur ayant dévalisé une usine Stark. Lang le poursuit et arrive dans une maison où le voleur a planqué son butin et où il ne trouve qu’un enfant (la maman ayant pris sa soirée). L’intrigue inverse le thème classique de la « home invasion », puisque c’est le héros qui entre dans le foyer. Mais l’inversion est à double détente, puisqu’il s’agit aussi d’un détournement du pitch de Maman, j’ai raté l’avion, Scott Lang devant faire face à un sale garnement qui ne veut pas être laissé seul et qui s’en prend au héros miniature.
C’est drôle, rapide, plein de péripéties très visuelles (d’autant que sur la table trône un menu de réveillon, où les bombardements de purée prennent une autre dimension). Là encore, on voit l’influence de Frazetta dans le dessin de Plunkett (avec un encrage évoquant un peu Wrightson aussi, excusez du peu !), et ça fonctionne très bien. Et à la fin, le sale gosse est bien puni, et je partage le sentiment de satisfaction du héros.