PUNISHER (Vol. 6) #24-26 : L’HOMME D’EN BAS
Alors qu’il avait fini de traquer le dernier des truands de sa soirée dans les sous-sols du métro, le Punisher croise la route d’une assistante sociale, également bénévole à la soupe populaire, qui avait suivi un sans-abri qui lui avait parlé de « l’homme d’en bas », qui s’occuperait et nourrirait les malheureux comme lui. Cependant, elle se retrouvait en fait dans une embuscade organisée par plusieurs SDF, que le Punisher élimina sans réfléchir.
Sauf qu’en cherchant à remonter à la surface, un autre groupe les attaqua, et quand il se débarrassé d’eux, il décida de revenir avec du matériel pour faire le ménage.
Pendant ce temps, l’assistante sociale avait fui, mais elle finit par se retrouver dans l’antre de l’Homme d’en bas, et découvrit l’horreur de ce qu’il était : une homme malade mental, maigre et déformé, qui se nourrissait de ses victimes en vivant sous le monticule de corps.
En recherchant la sortie, elle recroisa Castle, qui fort d’une atèle et d’un arsenal qui ferait rougir Cable, l’emmena au repère, chassa les sans-abris qui restaient et brûla tout, y compris l’Homme d’en bas.
Le « vilain », si je puis dire, et l’intrigue, ne sont pas ce qu’a fait de mieux Garth Ennis. Encore une fois, on tombe dans le grotesque, dans plusieurs sens du terme, avec cette fois-ci en plus du morbide et du gore. L’auteur joue un peu avec nous en semblant présenter deux intrigues parallèles (puisqu’il n’y a aucun repère tempporel), mais à partir du deuxième épisode, on comprend que l’histoire du jeune garçon qui survit sous le poids mort de sa mère obèse, c’est celui qui deviendra l’Homme d’en bas.
Alors où se situe l’intérêt de ce nouveau triptyque ? Clairement dans les échanges entre l’assistante sociale et le Punisher. Alors, lire cela aujourd’hui, 20 ans plus tard, de cette manière, peut sembler peut être cliché. La femme qui fait dans le social, la bienveillance et la compréhension, face à l’homme (voire le mâle, alpha de surcroît), brute épaisse à la répartie lapidaire qui considère qu’elle ne comprend rien à la vie des malfrats, cela donne vraiment dans le standard de base. Sauf que les arguments et les pensées de la jeune femme me paraissent totalement cohérents avec son métier (j’ai eu une tante assistante sociale, et je trouve ici que c’est raccord), d’autant plus qu’Ennis n’en a pas fait une sainte nitouche, apparaissant plutôt forte et proactive face aux événements qu’elle vit et subit.
Et qu’en plus, même si les réponses et l’attitude du Punisher prêtent vraiment à sourire, on a là un homme bas du front, qui ne cherche pas à comprendre le pourquoi des exactions de ses hommes socialement en marge de la société (et qui s’en fiche totalement), les mettant au même niveau que des malfaiteurs qui ont clairement choisi leur gagne-pain, alors qu’eux cherchent à survivre. Il se fiche des circonstances et des causes les ayant amené à faire ce qu’ils font. ça peut s’entendre, mais en faisant cela, Ennis continue de construire le schéma de pensée du Punisher, en le mettant face à d’autres personnes ayant des arguments distincts (à l’instar de son questionnement vis-à-vis du métier de policier). Lui, il est là pour agir et punir, pas pour comprendre (même si elle arrive à le toucher, l’amenant à leur laisser une chance).
Et ce n’est qu’un sujet évoqué, puisqu’il y aussi l’échange concernant le Punisher en lui-même (l’instinct de l’assistante sociale), et si, là aussi, ça prête à sourire, on retrouve quand même un peu, de manière ici plus directe et évidente, les non-dits entre Joan et Castle. Et enfin, pour aller dans le sens du non-cliché, il y a un petit échange qui montre qu’Ennis respecte bien ce personnage.
Cette fois, c’est Tom Mandrake qui assure le dessin, arrivant tout juste chez DC où il a passé, dans la très grande majorité (y a eu du Valiant aussi, entre autres), ses 15 premières années de travail. Donc, autant dire que c’est une petite révolution, dans un style s’approchant, au niveau de l’encrage et de la gestion du noir, de celui de Darrick Robertson, ainsi que celui de Kyle Hotz (mais c’est peut être l’ambiance horrifique qui donne cette impression). En tout cas, c’est poisseux, sombre et malsain, comme le récit le demande. Avec la pointe de grotesque qui avec les idées d’Ennis.
Le style graphique me parait toutefois différent que son compères cités, on reconnait bien sa manière de dessiner les têtes rien qu’avec le Punisher. Il est plus carré, moins rond dans le trait.
J’aime également bien le côté trapu de ses personnage, ainsi que la dynamique de mouvement.
Toujours est-il, qu’aujourd’hui, socialement, cette histoire a encore toute sa place.