PUNISHER : BORN
Août 2003 (d’après la couverture) : alors que Garth Ennis n’avait pas encore entamé l’arc de la série Marvel Knight Les Rues de Laredo, il se lance dans la première mini-série en 4 épisodes du Punisher pour le label Max, dit « pour adulte », et relate ses origines du Punisher.
On retrouve Frank Castle dans une base du Cambodge, en octobre 1971, moins deux ans avant la fin du retrait des Etats-Unis de cette guerre. Le camp n’est pas organisé par un colonel qui se noie dans l’alcool, et qui pense qu’ils sont voués à mourir par manque d’assistance. Alors qu’un général vient inspecter la base et annonce sa prochaine fermeture (et donc le rapatriement des soldats), Castle s’arrange pour que ce dernier se fasse tuer « accidentellement » par un sniper.
Plus tard, lors d’une patrouille, il punit mortellement l’un de ses camarades qui a violé une Vietcong.
Et puis alors qu’il est en manque d’hommes et de munitions, le camp se fait attaquer, définitivement, juste avant que les bombardiers déversent le feu dans la campagne. Quand les hélicoptères atterrissent une fois le napalm éteint, les soldats découvrent tous leurs camarades morts … tous ? Non, car un Frank Castle à moitié calciné, avec un regard hagard, a survécu … tel un vrai diable.
Alors, si je ne me souvenais pas du déroulé de l’histoire, je me souvenais en revanche de l’idée globale distillé par Ennis, à savoir que le Punisher n’est finalement qu’un suppôt de Satan (personnellement, c’est à lui que j’identifie la voix intérieure du récit), un homme qui a fait un pacte avec le diable, qui aime trop la guerre pour s’arrêter. Et que le prix à payer est la mort de sa famille, qui lui servira également d’excuse pour sa croisade perpétuelle.
Que Castle ait un code d’honneur, en soit, ce n’est pas étonnant. La scène du viol et ce qui en découle sont plutôt assez cohérents avec ce qu’on peut lire du Punisher. Que Castle aime la guerre, je veux bien l’entendre. Qu’il tue un gradé, aussi bête soit-il, pour qu’il puisse la continuer, là, Ennis commence à façonner le personnage à sa manière. L’auteur donne l’impression de dire que tout est tracé, que Castle était voué à devenir le Punisher, d’une manière ou d’une autre. C’est dans son ADN, il n’y a pas de place au hasard.
De ce que je ressens à la lecture de cette histoire (qui a deux conteurs : un compagnon d’arme pour relater la réalité, et le Diable pour évoquer les pensées de Frank), c’est que le meurtre de sa famille n’est pas un accident, un manque de chance, un traumatisme qui aura fait retourner l’ancien soldat à peine remis du Vietnam.
Non, la mort de sa famille est la suite d’une décision égoïste d’un mec qui ne veut pas s’arrêter, qui ne vit que pour tuer et guerroyer. Indirectement, Ennis explique également pourquoi son Punisher ne vieillit pas (cf. plusieurs remarques que j’ai pu faire sur cet aspect pendant le run d’Ennis) et comment il passe au travers de blessures mortelles (au-delà du sense of wonder déformé). Il est protégé afin d’alimenter Satan de l’âme de pauvres diables.
Et là, pour une fois, je ne suis pas sûr de suivre totalement le sarcasme d’Ennis. Peut être suis-je trop « romantique » avec ce personnage (si on peut utiliser ce terme avec lui ), mais je trouve qu’il y a une sorte de déterminisme fantastique que je n’accepte pas, ici (je ne sais pas si j’utilise le bon terme) et qui, à mon sens, change totalement ses origines. Et 20 ans plus tard, mon avis n’a pas vraiment changé sur ce point.
Au dessin, on note le retour de Darrick Robertson, 8 mois après son dernier épisode sur le personnage. Et cette fois-ci, je en sais pas si c’est kla présence de Tom Palmer à l’encrage qui donne cela, mais le côté grotesque a disparu. On a ici des visages et de carrures plus réalistes, des expressivités plus naturelles (et il y en a beaucoup, d’autant plus qu’il y a d’excellentes séquences sans paroles), un encrage moins gras, tout en ayant un travail sur les ombres importants et fort à propos. Et je trouve également que la couleur Paul Mounts joue parfaitement son rôle dans l’ambiance, que ce soit dans la forêt, au crépuscule, en pleine nuit avec le napalm ou dans le baraquement du colonel.
Donc, même si je ne suis pas forcément d’accord avec cette vision des origines du Punisher, j’ai apprécié l’histoire dans sa globalité, magnifiée par un duo Roberston/Palmer.