REALISATEUR
Tim Burton
SCENARISTE
Daniel Waters, d’après une histoire de Daniel Waters et Sam Hamm (et une participation non créditée de Wesley Strick)
DISTRIBUTION
Michael Keaton, Michelle Pfeiffer, Danny DeVito, Christopher Walken, Michael Gough, Pat Hingle, Michael Murphy…
INFOS
Long métrage américain
Genre : action/aventures/fantastique
Titre original : Batman Returns
Année de production : 1992
À l’origine, Batman Returns (sorti en France sous le titre Batman : Le Défi) devait être une suite directe du Batman de 1989. Le scénariste Sam Hamm avait de nouveau été engagé pour travailler sur ce second chapitre, en conservant une continuité aussi bien au niveau du ton que de l’ambiance. Dans les premières versions du script, le Pingouin et Catwoman étaient bien présents, mais le troisième vilain était Harvey Dent (campé par Billy Dee Williams), dans une intrigue qui allait mener à sa transformation en Double-Face. Oh, et Robin était aussi de la partie, en jeune orphelin sans-abri.
Mais cette idée n’enchantait pas Tim Burton qui n’avait pas du tout envie de se lancer dans une suite au sens strict du terme. Suite au succès du premier volet, le réalisateur s’est vu offrir plus de contrôle créatif de la part de la Warner et a pu choisir le scénariste Daniel Waters (Fatal Games, Hudson Hawk, gentleman et cambrioleur) pour retravailler de fond en comble le scénario de Sam Hamm. Après avoir terminé Edward aux mains d’argent pour la FOX, Tim Burton a pu officiellement s’engager pour Batman Returns, avec la promesse du studio de pouvoir signer un véritable « film de Tim Burton ».
Dans l’histoire des longs métrages tirés de comics, Batman Returns tient une place à part car il s’agit là d’un deuxième opus qui possède une identité visuelle distincte (la vision de Gotham City sous la neige est toujours aussi marquante), une histoire qui se suffit à elle-même (les auteurs se sont juste permis une petite référence à Vicki Vale) et différents sous-textes qui détonnent pour une production placardée sur des jouets et des Happy Meals…ce qui rend les aspects satiriques du scénario de Daniel Waters encore plus savoureux et intéressants.
Exit Harvey Dent…à sa place, Waters et Burton ont développé un personnage d’homme d’affaires populiste et pourri jusqu’à l’os, Max Shreck (un hommage à l’acteur qui jouait le Nosferatu de Murnau), superbement interprété par Christopher Walken. On peut même dire que Shreck est l’antagoniste principal de Batman Returns tant ses manipulations agissent comme le déclencheur des actions de Catwoman et du Pingouin, êtres torturés. Max Shreck ne cherche que le pouvoir et il est prêt à tout pour arriver à ses fins. C’est parce que Shreck lui propose le poste de maire que le grotesque Pingouin (mémorable Danny DeVito) met un temps de côté son horrible plan car au fond de lui, Cobblepot cherche à obtenir ce qu’il n’a jamais eu, à être accepté. C’est parce que sa curiosité a failli lui coûter la vie que l’effacée Selina Kyle (magnifique Michelle Pfeiffer) se réincarne littéralement (l’histoire flirte là avec le fantastique) en prenant pour la première fois le contrôle de sa vie…et de sa sexualité…
Il a souvent été dit que Batman était presque un personnage secondaire par rapport aux trois vilains du film. Pour ma part, je ne trouve pas ça juste. L’économie de paroles (voulue par Michael Keaton lui-même) fonctionne et le combat intérieur d’un homme pétri de doutes prend forme de manière différente à l’écran car ses adversaires représentent chacun une sorte de « miroir déformé » de la personnalité de cette version de Bruce Wayne. Le jeu de Michael Keaton est subtil et il n’a pas besoin de dialogues un peu trop démonstratifs (comme dans certains passages du premier Batman) pour exprimer ce qu’il éprouve. Et pour en revenir aux images fortes, sa première apparition est magnifiquement mis en scène.
Batman Returns ne souffre pas des mêmes problèmes de rythme et des mêmes lourdeurs que le précédent. L’ensemble est captivant et ne manque pas de scènes inoubliables (et cela démarre vite avec la séquence pré-générique qui conte la naissance du Pingouin). Une de mes préférées est celle du bal costumé donné par Max Shreck, juste avant l’acte final. Bruce Wayne et Selina Kyle y sont les seuls invités non costumés…en apparence. Car il est clair que pour eux Bruce et Selina sont les « costumes » de Batman et Catwoman. Leur danse, où chacun devine l’identité de l’autre, est un beau moment intimiste avant le spectacle débridé qui suit.
Tragique conte de fées gothique et psychosexuel, sublimé par la partition de Danny Elfman, Batman Returns est pour moi la meilleure entrée d’une tétralogie qui s’effondrera qualitativement dès son troisième volet, suite à la décision de la Warner de faire passer le merchandising avant le créatif. Joel Shumacher ne s’en est jamais caché : ses Batman étaient surtout là pour vendre des jouets. Et d’ailleurs, Batman Forever a récolté plus d’argent que Batman Returns qui a moins attiré les foules qu’en 1989.
La Batmania était terminée…