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Je connais assez mal Bernard Prince, pour la simple raison que je ne suis pas grand fan de Hermann (mais je vais me rattraper, car j’ai trouvé un stock de vieilles éditions de la série, ainsi que de Comanche, à pas cher, et je vais rattraper ces lacunes bien vite). Et j’ai donc découvert l’existence d’albums dessinés par d’autres. Deux tomes ont été illustrés par Dany, deux autres par Édouard Aidans. Et j’ai donc récemment acheté (et lu ce soir) Le Piège aux 100 000 dards, un tome contenant deux histoires plus courtes, dessinées par Dany.
Le premier récit, qui donne son titre à l’album, voit Bernard Prince et son associé Barney Jordan assister à une révolution sanglante dans un pays africain d’une Afrique secouée par l’instabilité politique. Avec l’aide d’un vieux militaire grognon, ils montent une expédition dans le but de secourir deux familles de Blancs ayant fui les fusillades et dont l’avion est tombé dans une zone d’arbustes épineux dont le suc est mortel. La mission prend des airs de tour de force genre Agence tous risques, mais ils parviennent à sauver in extremis les fuyards avant d’être à leur tour secourus par l’armée, qui a maté la révolte. L’album date de 1980 et malgré les belles paroles de Bernard Prince à la fin, qui rêve d’une Afrique où Blancs et Noirs pourraient vivre en sécurité et se lamente de ce que la colonisation a détruit, force est de constater que les naufragés sont blancs, que les secouristes sont blancs, que les militaires sont blancs, et que les seuls Noirs du récit sont soit des mutinés sanguinaires (et drogués, nous précise-t-on), soit des employés à l’accent appuyé, soit des représentants de l’autorité débordés par la situation qui vire au carnage. Les militaires loyalistes apparaissent le temps de quelques courtes cases, où ils font preuve de courage certes, mais ne brillent pas par leur présence. Bref, on dira pudiquement que c’est un peu daté.
Le second récit envoie les deux marins dans une ville portuaire qui semble appartenir à l’Afrique du Nord (la cité et le pays ne sont pas plus identifiés, Greg plaçant son récit dans un pays imaginaire, concentration des lieux communs de cet exotisme bon marché), et ils se rendent dans un troquet tenu par un aveugle qui pourtant y voit clair. C’est l’occasion pour Bernard Prince d’évoquer un épisode de sa jeunesse, quand il travaillait à Interpol, et de revenir sur ce personnage d’ancien voleur surnommé nyctalope et reconverti en bistrotier.
Les deux récits profitent de la verve de Greg, qui place dans la bouche de ses deux baroudeurs un vocabulaire gabino-audiardien du meilleur effet. Ça s’écoute un peu parler, ça se lance dans de grandes envolée (« C’est curieux chez les marins ce besoin de faire des phrases », disait Maître Folace alias Francis Blanche), mais les planches en ressortent avec un charme indéniable.
Jim
Jim