COUPS DE FEU DANS LA SIERRA (Sam Peckinpah)

REALISATEUR

Sam Peckinpah

SCENARISTE

N.B. Stone Jr

DISTRIBUTION

Joel McCrea, Randolph Scott, Mariette Hartley, Ron Starr, R.G. Armstrong, L.Q. Jones, Warren Oates…

INFOS

Long métrage américain
Genre : western
Titre original : Ride the High Country
Année de production : 1962

Après avoir fait ses armes à la télévision sur des séries western (La Flèche Brisée, L’Homme à la Carabine ou encore sa création The Westerner), Sam Peckinpah réalise son premier long métrage en 1961, le western New Mexico avec Maureen O’Hara. Une très mauvaise expérience de l’aveu du metteur en scène qui ne s’est pas du tout entendu avec sa star et qui a vu le résultat final lui échapper au montage. Peckinpah a eu par contre un peu plus les coudées franches pour son film suivant, Coups de feu dans la Sierra (Ride the High Country en version originale)…peut-être parce que la MGM n’avait pas une grande confiance dans le projet que le studio destinait originalement aux doubles programmes.

Sam Peckinpah a ainsi pu retravailler le scénario (sans être crédité au générique) pour que l’histoire soit plus en phase avec sa vision de l’Ouest, avec les récits qu’on lui racontait dans sa jeunesse. Coups de feu dans la Sierra fait partie des toutes premiers oeuvres charnières qui ont fait le lien entre le western hollywoodien dit « classique » des années 30 à 50 et l’évolution en grande partie amenée par une vision européenne que le genre a connu à partir des années 60. Sujet développé à travers le portrait souvent touchant de deux figures vieillissantes, confrontées à une modernité qu’ils ne comprennent pas (voir l’ouverture avec le chameau et un premier modèle de voiture) et à une profonde perte de valeurs…

Les deux têtes d’affiche sont deux acteurs alors en fin de carrière. Joel McCrea (qui fut notamment Wyatt Earp dans Un jeu risqué de Jacques Tourneur et Bat Masterson dans Le Shérif aux mains rouges) est Steve Judd, un ancien homme de loi qui a accepté de convoyer le chargement d’or de la petite ville minière de Coarse Gold vers la banque la plus proche. Judd semble sortir d’une autre époque et il est gêné par les limitations dues à l’âge (il préfère changer de pièce pour pouvoir mettre ses lunettes et lire son contrat). Parce qu’il ne peut mener cette expédition seul, il engage une vieille connaissance, Gil Westrum, qui fait équipe avec un petit jeune souvent inconscient, Heck Longtree.

Randolph Scott (qui avait terminé deux ans plus tôt sa très belle collaboration avec Budd Boetticher avant de prendre sa retraite juste après Coups de feu dans la Sierra) incarne Gil Westrum, un aventurier se distinguant des nombreux héros de westerns qu’il avait campés les années précédentes par son côté opportuniste. Les détracteurs de Scott ont souvent qualifié son jeu d’un peu trop « raide », un avis que je ne partage pas. Il est ici impeccable dans l’expression des différentes facettes de Westrum, un homme qui n’hésite pas à réécrire sa propre légende pour pouvoir glaner quelques dollars comme le montre sa première apparition. Westrum regarde vers l’avant, s’adapte au cynisme ambiant ce qui donne des interactions très bien écrites entre les deux hommes…

Coups de feu dans la Sierra ne se repose pas uniquement sur l’action (les gunfights interviennent dans le dernier acte et l’affrontement final est tendu et bien réalisé), plutôt sur la psychologie en suivant les traces de ce quatuor. Car les trois hommes sont rejoints par Elsa Knudsen, une jeune femme rencontrée lors d’une de leurs étapes et qui compte bien se marier avec l’un des chercheurs d’or de Coarse Gold. Encore très naïve, Elsa va se rendre compte pour son plus grand malheur qu’elle avait idéalisé l’homme de ses rêves dans une scène de mariage cauchemardesque qui détonne dans un western de studio du début des sixties.

Première réussite de Sam Peckinpah, Coups de feu dans la Sierra pose les bases de son cinéma, des thèmes qui lui seront chers tout au long de sa carrière. La distribution est excellente (en plus de Joel McCrea et Randolph Scott, il y a des visages bien connus de la filmographie de Peckinpah comme R.G. Armstrong, L.Q. Jones et Warren Oates), la mise en scène ne manque pas de qualités…et le dernier plan est aussi déchirant que magnifique !