[quote=« n.nemo »]Bon après, y a une certaine poésie à avoir une langue que personne ne sait vraiment écrire.
La dicté de Bernard pivot, c’était ça non ? Une façon de tous se rendre compte que la faute d’orthographe est inévitable. ^^[/quote]
C’était le vaste mensonge souriant du truc.
Tout le monde fait des fautes. Et oui, il y a un aspect poétique, ou tout simplement vivant, à constater que tout le monde ne maîtrise pas. Voire que personne ne maîtrise parfaitement.
Mais qu’importe : la langue est quelque chose qui nous relie. Si on l’affaiblit, selon moi, on affaiblit les liens qui nous unissent tous.
C’est pas pour rien que l’idée de nation se construit non seulement sur le territoire, la monnaie ou l’ethnie, mais aussi sur la langue. Je dis pas que c’est bien, que c’est admirable, je suis bien conscient que c’est totalement politique avec un petit côté totalitaire, mais c’est quand même un indice.
[quote=« n.nemo »]
[quote=« Jim Lainé »]
J’ai cette conversation souvent, avec un pote, concernant la bande dessinée franco-belge. Il est persuadé que le niveau qualitatif a augmenté. Moi pas. Je vois passer trop d’albums dessinés avec les pieds. Et je crois qu’on peut dire la même chose de l’encadrement éditorial. Couleurs ternes, lettrage pas exigeant, dialogues plats… Concrètement, ce qui a augmenté, c’est la qualité du papier et de l’impression, de la reliure et du façonnage. Mais je ne suis pas sûr que l’augmentation du nombre de sorties coïncide avec un accroissement de la qualité. Sachant qu’il n’y a pas davantage d’éditoriaux, le soin et le suivi accordés à chaque bouquin n’est pas suffisant pour le tirer vers le haut.
Là encore, selon moi.[/quote]
je lis en plusieurs fois. Bon, bon, autant pour moi alors[/quote]
Selon moi, l’accroissement de la quantité de bouquins sortis (d’albums franco-belges ou d’albums comics, si l’on veut rester dans la discussion du début) ne s’accompagne pas d’un accroissement proportionnel de gens qui s’en occupent. Mettons que l’on double le nombre de sorties, on ne va pas doubler le nombre de responsables éditoriaux. Pendant un temps, on va s’arranger pour que la rédaction absorbe le surplus, et quand les coutures commencent à craquer, on va embaucher une personne et sous-traiter telle ou telle autre fonction.
Le résultat, c’est que plein de gens se retrouvent à devoir produire davantage de bouquins en un temps réduit (le même temps, pour plus de référence, donc un temps moindre pour chacun des ouvrages). Afin d’assurer le calendrier, on va donc procéder à des choix et revenir au plus petit dénominateur commun, à ce qu’on sait faire et qui ne pose pas de problème, parce que c’est une méthode éprouvée.
En franco-belge, c’est simple : pas d’innovation. Pas de polices bizarres, pas d’expérimentation narrative, pas de bulle folklorique, pas de pagination hasardeuse… On fait appel aux mêmes prestataires externes et on tourne sur des stagiaires afin de gérer le tout-venant. Les stagiaires génèrent un gros turn-over qui fait que, même au bas de l’échelle, on n’a pas d’interlocuteur stable, et aux postes de responsabilité, c’est pareil, les têtes changent tout le temps. Les gens les plus stables sont au-dessus des collections, ils ne gèrent pas le quotidien ni le suivi des albums. Et quand on sait que certains éditoriaux se réorientent ensuite vers le marketing ou l’événementiel, on se doute que leur passage à un poste éditorial relevait davantage de l’erreur de casting que de la profession de foi : on imagine l’encadrement qu’ils peuvent offrir.
En comics, c’est différent, du simple fait que les processus de fabrication sont industrialisés depuis des décennies. Donc on fait appel à des lettreurs et des coloristes extérieurs qui assurent le rythme. Mais force est de constater, chez les deux gros éditeurs, la grande difficulté des editors à installer des équipes stables sur plusieurs numéros d’affilés. L’équipe Snyder / Capullo / Miki / Placenscia, c’est une énorme exception. On ne compte plus le nombre d’Annuals ou de numéros spéciaux de 38 pages dessinés à quatre, six ou huit mains (parfois plus). Et là, pour le coup, ça fait plus de dessinateurs pour une qualité moindre (j’ai bien conscience que c’est un exemple extrême, certes).
Les équipes éditoriales ne sont pas tellement plus nombreuses. En général, ils sont deux, parfois trois à se charger d’un titre. Mais déjà, on retrouve les noms sur cinq ou dix comics, voire plus. Ensuite, souvent le premier ne gère pas le quotidien. Enfin, les noms varient régulièrement, souffrant ici aussi d’un turn-over qui ne profite pas aux BD. Ils ne sont pas assez nombreux, ils ne restent pas assez longtemps pour établir des relations saines avec tous les intervenants…
Le résultat, c’est qu’ils ne peuvent pas consolider les séries sur le long terme, et que, dans une certaine mesure, les équipes d’auteurs sont un peu livrées à elles-mêmes.
Pour résumer, je dirais que les éditeurs veulent accroître leur catalogue, mais pas embaucher l’armée nécessaire à cette mission. Tôt ou tard, ça coince et ça se voit dans les bouquins.
Jim