Discutez de Le havre
Jay m’a rapporté les deux tomes du Havre, dédicacés. J’ai donc entamé ma lecture.
On suit Jacques Daniel, un barman qui officie dans un estaminet tenu par une quadragénaire désabusée qui entretient de bonnes relations avec les sphères du pouvoir (politique, judiciaire ou sportif) local. Un matin, alors que sa compagne vient de le quitter, il a vent de l’affaire qui fait causer tous les commerçants du quartier, la mort d’une jeune femme blonde portant un blouson de cuir. Il croit reconnaître son ex, ce qui n’est pas le cas, mais il continue à la chercher et, aussi, à écouter les conversations, apanage des gens de sa profession. De fil en aiguille, il comprend que certaines personnes qu’il a vu dans son établissement se connaissent et sont sans doute liés à la femme morte, qui elle-même est venue, ledit soir, descendre quelques verres en solitaire. La quête commence.
L’album se conclut sur la rencontre entre Jacques et un inspecteur qui n’a pas renoncé à enquêter sur la disparition de sa compagne, malgré les pressions de la hiérarchie. La construction du récit alterne les séquences en cases et bulles avec les scènes où de grands récitatifs de narrateur viennent habiller les images, ce qui fait dire à Jay que Le Havre est son « roman graphique ». L’exercice se prête assez bien à l’ambiance de roman noir qui nappe cette errance nocturne dans les milieux interlopes.
Jim
Le deuxième tome reprend là où le premier s’était arrêté, à la discussion entre Daniel le barman et Grisvert le policier. Tout tourne autour des dernières occupations des principaux protagonistes, qui ont tous fréquentés le bar.
Parallèlement, Jacques accueille trois SDF (dont un ancien cuisinier et un ancien plombier, ce qui leur permet de copiner avec le voisinage) pour les fêtes, alors que la neige recouvre le port. La présence de ces trois nécessiteux met en valeur, par contraste, l’attente du héros, qui espère le retour de sa Mimi, dont la disparition n’est toujours pas élucidée. Le récit est ponctué par les rencontres ou les conversations téléphoniques entre le bistrotier et l’enquêteur, et on voit les différentes pièces du puzzle s’assembler et éclairer la mort de la cliente et la disparition de Mimi… jusqu’au dérapage final, d’autant plus tragique qu’on a vu les personnages retrouver une place dans l’équilibre nouvellement créé.
C’est pas mal du tout, les textes off sont peut-être parfois un peu envahissant mais donnent une belle allure graphique aux séquences. Le final (et quelques illustrations en complément) a un petit parfum d’hommage à Sin City.
Jim
Chouette dédicace chez Stéphane à Univers BD, à Caen, en compagnie de Jay. On a donc signé conjointement Super-Soldat, et lui remettait sur le devant de la scène Le Havre, tandis que je faisais la promo de Webster & Jones ainsi que de Fredric, William et l’Amazone.
Et Le Havre, dont les deux tomes étaient présents en quantité égale, s’est bien vendu, vraiment. Et ça, c’est très cool. Parce que le bouquin, sorti à l’origine chez Vagabondages avant que le catalogue ne soit repris par l’OREP, n’a jamais été travaillé correctement. Ce qui fait que le public le redécouvre, et à chaque signature à laquelle j’assiste, il part bien (c’était déjà le cas au salon du livre de Caen, en mai dernier, par exemple).
Et ça me ravit. Un bon petit polar qui n’est pas exempt de défaut mais qui tient bien son rythme et ses enjeux.
Jim
Et donc ?
Et en fait, Webster s’est bien vendu mais, contrairement à ce qui s’est passé une semaine avant chez Didier à Évreux, c’est Super-Soldat qui a très bien fonctionné aussi (présence de Jay oblige, fatalement), mais pas Fredric. Enfin si, une seule signature, mais à un client qui l’avait déjà acheté, et qui donc va échanger cet exemplaire dédicacé avec celui, vierge, qu’il a à la maison.
Une séance ne fait pas l’autre.
Jim