MARVEL CLASSIC #1-15

Englehart, j’apprends à redécouvrir en ce moment. Je me rends compte que gamin, j’ai adoré des tas de trucs de lui sans forcément faire le lien entre tous ses travaux. Et feu Marvel Classic, justement, lui faisait la part belle. Une raison de plus de déplorer l’arrêt du mag’.
Heureusement, les intégrales « Avengers » abordent son run, là. Et j’ai d’énoooooormes lacunes en la matière (j’ai quand même lu la « Serpent Crown Saga » y’a deux trois ans en Best of ; tiens, encore une collection « patrimoniale » tombée à l’eau…). Notamment la saga de la Madone Céleste, que j’ai jamais lue. Ouais, je sais, c’est pas cool. :wink:

Tu fais bien de me rafraîchir la mémoire…ça donne des idées de relecture… :wink:

Je viens de me replonger dans Marvel Classic #14, qui reprend la saga de l’Empire Secret signée Steve Englehart et Sal Buscema. C’est très chouette, très frénétique, rapide, ça fonce en avant sans se soucier des subtilités, si bien que les ficelles sont grosses, que les coïncidences sont forcées, que les rencontres fortuites se multiplient, que les plans des méchants sont tordus, mais ça fonctionne à l’énergie, au rythme. Seul bémol graphique, Sal Buscema est pour l’essentiel encré par Vince Colletta (le premier épisode est assuré par McLaughlin, et c’est d’un autre niveau) et l’on se plaît à rêver de ce que ça aurait pu donner si le niveau avait été le même que pour la trilogie de « l’Imposteur ».

Il se passe un grand nombre de choses dans cet épisode : Cap est pris à parti par une ligue de bien-pensance qui l’accuse de tous les maux, le Faucon gagne des ailes grâce à la Panthère Noire et croise à nouveau le chemin de criminels de Harlem réfugiés au Wakanda (quand on vous parle de rencontres fortuites), Steve et Sam prennent la route de l’Amérique, tels un Hal et un Ollie de la concurrence, et croisent le Hurleur et les X-Men, et c’est cette rencontre fortuite (tiens tiens…) qui permet aux deux héros de découvrir l’existence d’un vaste complot mené par une organisation appelée l’Empire Secret, et dont les origines remontent à Tales of Suspense (je ne suis pas allé vérifier, je fais confiance à Englehart).
Bref, c’est très sympa, ça fait feu de tout bois, ça cause aussi de l’Amérique, de ses doutes, de ses vieilles rancunes, de ses fantômes, de ses divisions, de son racisme (ici, la figure du mutant comme victime est évidente), il y a un sous-texte politique intéressant, mais traité de manière plus bordélique que précédemment (bon, si j’aime énormément la période Englehart, je préfère les débuts de sa prestation, avec les trois épisodes de l’Imposteur puis les récits sur la corruption de la police ou sur l’empoisonnement de Cap par les Serpents, ce qui l’amène à avoir une super-force… et un peu moins la deuxième partie, que je trouve moins maîtrisée, malgré l’enthousiasme général…).

Ce qui me frappe, à l’occasion de ce survol de la VF, c’est qu’Englehart ne loupe pas cette nouvelle occasion de « ranger les jouets », comme je dis parfois. Il donne de l’ordre, du sens et une explication rétroactive à certains épisodes. Et, d’une certaine manière, il retrace le parcours des X-Men durant cette fameuse période creuse durant laquelle les Mutants n’ont plus d’aventures inédites à leur nom.
En effet, Englehart utilise une conversation entre Cap et le Professeur Xavier pour faire le point sur les Mutants. Le mentor des X-Men précise d’emblée que ses élèves ne sont pas très connus du public, ce qui est une remarque à plusieurs détentes. Déjà, cela témoigne du secret dans lequel il drape son école de jeunes surdoués, qu’il envisage comme un havre de tranquillité loin de l’agitation du monde (et de ses élans de haines). Ensuite, bien entendu, cela revêt une dimension méta, puisque ces personnages, guère populaires à l’époque, sont devenus des seconds couteaux, des figurants dans d’autres séries, loin des vedettes du catalogue. Enfin, le secret lié aux Mutants sert aussi le scénariste de Captain America puisqu’il associe cette communauté isolé à un complot d’échelle nationale dont elle est la victime directe.
Et donc, Xavier entame un long récapitulatif.

La première étape renvoie à Avengers #110-111, datés d’avril et mai 1973, deux épisodes également écrits par Englehart. Dans le premier volet, Quicksilver reprend contact avec sa sœur, après avoir été secouru par Crystal des Inhumains, mais se brouille aussitôt avec elle quand il apprend qu’elle noue une idylle avec Vision, un être synthétique. Les Vengeurs se portent ensuite au secours des Mutants, et on remarquera qu’ils sont assaillis par Cerebro, visiblement capables de manœuvres agressives par le biais de tentacules préhensiles : je me demande si c’est la première fois que la machine de Xavier se comporte ainsi, mais je n’ai pas encore vérifié dans la série de base.
Dans cet épisode, les héros découvrent que Magneto a revêtu le costume d’Angel afin de tromper Iron Man, et qu’il parvient à enlever Scarlet Witch. Après un passage dans Daredevil #99, les héros enrôlent Tête-à-Cornes et Black Widow et affrontent le maître du magnétisme, dans Avengers #111. Ce dernier tient certains mutants sous sa coupe, ce qui permet de générer un nouvel affrontement entre héros.

Mais à la fin du récit, Xavier se rend compte qu’un de ses élèves manque à l’appel : Angel. Dans le flash-back de Captain America #173, le scénariste explique que Xavier cherche à contacter le seul étudiant qui ait mené une vie en-dehors de l’école, Hank McCoy, alors héros de la série Amazing Adventures, où il connaît une mutation supplémentaire qui lui fait adopter l’allure d’un fauve à la fourrure bleue. Ces épisodes, lancés par Gerry Conway, sont en grande partie rédigés par Steve Englehart, qui fait voyager le héros, notamment au Canada afin d’affronter Mimic ou Hulk.

Or, la dernière aventure que McCoy vit dans cette série est publiée dans Amazing Adventures #16 (le numéro 17 est composée de deux pages par Englehart et Starlin et d’une réédition des back-ups réalisées par Arnold Drake et Werner Roth dans X-Men, racontant les origines de Hank), avant que le Fauve cède la place à Killraven. La fin du périple de McCoy et de sa fiancée aura lieu dans Incredible Hulk #161 (daté de mars 1972, donc un peu avant les deux chapitres d’Avengers), également écrit par Steve Englehart, et concluant une partie des intrigues aperçues dans Amazing Adventures.

Et effectivement, après cette rencontre, le sort de Hank McCoy demeure inconnu, et Xavier, dans le flash-back, note qu’un second X-Man manque à l’appel. Pas très bien tenue, cette école. En filigrane, on peut se demander si le principe même de l’Empire Secret et surtout de l’enlèvement des Mutants ne serait pas venu à Englehart au moment de la rédaction de ces épisodes. Ou bien, justement, la fin de ce feuilleton, conclu dans les pages de Hulk, a-t-elle été précipitée et lui a-t-elle donné l’envie d’apporter une suite, ou des précisions.

Le dernier flash-back renvoie à Incredible Hulk #150, un épisode réalisé par Archie Goodwin et Herb Trimpe et daté d’avril 1972. Le numéro raconte comment le Titan Vert croise le chemin de Havok et Polaris, un couple d’amoureux qui a également quitté l’école de Xavier afin de vivre peinard dans le sud. Le résumé de Xavier laisse entendre qu’après cette aventure, le sort des deux jeunes amoureux demeure inconnue, et leur maison abandonnée.

Englehart se saisit donc d’un vide, manifesté dans une période de quelques mois, une absence motivée par des raisons éditoriales (les personnages ne font pas vendre) et qui constitue le moteur d’une intrigue. Dans Captain America #174, Cap, le Faucon et les X-Men découvrent que leurs amis disparus, ainsi que quelques vilains (dont Mesmero, le Cerveau ou le Colosse…) sont attachés à un dispositif siphonnant leurs énergies cérébrales. Englehart ne se perd pas en détails sur l’utilité de cette machine dans le vaste plan de l’Empire Secret (visant à faire croire à l’Amérique à une attaque si bien ourdie que le seul salut est dans la reddition), mais il tire de la matière malgré l’arrêt de la série X-Men et transforme un échec commercial en prétexte narratif. Il s’impose aussi, indirectement, en scénariste principal des mutants durant leur « traversée du désert ».

Jim

J’ai récemment trouvé à vil prix le Marvel Classic #13 qui reprend les débuts de la série Captain Marvel, d’abord dans deux numéros de Marvel Super-Heroes avant que Goodman et Lee donne à l’envahisseur Kree son propre titre (à peu près en même temps que Sub-Mariner, en 1968, spasme d’expansion du catalogue).
Pour ma part, j’ai ça dans les Marvel (mais il doit m’en manquer un ou deux) et dans les Essential, mais trouver cet exemplaire me permet de relire les débuts de série en couleurs dans le format prévu à l’origine.

Déjà, plein de choses étaient parties bien loin : par exemple, je ne me rappelais pas que Carol Danvers apparaissait si tôt dans la série, à savoir dans Marvel Super-Heroes #13. Bon, Stan Lee (qui se décharge très vite sur Roy Thomas), en fait la responsable de la sécurité, ce qui est pas mal, mais il ne sait guère l’utiliser en dehors du rôle de demoiselle en détresse. Elle est souvent là, elle réfléchit beaucoup et se pose plein de questions, mais ne semble pas avoir beaucoup d’influence. À sa décharge, les scénaristes créent avec le Général Bridges un vieux briscard au grand cœur dont ils ne font pas grand-chose non plus.
La présence de Roy Thomas au scénario est l’occasion de ranger un peu les jouets cosmiques : on revient sur la Sentinelle « détruite » dans Fantastic Four, on met en scène officiellement la guerre sempiternelle entre Krees et Skrulls… Les emprunts à FF sont nombreux. Malgré cette volonté d’ordre typique du scénariste, on avance un peu au doigt mouillé : ça se sent avec les intrigues tournant autour de la valise que trimballe constamment Mar-Vell, dont la fonction n’est guère explicitée, dont les pièges à tiroirs sont inventés au fil de l’eau.
Malgré tout, ça se lit très bien, grâce bien sûr à Gene Colan, que Vince Colletta ne parvient pas tout à fait à gâcher. C’est speed, enflammé, plein d’élan. J’ai été étonné de trouver que le premier chapitre racontait si peu de choses : j’avais le souvenir de quelque chose d’un peu plus dense. Plein d’idées sont abandonnées en route (l’intrigue autour du veilleur de nuit était bien, le personnage était pas mal, mais l’ensemble est rapidement escamoté), mais ça speede. Une série en constant test des limites.

Et du coup, à la lecture de ces épisodes mais aussi du texte de conclusion qui réserve quelques vacheries à Arnold Drake et Don Heck, relégués en seconde zone, ça me donne envie de relire plus attentivement leurs épisodes en Essential. Pareil, j’ai lu ça en VF dans le désordre, va falloir que je m’y replonge, quand même, je suis sûr que c’est très riche.

Jim

Mais… mais… ça va pas, non ? Arrêtez !!!

Oui, et bien on a trouvé pire que Vincenzo comme encreur : une partie des épisodes semble avoir été encrée au bic. Et ce n’est pas Coletta.

L’idée intéressante (outre celle de piquer le nom du Captain à DC Comics) était de faire du héros un espion infiltré par une puissance étrangère. En pleine Guerre froide, c’est couillu.

Ouais, mais c’est un gentil, il trouve que tous les soldats américains sont innocents.
Pareil, on n’en fait pas grand-chose : l’enquête de Danvers et Bridges n’avance pas, les doutes existentiels de Mar-Vell sont là pour nourrir le pathos de la dernière page, le veilleur de nuit qui aurait pu justement nourrir toute une intrigue est évacué, les confrontations à la hiérarchie sont rares, Yon-Rogg est caricatural…
Oui, l’idée est bien. La réalisation, moins.
Mais on s’en fout un peu, on est emporté par l’action.

Jim

Double titre.

J avais lu aussi qu il y avait une idée de lorgner vers Star Trek
Goodman voulait a tout pris un extraterrestre (je sais plus pourquoi)

Plutôt surprenant de la part d’un éditeur qui déclarait que « les fusées ne faisaient pas vendre (les comics) ».
Ou alors, un alien à la Superman (ce qui expliquerait le pourquoi du « Captain Marvel ».)